C’est quoi la “ienclification” des sneakers ?

C’est quoi la “ienclification” des sneakers ?

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Par Yasmine Mady

Publié le , modifié le

Cette dernière décennie, le "sneaker game" a changé de visage, au grand bonheur et malheur de certains.

De nos jours, si on veut la dernière paire de Jordan 1, de Nike Dunk ou de Yeezy, il ne suffit plus simplement d’aller dans le magasin du coin pour se les procurer ou de faire la queue quelques heures devant une boutique pour les paires un peu plus rares, comme au bon vieux temps.

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Aujourd’hui, pour avoir certaines paires “cotées” (ou surcotées), il faut participer à une “raffle”, un tirage au sort qui ne te fera pas gagner les chaussures mais seulement le droit de les acheter.

Mais comment on en est arrivés là ? Une question plus que clivante.

La faute de qui ?

Certains parlent de “ienclification” du marché, qu’on pourrait traduire par une gentrification. Un processus d’embourgeoisement qui fait qu’une nouvelle cible serait venue dérégler le marché, le rendant inaccessible ou presque à la cible initiale.

Il y a une petite dizaine d’années, certaines paires comme la fameuse Nike Air Max Plus aka les “Requins” (qui ont toujours eu un grand succès dans les banlieues françaises) étaient considérées comme des chaussures de “racailles” par certaines sphères. Aujourd’hui on peut la voir aux pieds des ados de Neuilly.

La Nike “Dunk” était loin d’être aussi populaire qu’aujourd’hui. Au début des années 2010, elle était un peu considérée comme une wannabe Jordan 1, en moins chère et, surtout, moins cool. On pouvait la retrouver facilement en magasin ou en outlet pour une cinquantaine d’euros. La paire a même connu un déclin car elle ne fonctionnait plus. Aujourd’hui, c’est 120 euros si vous êtes assez vifs ou si vous avez eu de la chance lors d’une raffle. On est bien loin des années 1970 ou la culture des sneakers était encore underground et greffée à la culture hip-hop.

À tort ou à raison, en France, des internautes ont même pointé du doigt le média Camino qui s’est spécialisé dans le lifestyle et l’actualité des sneakers.

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Et les marques et les resellers dans tout ça ?

Pour beaucoup, les changements dans le marché des chaussures sont surtout le jeu des marques. En gros : les affaires sont les affaires.

Les sneakers représentent aujourd’hui 50 % des chaussures vendues dans le monde, hors chaussures de sport, tongs et chaussons. Elles représentaient 32 % il y a cinq ans.

Pour d’autres, c’est de la faute des revendeurs : ceux qui achètent les chaussures en gros pour les revendre (beaucoup, beaucoup) plus cher. Selon les analystes de la société financière Cowen, le marché mondial de la revente pourrait peser 30 milliards de dollars d’ici 2030.

Pour d’autres encore, ce serait même de la faute de Kanye West qui, en 2009, a révolutionné le sneaker game avec le lancement de la Yeezy 1 en collaboration avec Nike. C’est l’une des premières paires qui a participé à la raréfaction du marché des sneakers. C’est d’ailleurs la toute première fois que Nike baptise une chaussure au nom d’une célébrité (hors athlètes). En 2021, plus de 10 ans après sa sortie, une paire de Yeezy 1 portée par Kanye West a battu un record après avoir été vendue 1,8 million de dollars lors d’une enchère. Du très bon cru, visiblement.

Une chose est certaine, le marché des sneakers a été bouleversé cette dernière décennie. Beaucoup de clivages sur le sujet, beaucoup de ras-le-bol et surtout — visiblement — beaucoup d’oseille brassée au grand malheur de ceux qui veulent juste avoir des chaussures cool à un prix décent. Comme au bon vieux temps.