On a percé le secret du “gâteau de crêpes” qui affole la capitale

On a percé le secret du “gâteau de crêpes” qui affole la capitale

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Par Robin Panfili

Publié le

Aux pieds de Montmartre, à l’hôtel Rochechouart, voici comment un gâteau de crêpes est devenu incontournable.

Il est imposant, presque intimidant. Il est grand et est devenu, en quelques mois seulement, l’un des desserts sucrés les plus marquants de la capitale. Dans le restaurant de l’hôtel Rochechouart, aux pieds de Montmartre, le gâteau de crêpes s’est imposé comme un élément incontournable de la carte et l’un des plaisirs dont aucun habitué ne semble pouvoir se passer. Si l’on peut imaginer que son succès découle directement d’une idée ingénieuse du chef de cuisine, ce n’est pas vraiment le cas. Voici donc son histoire secrète, ou méconnue, racontée par Luigi di Giovanni, le chef des cuisines de l’hôtel, et Louis Solanet, fondateur de la chaîne hôtelière Orso.

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Konbini | Le gâteau de crêpes de l’hôtel Rochechouart est, honnêtement, l’un des desserts qui m’a le plus marqué l’année dernière, lorsque vous avez ouvert l’établissement. Qui est-ce qui prépare cette petite folie sucrée ?

Luigi di Giovanni | C’est moi, Luigi, 34 ans et napolitain d’origine. Je vis en France depuis douze ans et j’ai passé huit ans à l’Atelier Joël Robuchon. Pour cette recette précise, j’ai été formé par Monsieur Israël, le créateur originel du gâteau de crêpes.

Mais comment est née l’idée de le proposer dans le restaurant de l’hôtel ?

Louis Solanet | L’idée n’en est pas une, car elle tombait sous le sens mais se heurtait au sceau du secret… Dans les années 1970, Monsieur Freddy Israël, qui était un ami de la famille et qui fut étoilé à Paris avec la Petite Tour notamment, a inventé un gâteau de crêpes dans les cuisines du Château de Voisins. Enfant, Freddy amenait son gâteau lors de grandes tablées et de dîners en famille ou avec des amis. Les invités en étaient dingues, tout comme nous, enfants, qui attendions patiemment le lendemain matin pour pouvoir le déguster froid. C’est à la fois une “madeleine de Proust” et un élément iconique des nombreux repas conviviaux de notre enfance.

“Ça a tout l’air d’une crêpe mais le vrai secret c’est que ce n’en est pas vraiment une”

Tellement iconique que vous avez souhaité l’inclure à la carte du restaurant ?

Louis Solanet | Lorsqu’il a fallu élaborer la carte du Rochechouart, nous avons pensé à cette recette immédiatement. Freddy a bien voulu nous céder sa recette, jusqu’alors inconnue et c’est ainsi que nous avons présenté Luigi, notre chef, à Monsieur Israël. L’alchimie a tout de suite fonctionné entre les deux. Un vrai passage de témoin avec une belle émotion. Désormais, ils sont liés par le secret.

Avant de parvenir à une version parfaite, il vous a fallu de nombreux essais ?

Louis Solanet | Un gâteau représente une heure de travail intense pour Monsieur Israël, autant dire que je n’ai jamais tenté le coup à la maison. Un mauvais appareil et c’est reparti pour un tour. Luigi m’a probablement caché ses errements, mais je dois avouer qu’il s’en est très vite bien tiré !

Mais le principal challenge de recréer un souvenir d’enfance, c’est que le plat doit être reproduit à la perfection…

Louis Solanet | Chez nous, le gâteau est présenté entier et coupé à la part à table, ce qui est plus compliqué dans le restaurant. Il ne faut d’ailleurs pas sous-estimer l’importance de la crème anglaise, avec du lait entier. Mais, oui, lorsque vous avez une saveur d’enfance en tête, elle doit revenir avec une précision d’orfèvre pour faire revivre l’émotion originelle. Cela a donc été un sacré défi pour Luigi et ses équipes.

“Lorsque vous avez une saveur d’enfance en tête, elle doit revenir avec une précision d’orfèvre pour faire revivre l’émotion originelle”

Luigi di Giovanni | De mon côté, au début, j’étais très sceptique sur la recette. Puis, après la première dégustation, je suis resté sans voix, c’était un vrai moment d’émotion culinaire. Pour maîtriser la recette, il faut que la base soit parfaite. Chez nous il n’y a que trois personnes en cuisine capables de préparer le gâteau. Le montage est aussi une étape décisive. Il est déjà arrivé, par exemple, qu’un gâteau tombe au dernier moment. La cuisson est aussi délicate, il est déjà arrivé de brûler une crêpe. Enfin, il faut que la taille du gâteau soit parfaite afin d’être partagé en parts égales.

Est-ce que le dessert est devenu un dessert signature ou pas encore ?

Louis Solanet | Je pense que c’est le cas, mais il ne faut pas sous-estimer non plus le talent de l’équipe en cuisine pour en trouver d’autres. En revanche, je pense qu’il faudra que la clientèle internationale revienne en nombre pour que cela s’ancre définitivement dans l’esprit de tout le monde. En tout cas, c’est un élément de la carte qui n’est jamais discuté et qui revient dans toutes les bonnes occasions.

“Je dis souvent que le gâteau est beaucoup plus léger qu’il n’en a l’air au moment où il arrive”

Selon vous, qu’est-ce qui pourrait expliquer son succès ?

Luigi di Giovanni | Ce n’est ni un gâteau de pancakes, ni un amas de crêpes classiques. Nous n’en connaissons aucun équivalent. Disons que celui-ci a de la gueule, qu’il est bon, généreux et gourmand.

Louis Solanet | Je dis souvent que le gâteau est beaucoup plus léger qu’il n’en a l’air au moment où il arrive. Venez goûter et vous verrez…

Bon, puisque c’est la Chandeleur, on va finir par une question piège : c’est quoi, pour vous, le secret ultime d’une “bonne” crêpe ?

Louis Solanet | Beaucoup d’amour et l’œil pour savoir quand elle est prête (rires).

Hôtel Rochechouart
55 boulevard Marguerite de Rochechouart (9e)
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