Pourquoi les concerts de rap en français sont complets aussi vite

Pourquoi les concerts de rap en français sont complets aussi vite

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Par Aurélien Chapuis

Publié le

Hamza, Gazo, Kerchak, Lesram, le rap français de tous les genres remplit les salles des mois, voire des années avant la date. Comment expliquer cette nouvelle économie du concert ?

Chaque semaine, Aurélien Chapuis, alias Le Captain Nemo, revient sur l’actualité du rap avec ses coups de cœur, ses découvertes et les enjeux du moment.

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Ce mois de décembre est une véritable célébration sur scène du rap francophone : Gazo a explosé un zénith et annoncé directement un Accor Arena dans un an déjà quasiment plein, Orelsan remplit trois Défense Arena à la suite et enfin Damso termine en ce moment même avec quatre Accor Arena à la suite. Tout est archi-plein depuis des semaines.

Kerchak a, lui, fait son premier concert à guichets fermés aux Étoiles, annonçant directement une Cigale dans la foulée, pleine quelques jours plus tard. Pareil pour Lesram qui surprend tout le monde avec une vidéo Grünt, véritable démonstration technique qui termine sur une annonce de Cigale lui aussi. Pleine dans la journée.

Ces deux concerts sont dans quelques semaines donc on comprend l’engouement et la réactivité, mais autre cas d’école, Hamza a annoncé son premier Accor Arena de sa carrière le 22 novembre 2023, dans presque un an. C’est plein, ça y est. Sûrement un peu grâce à “Fade Up”, gros succès de l’année 2022 pourtant sans clip officiel et son featuring avec Tiakola, “Atasanté”, pareil sans clip officiel mais six millions de vues cumulées sur YouTube.

Ça veut dire deux choses : le public achète plus de places de concerts que de disques. Il est prêt à prendre une place pour un concert sans savoir ce qu’il va faire un an plus tard ni si l’artiste lui plaira toujours, ou si l’album (prévu au premier trimestre 2023 pour Hamza) sera une réussite. Alors que, justement, les ascensions d’artistes sont de plus en plus rapides et extrêmes, c’est un véritable grand écart de voir l’intérêt du public, des communautés pour voir leurs artistes préférés en live.

Cela s’explique aussi par les tournées en France de plus en plus réduites et les artistes qui basent tout sur des gros concerts dans des grandes salles à Paris, afin d’amortir et de marquer un grand coup. C’est Zénith, Accor Arena, Défense Arena ou festivals, c’est tout. Les économies d’échelle deviennent de plus en plus importantes et marquent un renouveau des prestations live dans le rap en français. 

Le 5 majeur de la semaine

Kekra – Iverson

Kekra est de retour et encore une fois, il surprend avec un titre très rappé, très technique, très actuel. Le clip est aussi une réussite visuelle signé Edith, un parachutage sur une planète déserte. Indépendant et plutôt solitaire du rap, l’impact de Kekra est vraiment énorme, tant dans la ligne de conduite, la force de proposition et la constance artistique. Album Stratos annoncé le 27 janvier, on sera bien sûr au rendez-vous.

Lil Durk – Hanging With Wolves

On me demande souvent pourquoi j’aime tant Lil Durk car globalement, ses morceaux peuvent paraître redondants et peu accrocheurs. Mais perso, je crois qu’à chaque fois que sa voix part, ça me fait un truc, son interprétation, ses textes, sa vision me parlent énormément. Pour moi, c’est le seul qui continue à être aussi pertinent dix ans après ses débuts fulgurants. C’est lui le vrai OG. Son dernier clip est parfait pour ça, mais aussi son couplet dévastateur sur l’album de Babyface Ray, un autre rappeur au kilomètre que je suis capable d’écouter toute la journée. Longue vie à Lil Durk.

Loveni & Jeune LC – Vice et vertu (part II)

Je suis toujours friand de la musique de Loveni, encore plus quand Jeune LC est dans le secteur. Ce nouveau titre est court, mais c’est encore meilleur. Tout est dans l’évocation. Ça me va.

My Favorite Color feat. Valee – Man Man

Le flow nonchalant et équilibriste de My Favorite Color (meilleur nom) se marie parfaitement avec celui du Goofy du rap actuel, Valee. En plus, il y a un clip animé, mes préférés. Vraiment très agréable.

Metro Boomin feat. A$AP Rocky & Takeoff – Feel the Fiyaaah

L’album de Metro Boomin continue de tourner, c’est du très très bon du début à la fin et on a l’impression d’être presque en famille vu les invités récurrents. Gros tracks, de 21 Savage avec Young Nudy notamment, mais ça fait toujours quelque chose quand j’entends Takeoff. Le titre avec Rocky est réussi avec son super sample de soul. Rocky qui a d’ailleurs aussi sorti un des visuels de l’année avec son dernier titre “Shittin’Me”, du bel ouvrage.

Ligne nostalgique

Encore un héros qui nous quitte avec Grand Daddy I.U. à seulement 54 ans. Véritable pionnier avec l’équipe Cold Chillin, notamment auteur et producteur pour Biz Markie et Roxanne Shanté à la fin des années 1980.

Son premier album Smooth Assassin est un véritable classique du genre avec des samples en avance sur leur temps et un flow vraiment agréable et touche-à-tout, à ranger à côté de celui de Big Daddy Kane. Grand Daddy I.U. est un peu passé à la trappe parmi les vrais précurseurs car il était entouré de grandes légendes comme Kool G Rap, Rakim, Big Daddy Kane… Une période de grandes légendes qui a un peu mis de côté Grand Daddy I.U. Après un deuxième album en 1994 et des featurings avec Big L ou Positive K, il disparaît un peu des radars, tout en continuant de produire pour Das EFX, KRS One, Ice T ou Heltah Skeltah. Mais son premier album reste vraiment un classique du genre à réécouter sans fin.

Repose en paix Grand Daddy I.U.