Portrait : Margaret Qualley, étoile montante

Portrait : Margaret Qualley, étoile montante

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Par Manon Marcillat

Publié le

L’actrice est actuellement à l’affiche de Stars at Noon de Claire Denis, qui a reçu le Grand Prix lors du Festival de Cannes 2022.

Ce sont l’amour et le hasard qui ont permis à Margaret Qualley de décrocher son premier rôle au cinéma lorsque à l’âge de 18 ans, elle rend visite à Nate Wolff, son petit ami de l’époque, sur le tournage de Palo Alto et se voit offrir une scène de dernière minute avec James Franco dans le film de Gia Coppola sorti en 2013.

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“Quand j’ai eu ce petit rôle dans le film de Gia, je voulais déjà vraiment être une actrice. C’est justement ce même petit ami qui m’a amenée à un cours d’improvisation à New York alors que j’étais encore danseuse et j’ai adoré. Je pense que Gia a senti ce désir.”

Un premier pas en toute détente dans l’industrie du cinéma, à l’image de l’actrice qui sait naviguer avec un flegme et un naturel presque déconcertants dans une diversité de rôles déjà impressionnante, d’une hippie de la secte Manson chez Tarantino, à une apprentie none, une mère en détresse fuyant une relation violente ou plus récemment, une maîtresse dominatrice.

Pourtant, Margaret Qualley se destinait à une carrière de danseuse classique, où la décontraction n’a aucunement sa place, pour laquelle elle quittera le nid familial en Caroline du Nord à l’âge de 16 ans, direction New York et ses cours de ballet. Elle décidera finalement d’abandonner l’ingrate discipline de la danse classique, puis le mannequinat quelques années plus tard, que l’on se figure être des activités certainement trop silencieuses pour elle.

“C’est une bonne remarque. J’adore parler mais je l’ai réalisé très tard. Adolescente, je me donnais un genre, celui de la fille mystérieuse et timide alors que je suis venue au monde très bruyante et que j’étais une enfant maladroite et bavarde. Donc oui, pour répondre à la question, je pense que ça ne correspondait pas exactement à qui j’étais alors que parler est ce que je préfère dans mon métier.”

Si elle décroche son premier rôle important en la personne de Jill Garvey dans la série The Leftovers, c’est bel et bien la danse qui révélera son énergie débordante à l’écran, dans la publicité Kenzo réalisée par Spike Jonze en 2016, très remarquée et très réussie. L’aspirante actrice n’avait pas dansé depuis cinq ans et à rebours de toute logique d’une industrie qui choisit ses actrices égéries sur leur notoriété préexistante, sa révélation a eu lieu grâce à une publicité pour un parfum mais où elle a prouvé qu’elle savait tout faire et tout exprimer, avec ses yeux, son visage et son corps.

“Je n’avais pas dansé depuis cinq ans parce que j’avais décidé d’arrêter la danse et que je suis très noir ou blanc sur ce que j’aime. Mais ça m’a rappelé ce que j’aimais dans la danse, qui n’était certainement pas la discipline mais la liberté d’expression. Je me suis remise à danser, pour moi, grâce à cette publicité. J’ai senti que je révélais beaucoup de moi dans cette vidéo donc j’étais très nerveuse quand elle est sortie car j’avais un peu l’impression d’être une sorte de freak.”

La danse continue toujours de lui offrir de belles opportunités à l’écran puisque après avoir décroché une nomination aux Emmy Awards pour son interprétation d’une de ses héroïnes d’enfance, la danseuse de comédies musicales Ann Reinking dans la série Fosse/Verdon, elle sera bientôt une autre star de musical, Ginger Rogers, dans le biopic Fred & Ginger face à Jamie Bell dans le rôle de Fred Astaire.

“En un sens, j’ai l’impression que j’ai accompli plus en tant que danseuse/actrice que je n’aurais accompli en tant que simplement danseuse. J’étais bonne mais pas suffisamment bonne pour faire ce que j’ai fait dans le jeu. Donc c’est un peu comme si la danse avait été une sorte de route un peu bizarre et sinueuse pour atteindre mon rêve initial.”

Aujourd’hui âgée de 29 ans et maintenant qu’elle est parvenue là où elle voulait être, Margaret Qualley fait de la place pour ses parents — l’actrice Andie MacDowell et l’ancien mannequin Paul Qualley — à ses côtés dans sa vie professionnelle. 2021 sera d’ailleurs “l’année de ses parents“, selon ses mots.

Elle a ainsi passé neuf mois au Canada sur le tournage de la série Maid pour Netflix aux côtés de sa propre mère, dans le rôle de la mère d’Alex, son personnage, elle-même maman d’une petite fille, avant de s’envoler au Panama pour le tournage de Stars at Noon de Claire Denis où elle a retrouvé son père, qu’elle n’avait pas vu depuis trois ans en raison du Covid-19.

Dans le film, elle incarne une journaliste américaine bloquée sans passeport dans le Nicaragua d’aujourd’hui en pleine période électorale et qui va vivre une dangereuse liaison avec un mystérieux Anglais interprété par Joe Alwyn. Le Nicaragua étant devenu inaccessible à cause des élections de novembre 2021 qui ont déstabilisé le pays, la réalisatrice a délocalisé son tournage au Panama, le pays où le père de Qualley a déménagé lorsqu’elle avait 14 ans et où l’actrice a retrouvé certains de ses repères d’adolescence.

L’hôtel où le personnage de Daniel élit domicile est celui où elle a séjourné la première fois qu’elle s’est rendue dans le pays et elle a aussi retrouvé le casino et le restaurant qu’elle fréquentait avec son père. À la fin du tournage, l’actrice est rentrée à la maison avec lui dans ses bagages, “le meilleur scénario possible”.

“Plus jeune, j’aurais détesté avoir de la visite sur un tournage. Mais je ne vis plus avec mes parents depuis que j’ai 14 ans car j’étais en internat puis j’ai déménagé à New York seule. Aujourd’hui, je suis prête à traîner à nouveau avec eux.”

On attend désormais Margaret Qualley dans sa toute première comédie, Drive-Away Dolls, un “road trip lesbien burlesque” réalisé en solo par Ethan Cohen, pour la première fois sans son frère Joel. Une comédie qui s’est fait désirer pour cette immense admiratrice d’Adam Sandler, “le meilleur des meilleurs”, dont elle aime tous les films, Big Daddy, Waterboy et Happy Gilmore, “ces comédies à l’ancienne avec lesquelles [elle a] grandi et qui ont touché [son] cœur”, en tête. Il est certain que l’enfant “bruyante, bavarde et maladroite” qu’elle était n’a pas totalement disparu.