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“Red Vaporz” : un documentaire qui dévoile les visages du graffiti russe

“Red Vaporz” : un documentaire qui dévoile les visages du graffiti russe

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Par Tomas Statius

Publié le

Vodka, Poutine et graffiti

Une ballade en trois villes

Sur place, c’est autour de trois villes que s’est organisé leur périple. Une itinérance nécessaire, rappelle Nicolas Delpeyrou, pour couvrir la réalité d’un mouvement qui s’étale sur un pays grand comme 25 France, mais également pour rencontrer les graffeurs là où ils résident.
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Dès lors, les deux réalisateurs ont arrêté leur choix sur trois grandes étapes : Moscou, première porte d’entrée du graffiti sur le territoire ; Saint-Pétersbourg, symbole de la grandeur russe ; Iekaterinbourg, enfin, métropole de près d’un million et demi d’habitants qui accueille chaque année le festival de graffiti Stenograffia. Une dernière étape qui s’est “imposée d’elle-même” pour Nicolas Delpeyrou, et ce malgré les kilomètres qui les séparaient de Iekaterinbourg :  “Il se passe beaucoup de choses au niveau du graffiti là-bas. Nous y sommes restés deux semaines sur un mois de voyage. Et honnêtement c’est un peu notre coup de cœur”.

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Une première histoire du graffiti russe ?

Capturant habilement le présent, Red Vaporz offre également en creux un véritable retour sur la genèse du graffiti en Russie. Une chronologie sur laquelle on avait jusqu’ici assez peu d’éléments.
Comme le note Vasco Lopez, l’histoire du graffiti russe débute après l’explosion du bloc soviétique. Avant, “il n’y en avait pas réellement”, confirme Nicolas Delpeyrou.

“Le street-art est une forme de rébellion, une expression de soi-même, qui est propre à tout être humain.” – Vasco :  Lopez

Alors que le premier bomb-shop ouvre à Tvar en 1992, les Russes goutent à la liberté d’expression et le graffiti fait ses premiers adeptes. Un engouement qui reste pourtant confidentiel jusqu’aux années 2000 en raison du manque d’un matériel de qualité, comme le note le graffeur moscovite Sindik, interrogé dans le documentaire.
Le nouveau millénaire et la généralisation des NTIC engagent enfin une véritable démocratisation de la pratique : achat de bombes, documentation, tout est désormais à portée de clics. Le boom du graffiti russe est en marche et la scène connaît ses premières figures à l’instar de Dima Oskes, premier graffeur moscovite et organisateur du festival Faces & Laces.
Un mouvement que les deux réalisateurs capturent dans toute sa vivacité, sans pour autant éluder ses atermoiements. À commencer par la question de son identité.

Y a t-il du graffiti russe ?

Car Red Vaporz laisse un sentiment mêlé, entre grande distance culturelle et proximité indéniable. Un état d’esprit qui s’explique si l’on en croit les deux réalisateurs par l’entre-deux dans lequel se trouve actuellement le mouvement en Russie. Entre volonté de créer un lexique propre et regard tourné vers l’Ouest.
Ainsi, si certains s’efforcent de développer un style “russe” en s’inspirant des peintures murales de l’époque tsariste (on pense à un artiste comme Vitae Viazi), ou d’éléments culturels spécifiques – le graffeur Medboy se distingue notamment par l’utilisation de l’alphabet cyrillique dans ses créations – les deux réalisateurs, eux, remarquent plutôt une familiarité avec ce qu’il se passe dans l’Hexagone.
À ce sujet, Nicolas Delpeyrou précise :  “Pour moi, les graffeurs font tous la même chose, et ce pour les mêmes raisons, qu’ils soient russes, chinois, français ou américains.” Une “moyennisation” qui a un seul coupable : Internet.  

Vasco Lopez remarque quant à lui cette même ressemblance, mais il nuance. Si là-bas le graffiti est différent, c’est avant tout une histoire de contexte : “Il y a beaucoup d’interdits en Russie et la répression n’est pas la même. Le graffiti n’y a pas la même saveur.”