On a passé une soirée (et un service) avec Jean Imbert dans les coulisses du Plaza Athénée

On a passé une soirée (et un service) avec Jean Imbert dans les coulisses du Plaza Athénée

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Par Robin Panfili

Publié le , modifié le

Une virée inédite dans les entrailles du palace, en compagnie du chef étoilé Jean Imbert.

Toutes les aventures, petites ou grandes, ont un début. Le nôtre sera une porte en métal, à quelques mètres de la célèbre avenue Montaigne, connue pour ses boutiques de luxe et ses grosses berlines aux vitres sans tain. Difficile de croire, face à cette porte épaisse, que l’on s’apprête à pénétrer dans les entrailles d’un des plus prestigieux palaces de la capitale : le Plaza Athénée. Et pourtant, juste derrière l’imposante serrure, c’est Jean Imbert qui nous attend pour une virée inédite dans l’histoire de l’établissement dans les coulisses du restaurant — de la cave secrète aux arrière-cuisines de son restaurant gastronomique étoilé. Alors que le Plaza Athénée vient d’avoir la chance de décrocher son propre ouvrage dans la célèbre collection Travel From Home de la maison d’édition Assouline, nous avons ainsi eu le droit d’arpenter les couloirs et les moindres recoins de cet édifice emblématique de l’histoire culinaire et hospitalière parisienne. Une visite commentée par Jean Imbert en personne. En route.

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L’entrée de service

C’est ici que notre visite débute, mais surtout là où la vie du palace prend forme, du matin au soir et du soir au matin. Cette porte de service est empruntée par l’intégralité du personnel du Plaza Athénée — 550 personnes, sans compter les fournisseurs et les coursiers. Sans exception, puisque même Jean Imbert l’utilise chaque jour. La règle est simple : la porte centrale, la célèbre et l’entrée historique, est réservée aux clients. Mais est-ce que les invités exceptionnels, les stars et des célébrités, ont le droit d’emprunter cette entrée de service pour rester discrets ? À cette question, on devra se contenter d’un “joker”, dissimulé dans un sourire, comme réponse. Au Plaza Athénée, il est des secrets que l’on ne peut révéler. Et tant mieux, au fond.

La salle de restaurant

Depuis la création de l’hôtel en 1913, cette salle de restaurant a toujours été… une salle de restaurant. Mais son nom a changé et évolué avec le temps. On l’a d’abord appelée Le Régence, lors des premières décennies, plongé dans un décor classique, avant de connaître sa première mue, à l’arrivée du chef infiniment étoilé, Alain Ducasse, en 2000. La salle prend alors le nom de son nouveau pilote : l’ADPA, pour Alain Ducasse au Plaza Athénée. Le décor est alors complètement repensé, bouleversé, pour une ambiance plus moderne et contemporaine, signé par Patrick Jouin et Sanjit Manku.

Lorsque Jean Imbert pose ses valises et ses casseroles au Plaza Athénée, en 2021, il a fallu réfléchir à comment (re)baptiser la salle de restaurant. Un choix tout sauf anodin, quand on sait le poids de l’histoire qu’elle porte sur ses épaules. Comme un hommage à son prédécesseur, le palace opte pour Jean Imbert au Plaza Athénée. Le chef laisse alors à Rémi Tessier le soin de se réapproprier le décor, avec un changement d’ambiance franc et assumé, pour revenir à une décoration plus classique. L’une des particularités de la salle sera la désormais célèbre et impressionnante table de 12 mètres qui trône au milieu de la salle de restaurant.

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En prenant les commandes du restaurant gastronomique du Plaza Athénée, Jean Imbert avait un projet aussi clair qu’audacieux : revenir aux essentiels de la cuisine française, en proposant des plats traditionnels afin que les clients aient véritablement la sensation de mettre les pieds — et leur âme — dans un restaurant où l’on sert et l’on met véritablement en valeur la grande cuisine française. L’une des particularités de cette nouvelle ère du Plaza Athénée sera le “spectacle” qui intervient, chaque soir, à l’annonce des desserts, orchestrés par les chefs pâtissiers Angelo Musa et Elisabeth Hot-Geoffroy, pensé comme un moment unique et hors du temps.

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La cave

Ce n’est pas tous les jours que les palaces parisiens acceptent d’ouvrir leur cave à vin au public. Bâties, pensées et sécurisées comme des forteresses, ces cavernes aux mille trésors sont souvent accessibles à quelques rares personnes de confiance de l’établissement, et personne d’autre. Au Plaza Athénée, seules quatre personnes peuvent y accéder. Et on comprend pourquoi : la cave compte pas moins de 45 000 bouteilles, supervisées d’un œil expert et avisé par le sommelier Laurent Roucayrol. La bouteille la plus précieuse ? Probablement une bouteille datant de 1913, année de l’ouverture de l’hôtel. “Cet endroit est fou, je devrais y descendre plus souvent”, souffle Jean Imbert dans un sourire.

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Les cuisines

Les cuisines du Plaza Athénée, et notamment celles du restaurant gastronomique, sont un ballet que l’on a rarement la chance de voir à l’œuvre. Alors, après avoir eu la belle opportunité d’assister à un service de l’intérieur, on va vous résumer la chose : un tourbillon silencieux, organisé au millimètre près, et réglé comme une horloge. Ici, la brigade de 20 personnes s’affaire chaque soir dans une minutieuse chorégraphie de quatre heures. Au “passe”, là où Jean Imbert pilote le service et dresse les assiettes, le chef ne part jamais bien loin “afin de garder un œil sur tout ce qui sort”. Mais ça ne dure qu’un temps : chaque jour, il parcourt pas moins de 11 kilomètres dans les dédales du palace. “Les couloirs sont grands au Plaza Athénée et les cuisines assez distantes les unes des autres”, dit-il. Et comme Jean Imbert tient “à se tenir au plus près de chacune de ses équipes”, il faut cavaler.

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La Cabinet des conspirateurs

À une époque, on l’appelait l’Aquarium. Un petit vestibule étroit, cossu, juste en face de la cuisine, à l’abri des regards indiscrets. C’était du temps d’Alain Ducasse et des rencontres plus ou moins secrètes, et plus ou moins légendaires. Qui a vraiment fréquenté cette petite salle créée par le chef étoilé ? La rumeur a soufflé tous les noms possibles et imaginables : des politiques, des chanteurs, des chefs d’État, des acteurs… Mais personne ne saurait vraiment dire ce qui appartient à la réalité ou non.

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Depuis l’arrivée de Jean Imbert au Plaza Athénée, l’endroit n’a pas changé. Du moins, il n’a pas bougé. Car l’intérieur du vestibule, lui, a été complètement bouleversé. Il l’a rebaptisé en “Cabinet des conspirateurs”, pied de nez à la légende et aux bruits de couloirs, et l’a décoré entièrement en bois, “comme une cabine de bateau”, confie-t-il. Une référence à peine dissimulée à ses origines bretonnes et à son lien charnel avec la mer et le grand large. On y trouve aussi, sur l’un des murs, une immense affiche d’un vieux film de cinéma, une autre passion du chef. “Je collectionne les affiches de films anciens et emblématiques, donc je la change chaque semaine.”

Le lieu sert aujourd’hui de repaire pour des clients importants qui veulent rester discrets, d’autres qui souhaitent vivre l’expérience unique de dîner dans la cuisine, ou même pour les rendez-vous de Jean Imbert et de ses équipes. Une manière de proposer une autre expérience, plus personnelle, chaleureuse mais un peu mystérieuse, dans son univers, et avec son lot de surprises — à l’image d’une reproduction miniature de la cuisine du restaurant sur laquelle il propose les amuse-bouches et les mignardises.

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Après une longue et complète visite des coulisses Plaza Athénée, on a l’impression d’avoir un peu mieux compris la force tranquille de l’établissement, qui vit 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, sans l’ombre d’un répit. La visite, aussi, est l’occasion de mieux comprendre la mécanique d’un tel paquebot et de ses mille et un corps de métiers qui s’entremêlent, se mélangent et s’entraident au jour le jour. Après deux heures à cavaler dans les couloirs du Plaza Athénée, Jean Imbert nous demande si l’on a tout ce qu’il nous faut. Non pas qu’il soit pressé, mais il doit filer. Après tout, il y a un service à mener et, pendant que l’on papote, les bons de commande, eux, continuent de s’empiler.

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