Pour tenter de limiter les arrivées de réfugiés, l’Italie a mis en place un code de conduite que doivent désormais signer les ONG propriétaires de navires de sauvetage de migrants. Plusieurs organismes ont cependant refusé de le signer. Le bateau de l’un d’eux est désormais bloqué à Lampedusa.
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Mercredi 2 août, les autorités italiennes ont mis sous séquestre le “Iuventa”, un bateau de l’organisation non-gouvernementale (ONG) allemande Jugend Rettet, qui secourait des migrants en Méditerranée centrale. Le navire est désormais bloqué pour plusieurs semaines au moins, sur l’île italienne de Lampedusa.
Comme cinq autres ONG internationales, Jugend Rettet avait refusé de signer un “code de conduite” mis en place en juillet dernier par le gouvernement italien. De quoi faire dire à de nombreux activistes que le blocage du navire allemand est une forme de punition…
Mais il n’en serait rien selon Rome. “La mise sous séquestre à Lampedusa du Iuventa est sans rapport avec le fait que l’ONG n’a pas adhéré au code de conduite”, a déclaré le procureur de Trapani, en Sicile. Pour les autorités italiennes, cette mise sous séquestre s’expliquerait car l’ONG allemande est soupçonnée d’avoir “des comportements favorisant l’immigration illégale”, selon Libération. Rome l’accuse en effet de collaborer avec des trafiquants libyens.
Les ONG ne croient cependant pas à cette justification. Car mardi 1er août, entrait en vigueur un document rédigé par le gouvernement italien et destiné à encadrer le travail des ONG en Méditerranée. Ce texte en treize points appelé “code de conduite” prévoit notamment “d’interdire les appels téléphoniques ou les signaux lumineux que les passeurs pourraient interpréter comme des feux verts à l’appareillage des bateaux de migrants, de rendre la présence de policiers obligatoire à bord des bateaux des ONG et d’interdire le transfert des migrants secourus à bord d’autres navires”, note Le Figaro.
Et le ministère de l’Intérieur italien l’avait clamé haut et fort : si elles refusaient de signer le texte, les ONG pourraient se voir refuser l’accès au port de la péninsule, et ne plus être inclus dans le système officiel de sauvetage en mer. Plusieurs points du texte inquiètent cependant les organisations… En réponse, sur les huit ONG actuellement en Méditerranée, cinq ont refusé de le signer, tant qu’il ne sera pas modifié.
Des conséquences humaines désastreuses
L’obligation pour les ONG d’avoir un policier sur leurs navires pose notamment problème. Pour SOS Méditerranée qui affrète le bateau l’Aquarius avec Médecins Sans Frontières (MSF), cette présence policière devrait être “temporaire” et “non-armé[e]”. Autre problème pour les ONG : l’interdiction du transfert de rescapés entre bateaux. “Cela n’a pas de sens, mardi encore, huit cadavres récupérés par Proactiva Open Arms ont été transférés sur l’un de nos bateaux”, indique à Libération Sophie Beau, cofondatrice de SOS Méditerranée.
“Si on doit ramener au plus vite les personnes secourues sur les côtes, sans pouvoir faire de transferts, on prend le risque d’avoir plus de morts !”, confirme également à Libération Corinne Torre, de Médecins Sans Frontières.
D’autres organismes tels que Amnesty International et Human Right Watch craignent que ces points aient des “conséquences humaines désastreuses”.
Avec ce texte, les autorités italiennes poursuivent leur volonté de prendre peu à peu le contrôle des opérations de sauvetage de migrants en mer. Selon Le Monde, le ministre de l’intérieur Marco Minniti aurait déjà bien commencé en menant “d’intenses tractations […] auprès des tribus libyennes”.