Qui est Veronica Ryan, la sculptrice qui a remporté le prestigieux prix Turner ?

Qui est Veronica Ryan, la sculptrice qui a remporté le prestigieux prix Turner ?

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© Max McClure/Courtesy of Spike Island

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Par Konbini avec AFP

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Deux œuvres qui rendent hommage à la "génération Windrush" et qui se penchent sur la pandémie de Covid-19 ont ému le jury.

La sculptrice britannique Veronica Ryan a remporté mercredi soir le prix Turner, prestigieuse récompense britannique d’art contemporain, pour deux œuvres qui rendent hommage à la “génération Windrush” et se penchent sur la pandémie de Covid-19.

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La première honore l’héritage et la contribution de la “génération Windrush”, ces immigré·e·s arrivé·e·s des Caraïbes dans l’après-guerre au Royaume-Uni, dont fait partie l’artiste de 66 ans, née sur l’île de Montserrat.

La “génération Windrush” est associée à un scandale révélé en 2018 : bien que censé·e·s être Britanniques, certain·e·s de ces migrant·e·s ont été traité·e·s comme des clandestin·e·s et ont dû prouver chaque année de présence au Royaume-Uni sous peine d’expulsion. Les trois sculptures de bronze et de marbre de Veronica Ryan, installées dans le quartier londonien de Hackney, représentent des fruits tropicaux cultivés dans les Caraïbes.

L’artiste a également été récompensée pour son œuvre Along a Spectrum, qui rassemble des pièces en argile, bronze, ou encore des filets suspendus garnis de graines ou de fruits à coques, et explore perception, histoires personnelles et impact psychologique de la pandémie de Covid-19. Le jury a salué la “manière poétique personnelle et poétique dont elle étend le langage de la sculpture”. Recevant le prix à Liverpool, l’artiste a remercié en particulier celles et ceux qui ont “fait attention à moi quand je n’étais pas visible”.

Une exposition et des dotations

Parmi les quatre finalistes figuraient Heather Phillipson, connue pour sa sculpture d’une cerise géante qui a trôné jusqu’en mars à Trafalgar Square, ainsi que la photographe britannique Ingrid Pollard et l’artiste non-binaire Sin Wai Kin.

C’est la première fois qu’aucun homme n’était finaliste. “Il était temps, après des années de misogynie dans le monde de l’art, où les femmes n’étaient bonnes qu’à montrer leur poitrine et s’étendre sur des canapés”, a salué en annonçant le nom de la lauréate Holly Johnson, ancien chanteur du groupe Frankie Goes to Hollywood.

Pour la première fois depuis 2007, les quatre artistes sont exposées à la Tate Liverpool jusqu’au 19 mars 2023. L’année dernière, le groupe d’artistes Array Collective, dont les œuvres se veulent un écho aux problèmes de l’Irlande du Nord, avait remporté le prix. Créé en 1984, le Turner Prize, nommé en hommage au peintre William Turner, est réputé pour son anticonformisme et est familier des controverses. Le lauréat remporte 25 000 livres Sterling, les autres finalistes touchant chacun 10 000 livres Sterling.

Une artiste pluridisciplinaire

C’est à l’école que Veronica Ryan a pris conscience de sa passion pour l’art. Son travail minimaliste aux formes organiques explore le caractère éphémère de notre monde à travers des matériaux divers comme des déchets alimentaires, du bronze, du papier, du ciment, des fleurs et des plumes. Inspirée par des artistes comme Eva Hesse et Louise Bourgeois, Ryan a construit son œuvre autour d’un art social et poétique.

Marginalisée dans un monde dominé par les hommes blancs, elle prend part dès 1983 à l’exposition “Black Women Time Now”, alors que le mouvement des British Black Arts prend de l’ampleur. Elle tient toutefois à ce qu’on ne réduise pas ses œuvres à une interprétation raciale.

“Toute ma carrière, j’ai vu passer de nombreuses personnes très critiques à mon sujet parce que je n’entrais pas dans leur agenda politisé”, a-t-elle déclaré à l’autrice Monique Kerman, dans son ouvrage Contemporary British Artists of African Descent and the Unburdening of a Generation. En 2021, le Royaume-Uni lui décerne un titre d’officier de l’ordre de l’Empire britannique.