Bac de français : on te sauve si t’as pas lu Le Malade imaginaire de Molière

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Bac de français : on te sauve si t’as pas lu Le Malade imaginaire de Molière

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Par Michel Sarnikov

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Un résumé et surtout des clés pour mieux comprendre l’œuvre de Molière.

Tu as “oublié” de lire Le Malade imaginaire, et le bac de français, c’est demain ? Pas de panique, on te résume le livre, et au passage, on te donne quelques pistes de lecture qui feront, à n’en point douter, leur petit effet auprès des interrogateurs.

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Alors…

Au fond, en matière de blagues, on a très peu évolué depuis qu’un de nos ancêtres préhistoriques a ri pour la première fois d’une grimace qu’on lui faisait, d’une chute ou d’un prout. Bien sûr, la technologie a évolué, comme le langage, les mœurs ou les cultures, mais les procédés comiques restent les mêmes. Que vous viviez dans l’Antiquité, au Moyen Âge ou aujourd’hui, vous riez sensiblement des mêmes choses.

Prenez Friends par exemple : des personnages caricaturaux mais attachants qui discutent dans un même décor, et leurs aventures se terminent toujours bien. C’est le principe même de la comédie classique et, que vous le vouliez ou non, vous riez exactement comme un bourgeois du XVIIe siècle qui vient voir une pièce de Molière. C’est comme ça, c’est un fait.

Là, vous vous dites peut-être que j’essaie de faire passer la pilule en comparant l’œuvre que vous avez au bac avec une sitcom bien-aimée mais je vous assure : Joey le benêt gourmand, Monica la maniaque autoritaire, Ross l’intellectuel cynique ressemblent fondamentalement à L’Avare, au Tartuffe ou, en 1673, au Malade imaginaire de Molière.

Ça parle de…

Argan, un bourgeois extrêmement riche. Et Argan, son gros souci, c’est qu’il est hypocondriaque – c’est-à-dire qu’il a en permanence l’impression être malade. C’est un peu comme quand tu as vaguement mal à la tête et qu’au lieu de boire un grand verre d’eau avec un Doliprane, tu vas sur Doctissimo et tu repars avec une tumeur au cerveau.

Argan, il a une fille qui s’appelle Angélique, et Angélique est amoureuse de Cléante. Sauf que coucou, on vit dans une société patriarcale et on ne se marie pas sans l’aval de son papa, et Argan, lui, n’a pas du tout prévu de marier sa fille à Cléante. Non, il l’a promise à un médecin, un choix tout à fait intéressé, puisque ça lui permettrait de faire suivre son état de santé en permanence, et pour pas cher.

C’est là que Béline entre en scène : Béline, c’est la belle-mère d’Angélique. La deuxième femme d’Argan, donc – enfin, je ne vais pas t’expliquer ce qu’est une belle-mère, tu le sais déjà : on a tous vu ton historique Pornhub. Béline demande à ce que sa belle-fille soit envoyée au couvent. Parce qu’elle a un plan : évincer toute la famille pour récupérer l’héritage de daddy Argan.

Mais la servante de la famille, Toinette, ne voit pas les choses de cet œil et veut tout faire pour que, un : Angélique se marie à son lover boy Cléante et que, deux : stepmom Béline ne parvienne pas à ses machiavéliques fins. Et c’est sur ce suspense absolument insoutenable que se termine le premier acte.

Avec l’aide de Toinette, stratège hors pair, Cléante se fait passer pour un professeur de musique et s’infiltre dans la maison d’Argan. Il retrouve Angélique pour lui faire réviser son solfège, si tu vois ce que je veux dire.

Tandis qu’il conte fleurette à sa bien-aimée, en soum-soum, Béline arrive. Elle balance à Argan qu’elle a vu Angélique avec un homme, parce que Béline, c’est une fieffée peau de vache et qu’elle a tout intérêt de foutre le bordel – rappelons-le, elle, ce qui l’intéresse, c’est les lovés d’Argan.

Angélique est forcée d’admettre qu’elle n’a pas envie de se marier avec le médecin. C’est la tuile pour le daron, qui voit ses consultations tarif réduit s’envoler.

Coup dur pour toute la famille, les enjeux sont élevés, la vérité et l’amour triompheront-ils ? Oui, parce que c’est une comédie et que les comédies se terminent toujours bien. Le prochain acte sera-t-il le dernier ? Oui aussi, parce que c’est une comédie et que les comédies se déroulent en trois actes. Suis-je en train d’essayer de gagner du temps en répondant à mes propres questions ?

Non, dans le troisième et dernier acte, le frère d’Argan dit les termes et soutient que les médecins sont tous des charlatans. Le coup de gueule, quoi, auquel Argan oppose sa confiance en la médecine et en ses praticiens. Bref, un débat qui se termine comme n’importe quel débat de TPMP : on a beaucoup crié, pas appris grand-chose, on se sent frustré, fatigué, éreinté, bizarrement souillé mais… non, c’est tout, en fait.

L’infatigable mastermind des intrigues, Toinette la soubrette, a un plan : dire à tout le monde qu’Argan est mort pour qu’il puisse voir la réaction de ses proches. Et lorsqu’ils mettent en scène le décès du patriarche, tout se passe comme prévu : Angélique se met à pleurer et Béline, elle, la vilaine pas belle, se réjouit comme le Marais pendant la finale de RuPaul’s Drag Race.

Au plus haut de sa colère, Argan se réveille, renie Béline une bonne fois pour toutes, et accède aux désirs de sa fille, rassurée de voir son père en vie. À ce moment-là, Cléante arrive, demande la main d’Angélique mais elle refuse, la coquine, sous prétexte qu’elle respecte trop son père. Tout ça pour ça.

Argan, attendri par la loyauté de sa fille, accepte le mariage à condition que Cléante devienne médecin. Et là, ultime éclair de génie de Toinette, elle dit à son maître : “Toi, deviens médecin, en fait”. Et Argan devient médecin, les deux amoureux se marient, tout le monde danse et chante, rideau, c’est la fin de la pièce, tout le monde est content.

Et c’est intéressant parce que…

Ce n’est pas une comédie comme les autres.
La particularité de cette pièce, c’est que ce n’est pas qu’une comédie : c’est une comédie-ballet. Ça veut dire que tout le monde y chante et y danse. C’était un type de spectacle que Louis XIV, pour qui écrivait Molière, appréciait particulièrement.

C’est une satire contre les médecins.
Quand on sait que le roi avait lui-même des tendances hypocondriaques et qu’il était entouré d’une ribambelle de médecins, ça rend le sujet de la pièce encore plus fou. Cela dit, la méfiance à l’égard des médecins, c’est un vieux motif au théâtre. Bien avant Molière, on le retrouvait déjà dans de vieilles pièces de la commedia dell’arte. C’est le théâtre traditionnel italien dont s’inspire Molière pour écrire ses pièces.

Mais attention, c’est bien des médecins que Molière se méfie, et non de la médecine : on le constate dans la scène où Toinette utilise son costume de médecin pour ridiculiser la profession. Le problème pour Molière, c’est que le jargon et le vêtement font l’autorité du médecin, et non le savoir.