Cinéma : nos 10 plus grosses déceptions de l’année 2018

Cinéma : nos 10 plus grosses déceptions de l’année 2018

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Par Arthur Cios

Publié le

La rédaction revient sur l’année 2018 au cinéma. Avant les surprises et nos coups de cœur, place aux déceptions.

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Comment définir une déception ? Difficile à dire, tant ce sentiment part d’une promesse que l’on se fait. Chaque journaliste ayant ses goûts et ses domaines de prédilection, il croit voir en chaque film une apparence délicate, attirante, foireuse ou repoussante. Nous sommes faits de préjugés, et la salle de cinéma permet de les évacuer dès que les lumières se rallument.

Le jeu des prédictions, les premières critiques qui tombent ou un engouement populaire comme cela a été le cas cette année avec la surprise du Grand Bain de Gilles Lellouche, sont autant de critères qui peuvent influer sur n’importe quel critique de film et, plus largement, sur n’importe quel spectateur.

Comment s’en départir ? Est-ce que voir un film qu’on annonce de mauvaise facture va forcément, après la séance, nous faire relever sa note tant la déception était prévue avant même que la première scène ne soit projetée sur l’écran ? Il est évidemment impossible de déterminer de manière scientifique si un film est bon ou non.

On a quand même décidé de revenir sur ces films qui nous ont déçus. Peut-être parce qu’ils sont intrinsèquement faibles. Peut-être aussi parce qu’on y avait mis, justement, trop d’espoir. Les trois classements ci-dessous disent beaucoup, à la fois des divergences de cœur au sein de Konbini comme de la subjectivité qui est à l’œuvre dans les rangs de n’importe quelle rédaction traitant du septième art.

Lucille Bion

Secouée par l’explosion de Netflix et la montée des mouvements féministes, l’année 2018 restera particulièrement marquante et intéressante pour le milieu du cinéma, que l’on regarde d’un œil averti depuis le scandale Weinstein. Comme d’habitude, la société change et l’industrie s’adapte. Mes premières déceptions résident donc du côté des films girlpower dans lesquels j’avais placé beaucoup d’espoir.

D’abord, il y a Assassination Nation. Si, sur le fond, ce film 2.0 pose une question aussi cauchemardesque que moderne (et si toutes vos données personnelles, vos mails, vos textos et vos photos devenaient le nouveau sujet de conversation de la ville ?), il met en scène une bande d’ados minces, over stylées, superficielles et à la sexualité libérée, qui forcent d’une certaine manière les spectatrices à adopter le male gaze, ce prisme masculin. Une vitrine “pop” et “trash” pour des personnages clairement sexualisés.

Assassination Nation © Universal Pictures

Dans la famille des épisodes étirés de Black Mirror, Cam rejoint la liste des déceptions de l’année. La production Netflix et Blumhouse s’emparent pourtant d’un sujet peu traité en suivant les péripéties d’une cam girl piégée par le vaste univers du virtuel : ses shows érotiques vont être brutalement suspendus lorsqu’un double va s’emparer de son identité. Derrière sa photo kitsch et fascinante, le film lasse davantage qu’il n’aguiche.

Ocean 8, spin-off féminin des films de Steven Soderbergh, était sûrement le blockbuster le plus représentatif du ton que devait prendre l’année 2018, même si l’équipe jure que le projet était dans les cartons depuis des années et qu’il ne s’agissait que d’un heureux hasard du calendrier. Il en résulte un film de braquage sans panache malgré un casting cinq étoiles : Sandra Bullock, Mindy Kaling, Anne Hathaway, Sarah Paulson, Awkwafina, Cate Blanchett, Helena Bonham Carter et une Rihanna bien trop absente.

À l’inverse, Timothée Chalamet, dont on aura beaucoup, beaucoup entendu parler cette année, nous aura donné une bonne leçon : il ne suffit pas d’être élu – malgré soi – l’acteur le plus cool du moment pour sauver un film. En ce sens, Hot Summer Nights n’est clairement pas le teen movie attendu. Il sonne comme l’une des rares fausses notes de la jolie gamme proposée cette année par le producteur américain A24.

Et puisque l’on parle musique, revenons sur l’escroquerie qu’est Bohemian Rhapsody, pointée du doigt pour ses nombreuses déformations de la vie de Freddie Mercury. Le film aura au moins le mérite d’être sauvé par la prestation de Rami Malek, contrairement à Venom. Déçue par le coup de fouet trop mou des Frères Coen, l’irrégularité de Mowgli, ses animaux esthétiquement peu agréables et la prétention d’Annihilation, je ne m’attarderai pas non plus sur l’arnaque qu’est Au poste !.

  • Venom
  • Bohemian Rhapsody
  • La Ballade des frères Scruggs
  • Ocean’s 8
  • Assassination Nation
  • Cam
  • Annihilation
  • Hot Summer Nights
  • Au poste !
  • Mowgli

Arthur Cios

Cette année a été difficile pour le cinéphile que je suis. En plus d’être fan de films de super-héros et de grosses franchises en tout genre, je suis aussi friand de plaisirs coupables. Et même à cet égard, le cru 2018 a franchement été décevant.

Aquaman ? Écrit avec les pieds. Predator ? Une auto-caricature qui ne fonctionne pas. Jurassic World ? Totalement déséquilibré. Tomb Raider ? Vide. Venom, lui, a été charcuté au montage alors que la promesse était pourtant séduisante – amour éternel pour Tom Hardy. Et n’évoquons pas le Solo, bien trop lisse (et chiant), aka le premier vrai faux pas de Star Wars depuis le rachat par Mickey.

Venom © Sony Pictures

Mais le plus dur, ce sont ces films auxquels tu as envie de croire mais qui te donnent un goût amer. Mon plus gros guilty pleasure de ces dernières années, la saga American Nightmare, s’est tiré une balle dans le pied avec ce long-métrage aux idées pourtant intéressantes (comme toujours) mais au scénario tout pourri,  lot de pathos sans intérêt et direction d’acteurs aux oubliettes inclus.

Pareil pour Hérédité, film d’horreur encensé plus que jamais outre-Atlantique, qui tient la route jusqu’à ce que la conclusion, complètement caricaturale, arrive et gâche tout.

De manière bien différente, le retour des frères Coen sur Netflix a été d’un ennui certain, malgré un gros casting et des sections brillantes. Je m’attendais à un coup de fouet, j’ai fini avec un coup de barre. Sans parler du biopic sur Queen qui, en plus d’être un peu fade, est mal fichu, on ne peut plus classique et n’explore pas assez ce qu’il y a peut-être de plus intéressant chez Mercury, à savoir son passé, le rejet de ses origines, sa vie sentimentale, son homosexualité et même sa maladie, qui est ici expédiée.

Bref, tout n’était pas parfait en 2018. Vraiment pas.

  • Venom
  • Aquaman
  • Bohemian Rhapsody
  • The Predator
  • American Nightmare 4
  • La Ballade des frères Scruggs
  • Solo : A Star Wars Story
  • Jurassic World
  • Hérédité
  • Tomb Raider

Louis Lepron

2018 a été une année aussi particulière que standardisée. On a eu droit à un lot particulièrement fourni de longs-métrages avec acteurs en costumes moulants, notamment les machines Marvel (Avengers : Infinity War, Black Panther), la “proposition” vaseuse DC Comics (Aquaman) et la poursuite surprenante de la franchise Spider-Man chez Sony (Spider-Man : New Generation).

2018 aura aussi eu droit à son lot de suites en tout genre, de retours de grands cinéastes, de biopics et autres formules cinématographiques disposées à prendre la direction du Kodak Theatre de Los Angeles.

Commençons par le commencement : La Forme de l’eau. Annoncé comme le “meilleur film de l’année” si on prend les Oscars au premier degré, le nouveau film de Guillermo del Toro est aussi mou et fade que son titre peut l’indiquer. Situé dans les années 1950, le récit raconte une histoire d’amour belle mais vaine entre une modeste employée d’un labo gouvernemental et une créature, forcément toute gentille. Plus binaire, tu meurs, et la magnifique photographie du Danois Dan Laustsen n’arrive malheureusement pas à sauver une affaire qui prend l’eau. On en vient à regretter que Guillermo del Toro n’ait pas été récompensé lorsqu’il était au sommet de son art, avec Le Labyrinthe de Pan par exemple.

La Forme de l’eau © 20th Century Fox

Autre film classique, Bohemian Raphsody. Biopic du groupe Queen – et non du chanteur Freddie Mercury –, le long-métrage de Bryan Singer (qui n’a réalisé que 80 % du résultat, avant de se faire virer) ne dit absolument rien de la prodigieuse carrière de la formation londonienne : toutes les ficelles scénaristiques du bon gros biopic à l’américaine sont respectées, des origines du groupe à un concert Live Aid muséifié. Aucune saveur n’en ressort, exception faite de l’interprétation de Rami Malek, aussi fidèle (à l’image du film, qui ne s’offre aucune liberté cinématographique) que lisse. Et on ne parlera même pas des imprécisions, sinon des erreurs, historiques.

Est-il possible de passer à côté d’un succès populaire ? Vous avez trois heures. La jurisprudence Bienvenue chez les Ch’tis (tribunal d’instance de Dunkerque, 2008) offre une réponse évidente. Cette année, je suis passé à côté du Grand Bain. J’ai voulu, j’ai essayé, j’étais même persuadé d’y arriver, mais je n’ai pas réussi à plonger à cerveau perdu dans le premier long-métrage de Gilles Lellouche, lui qui tente pendant une longue première moitié de nous livrer les affres et autres méandres soi-disant prenants de ses personnages masculins en difficulté.

Si certains rôles marquent – merci Philippe Katerine – et que la mise en scène de Gilles Lellouche promet, l’ensemble ressemble pourtant à une comédie française convenue, ne réussissant jamais à surprendre. Poétique, la scène finale rééquilibre un film plein de bons (gros) sentiments, à l’image de A Star is Born, autre premier projet de cinéma d’un acteur, Bradley Cooper. S’essayant à la critique de l’industrie musicale, le désormais cinéaste balance une avalanche de violons, musiques sirupeuses et autres mouchoirs pour éponger les larmes et, surtout, un scénario lourd. De ce plongeon-là – et encore j’ai juste mis l’orteil –, je ne retiens que Lady Gaga, attendrissante.

La déception était aussi à l’heure pour le monstrueux Venom, le faiblard retour de Spike Lee (BlacKkKlansman – J’ai infiltré le Ku Klux Klan), la suite sans surprise des Indestructibles (on est loin, très loin du premier opus magique du génial – et je pèse mes mots – Brad Bird) ainsi que la critique sociale de Downsizing, qui retombe comme un soufflet.

Les mots me manquent pour Jurassic World, qui s’épuise dès le deuxième opus (son titre, Fallen Kingdom, exprime parfaitement ce qu’on peut ressentir lorsqu’on sort de la salle obscure), essayant vainement de se la jouer Steven Spielberg, à l’instar de Han Solo qui a marqué le premier raté de Disney après son OPA Star Wars.

  • Venom
  • BlacKkKlansman – J’ai infiltré le Ku Klux Klan
  • Les Indestructibles 2
  • Bohemian Raphsody
  • La Forme de l’eau
  • Downsizing
  • A Star is Born
  • Le Grand Bain
  • Jurassic World
  • Solo : A Star Wars Story