Portraits de candidates : Laurianne Deniaud, 35 ans, PS : “L’engagement, c’est noble, c’est important de le dire”

Portraits de candidates : Laurianne Deniaud, 35 ans, PS : “L’engagement, c’est noble, c’est important de le dire”

Adjointe au maire de Saint-Nazaire, cette militante socialiste est candidate dans la 8e circonscription de Loire-Atlantique. Portrait d’une femme engagée à gauche, qui n’hésite pas à tacler La République en marche.

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Sous la plage, l’engagement !

À 17 ans, Laurianne Deniaud passe son Bafa (Brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur). Un an plus tard, elle se retrouve à Piriac-sur-Mer (Loire-Atlantique) en colonies de vacances. L’animatrice gère un groupe de préados de 12-15 ans, originaires de milieu sociaux très différents. Elle se souvient avoir été “frappée”par ces jeunes qui “ne se comprenaient pas, parce qu’ils n’avaient pas le même langage”. Finalement, dit-elle, “c’était des mondes qui se côtoyaient sans se parler au quotidien”.
C’est à ce moment précis que ce qui n’était pour elle qu’un job d’été devient le moteur de son engagement. Laurianne Deniaud raconte avoir été “très marquée par ces questions des inégalités sociales et culturelles”. Même si ses parents, puéricultrice et conducteur de travaux, n’étaient pas particulièrement engagés, elle a grandi dans une ville, Saint-Nazaire, où “le débat politique et les initiatives populaires bouillonnent”. Très vite, elle s’engage, en parallèle de ses études de droits et sciences politiques, dans une association d’éducation populaire, la fédération Léo-Lagrange, avant de partir à Paris faire un master en aménagement du territoire et développement local.
Elle participe notamment à un programme appelé “Démocratie et courage” qui propose des interventions dans les collèges et lycées pour lutter contre les discriminations et le sexisme.“Je me suis rendu compte que pour pouvoir changer les choses en profondeur et combattre les inégalités sociales ou de genre, mon engagement ne pouvait se limiter à une seule chose, il fallait avoir un regard global sur la société”, confie-t-elle.
Laurianne Deniaud explique avoir été forgée par l’éducation populaire. “J’ai grandi au contact des autres, dans le collectif”, raconte la candidate socialiste, qui définit l’éducation populaire comme étant “la capacité à apprendre de ses pairs, à grandir et à s’émanciper ensemble”. Poursuivant sa réflexion, elle évoque aussi le fait de savoir “s’extraire de sa condition sociale ou de ce que nos parents nous ont légué”.

La rose à la main

C’est également à l’âge de 17 ans que Laurianne Deniaud s’engage au Parti socialiste. Nous sommes en 2002, elle vient d’organiser des mobilisations de jeunes contre Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle. La même année, elle devient animatrice fédérale au Mouvement des jeunes socialistes (MJS) de Loire-Atlantique, avant d’être élue présidente du MJS en 2009, soutenue par le courant de Benoît Hamon. Chez les socialistes, elle travaille avec Martine Aubry, alors première secrétaire du parti. Elle confie avoir été “très proche”, de la maire de Lille, pour qui elle a voté lors de la primaire de 2011. Malgré la défaite de sa candidate, elle soutient François Hollande en 2012 et rejoint son équipe de campagne.
À la dernière primaire de la gauche, Laurianne Deniaud a voté pour Benoît Hamon. “Je ne suis pas une femme de courants, d’appareils, affirme-t-elle, j’ai fait des choix en toute sincérité et en toute conviction, mais j’ai toujours refusé de m’enfermer.”

“Je suis socialiste, humaniste, écologiste et féministe”

Parmi les mesures phares qu’elle souhaite défendre en tant que députée socialiste, on trouve en première ligne, la moralisation de la vie politique. Si elle dit “soutenir la proposition de loi de M. Bayrou”, la candidate propose “d’aller encore plus loin en publiant le financement des campagnes électorales” : “En matière de moralisation, il y a les discours, et il y a les actes”, assène Laurianne Deniaud, qui n’a pas attendu que la loi passe pour publier sa déclaration de patrimoine sur son site.
Mais s’il y a un sujet qui lui tient particulièrement à cœur à cette jeune femme politique, ce sont les inégalités entre les femmes et les hommes. “Je suis socialiste, humaniste, écologiste et féministe”, affirme-t-elle. La candidate espère pouvoir présenter un projet de loi sur lequel elle a beaucoup travaillé : pouvoir rendre opposable le droit à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. ”C’est-à-dire que si dans une entreprise, une femme considère qu’elle est moins bien rémunérée qu’un homme pour des compétences équivalentes, elle pourra faire constater ça par un inspecteur du travail qui aura le droit de rendre opposable un rattrapage de salaire”, explique la candidate.
Laurianne Deniaud en profite d’ailleurs, pour s’adresser aux jeunes, et plus particulièrement aux femmes qui hésiteraient à se lancer. “Je voudrais leur dire de prendre toute leur place, de ne pas baisser la tête, de ne pas se sentir moins légitime qu’un homme, parce qu’elles le sont tout autant, mais aussi de tenir bon, de ne jamais rien laisser passer, ni des propos sexistes, ni des regards déplacés ou désobligeants.” Pour elle, l’important c’est aussi d’être“solidaires les unes avec les autres”.

“Ce qui est en train de passer est assez dangereux pour la démocratie française”

Quant à la situation politique actuelle, Laurianne Deniaud déplore “un débat politique de faible niveau” pendant cette campagne législative, tout comme durant la présidentielle.“Ce qui est en train de se passer est assez dangereux pour la démocratie française”, assure-t-elle. Vu le succès rencontré par le discours transpartisan porté par Emmanuel Macron, la candidate redoute la disparition de la gauche à l’Assemblée nationale. “Ça m’inquiète”, confie-t-elle, avant de préciser : “Je crois qu’il y a toujours une différence entre la gauche et la droite et qu’il en sera ainsi tant qu’il subsistera des inégalités sociales dans notre pays.”
Alors que beaucoup de socialistes ont déserté pour marcher avec Emmanuel Macron, Laurianne Deniaud reste fidèle au PS et n’hésite pas à tacler La République en marche, notamment l’idée que la société civile serait plus à même de représenter les Français.

“Il y a quelque chose qui me chagrine vraiment chez les candidats d’En marche !, explique-t-elle, c’est la prime au désengagement. On serait plus légitime à représenter les citoyens parce qu’on n’aurait jamais donné de temps pour les autres. Je réfute ça, je crois que l’engagement, ça veut dire quelque chose dans notre société. Je suis fière d’avoir eu un engagement collectif contre le Front national le 21 avril 2002, fière pour les gamins des colonies de vacances, fière de la mobilisation pour le mariage pour tous. L’engagement, c’est noble, et c’est important de le dire.”

Laurianne Deniaud se demande ce que faisaient les candidats d’En marche ! en 2002, alors que d’autres partis, comme le sien, se mobilisaient dans la rue.“Où étaient tous ces gens ? On n’en sait rien. Moi, celle qui est candidate chez moi, je ne sais pas où elle était, je ne sais pas si elle descendue dans la rue une fois dans sa vie, c’est fou quand même”, finit-elle par lâcher. Du haut de ses 35 ans, Laurianne Deniaud pose là une question fondamentale qui semble être passée à la trappe dans le débat public : faudrait-il n’avoir pensé qu’à soi, à son entreprise, à son ascension, pour représenter les citoyens ? On vous laisse juger.