“Nous sommes tous des féministes”, le livre offert aux Suédois de 16 ans

“Nous sommes tous des féministes”, le livre offert aux Suédois de 16 ans

photo de profil

Par Anaïs Chatellier

Publié le

Tous les élèves suédois de 16 ans vont recevoir le livre Nous sommes tous des féministes de la romancière nigériane Chimamanda Ngozi Adichie. Une manière d’aborder en classe les questions d’égalité entre les sexes.

À voir aussi sur Konbini

Depuis la semaine dernière, les élèves suédois âgés de 16 ans reçoivent gratuitement un précieux cadeau : un exemplaire en suédois de l’essai Nous sommes tous des féministes de la romancière nigériane Chimamanda Ngozi Adichie. Selon The Guardian, cette initiative lancée par le Swedish Women’s Lobby et l’éditeur Albert Bonniers, compte bien créer, avec l’aide des professeurs, un espace de discussion en classe sur l’égalité des sexes.

J’aurais aimé que tous mes camarades de classe masculins lisent ce livre quand j’avais 16 ans“, avoue Clara Berglund, présidente du Lobby avant d’ajouter : “Ça parait si important de participer à ce projet. C’est un cadeau à tous les étudiants de deuxième année, mais aussi un cadeau pour nous et pour les générations futures”. 

Pourquoi nous devrions tous être féministes selon Chimamanda Ngozi Adichie

“We Should All Be Feminists” – traduit en français par “Nous sommes tous des féministes” – c’est d’abord un discours d’environ une demi-heure, prononcé en 2012 par l’auteure nigériane, Chimamanda Ngozi Adichie, lors d’une conférence TEDx à Londres.

Un discours devenu tellement viral qu’il a été adapté quelques mois plus tard en petit livre de poche facile à lire. L’écrivaine y explique dans un premier temps pourquoi elle est féministe et surtout pourquoi tout le monde devrait l’être également, avant de raconter, dans la seconde partie du livre, l’histoire d’une jeune femme nigériane mariée de force à son cousin qui vit aux États-Unis.

Celle qui se définit comme une “féministe africaine heureuse qui ne déteste pas les hommes, qui aime mettre du brillant à lèvres et des talons hauts pour son plaisir, non pour séduire les hommes“, revient ainsi sur de nombreux clichés qui collent au terme souvent jugé péjoratif de “féministe”. Car pour elle la définition est toute simple : un ou une féministe, c’est “une personne qui croit à l’égalité sociale, politique et économique des sexes“. C’est bien pour cette raison qu’il s’agit d’une “affaire de tous, y compris des hommes“, insiste-t-elle.

Elle dénonce ainsi les divers visages de la domination masculine, toujours à coup d’anecdotes amusantes et de récits de vie personnelle. “Partout dans le monde, la question du genre est cruciale. Alors j’aimerais aujourd’hui que nous nous mettions à rêver à un monde différent et à le préparer. Un monde plus équitable. Un monde où les hommes et les femmes seront plus heureux et plus honnêtes envers eux-mêmes. Et voici le point de départ : nous devons élever nos filles autrement. Nous devons élever nos fils autrement“, écrit-t-elle.

Régulièrement confrontée aux traditions de son pays, elle milite ainsi pour que les moeurs changent et ce dès le plus jeune âge, pour que l’éducation des petits garçons et des petites filles soit identique car comme elle l’explique : “Je pense que les garçons et les hommes font autant partie du problème que de la solution“. Elle n’oublie pas non plus d’être critique envers la masculinité moderne qui selon elle incite, par exemple, les hommes à cacher leurs émotions.

Une inspiration pour Beyoncé

Dans un message enregistré destiné aux élèves suédois qui ont reçu son ouvrage, elle leur confie alors :

À 16 ans, je ne pense pas que je savais ce que le mot “féminisme” signifiait. Je ne pense pas que je connaissais ce mot tout court. Mais j’étais féministe. Et je souhaite que toutes les personnes âgées de 16 ans qui vont lire ce livre en Suède découvrent aussi qu’elles sont féministes.

Souvent, j’espère que bientôt nous n’aurons plus besoin d’être féministes. Parce que nous allons vivre dans un monde qui est vraiment juste et équitable.

En attendant, plus d’un jeune suédois a déjà dû commencer à réfléchir aux propos de celle qui a carrément inspiré Beyoncé. En effet, dans le morceau “Flawless”, la Queen B sample cet extrait du discours de Chimamanda Ngozi Adichie : “Nous apprenons aux filles à se diminuer, à se sous-estimer. Nous leur disons : tu peux être ambitieuse, mais pas trop. Tu dois viser la réussite sans qu’elle soit trop spectaculaire, sinon tu seras une menace pour les hommes“. 

Si ce livre n’a pas révolutionné la littérature féministe, il a au moins le mérite d’être court, facile à lire et de résumer quelques grands principes. À la fois drôle, engagé et déterminé, l’ouvrage s’attache à rappeler les raisons qui devraient pousser tous les citoyens à devenir féministe si ce n’est pas déjà le cas. En tout cas, une petite prise de conscience ou piqûre de rappel ne ferait pas de mal à beaucoup de jeunes et de moins jeunes français. Alors à quand la même chose dans les lycées en France ?