13 Reasons Why, un teen drama aussi sombre qu’engagé

13 Reasons Why, un teen drama aussi sombre qu’engagé

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Par Florian Ques

Publié le

Ce qui démarre comme une série pour ados lambda se transforme petit à petit en une lettre ouverte à la génération Y. Attention, spoilers.

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Hannah Baker a mis fin à ses jours. Plutôt qu’écrire une lettre de suicide “classique”, cette lycéenne torturée raconte les raisons de son suicide à travers treize cassettes audio. Chacune d’elles met en évidence le rôle d’un membre de son entourage dans son destin funeste. Une fois les cassettes réunies dans une boîte, le principe du jeu (macabre) est simple : la première personne accusée devra les écouter dans leur intégralité et les faire passer à la personne suivante.

Tout commence lorsque Clay Jensen, ado passe-partout et réservé, reçoit ce fameux colis. Dès lors, son quotidien paisible va prendre des airs de quête obsessionnelle pour découvrir ce qui a poussé Hannah, son amie (ou plus ?), à commettre l’irréparable. Adaptation libre du roman éponyme de Jay Asher paru en 2007, 13 Reasons Why est la dernière production en date estampillée Netflix. C’est également une histoire tragique, et tristement pertinente.

À première vue, Liberty High School ne déroge pas à la règle des lycées américains du petit écran. Ses élèves sont beaux et n’ont pas de soucis d’acné. Des athlètes écervelés au bad boy affublé de son blouson en cuir, les archétypes de la série pour ados se sont bel et bien donné rendez-vous pour 13 Reasons Why. La comparaison avec tout autre teen drama classique à la 90210 s’arrête là. En une poignée d’épisodes, la série offre au genre un lifting inattendu mais bienvenu.

Profondément ancré dans notre XXIe siècle, le show dépeint une génération rongée par la démocratisation des technologies modernes. À travers le harcèlement en ligne et le revenge porn, notre société s’est dénichée de nouveaux moyens pour montrer sa pire facette. Le récit d’Hannah Baker ne fait que les mettre en relief, avec une justesse et une authenticité inouïes. À son essence, 13 Reasons Why est une œuvre subtilement féministe qui dénonce une certaine culture du viol où la notion de consentement paraît à la limite de l’obsolescence.

La narration de la série témoigne d’une certaine dualité : on avance dans l’histoire grâce à la voix d’une défunte, Hannah Baker, et on découvre son univers à travers les yeux de Clay Jensen. Le montage est indubitablement réfléchi et ingénieux, puisque la frontière entre les périodes “pré” et “post” Hannah s’embuent et s’entrelacent. Un parti pris symbolique du deuil que le héros de 13 Reasons Why s’efforce de faire, aidé par l’écoute de ces cassettes audio.

Forcément, le suicide d’Hannah pèse sur le storytelling entier de l’histoire, mais cela n’empêche clairement pas la série de s’autoriser des temps de battement. Les confidences, les sourires, les fous rires… ces courts instants qui font de l’adolescence une période si marquante. Cette façade faussement feel good contribue à rendre les protagonistes de la série touchants en dépit de leurs imperfections. Plus encore, par le biais de ces moments poignants, la lycéenne regrettée gagne en épaisseur au fil des épisodes et devient irrémédiablement attachante.

Vient alors la question de la fidélité de l’œuvre. La version sérielle de 13 Reasons Why est-elle, au bout du compte, une adaptation scrupuleuse ? La réponse est non, et c’est tant mieux. Le bouquin originel présentait une intrigue condensée sur une seule journée et une fin satisfaisante, bien qu’incomplète. À l’opposé de ça, la série prend le temps de nous faire découvrir l’ensemble des personnages gravitant autour de la défunte. Là où la Hannah du format papier nous présentait ses camarades de façon unidimensionnelle, le show y préfère des portraits plus nuancés.

Le personnage de Clay est, par ailleurs, un brin différent. Assurément plus dark, le Clay de Netflix fait des erreurs, les collectionne et va même jusqu’à pouvoir être qualifié de malsain. Les parents d’Hannah nous sont également introduits et nous permettent d’assister aux conséquences d’un suicide pour l’entourage proche. Kate Walsh (Private Practice) délivre alors une performance surprenante sous les traits d’une maman aussi bouleversée que bouleversante.

Somme toute, 13 Reasons Why est une œuvre nécessaire, dans le sens où elle traite de thématiques sensibles qui méritent l’attention d’un public jeune. Le tandem principal, Katherine Langford et Dylan Minnette (Scandal), est suffisamment convaincant pour qu’on rentre avec facilité dans une histoire qui, elle, est bien loin d’être facile à digérer. À l’extrême opposé des productions édulcorées à la Riverdale, le nouveau bébé de Netflix est un must-see pour la génération Y, faisant passer l’âge ingrat à un tout autre niveau.

13 Reasons Why est disponible en intégralité sur Netflix dès ce vendredi 31 mars.