“On ne me fera jamais croire que les réseaux sociaux seraient des espaces hors-sol”, a déclaré le Premier ministre en présentant une série de mesures pour lutter contre le racisme et l’antisémitisme.
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À l’occasion d’un discours au Musée national de l’histoire de l’immigration à Paris, le Premier ministre Édouard Philippe a détaillé ce lundi 19 mars son plan pour lutter contre le racisme et l’antisémitisme. En premier lieu, il a annoncé que la loi française allait être modifiée afin de “renforcer les obligations” de détection, de signalement et de suppression de contenus illicites sur Internet.
Comme annoncé par Emmanuel Macron début mars, la France va par ailleurs “se battre” pour un projet législatif au niveau européen, contraignant les opérateurs du Net, et notamment les réseaux sociaux, à retirer très rapidement le “torrent de boue” des contenus “haineux, racistes ou antisémites”, a-t-il confirmé.
Il a également assuré que ce plan européen, il n’allait pas “se contenter de l’espérer” : “Il faut se battre. Et on va se battre”, a-t-il assuré. Mais “sans attendre” l’aboutissement de ce chantier communautaire, la législation nationale va être modifiée, rapporte l’AFP. Il est prévu qu’un point sur l’efficacité de ce plan soit effectué dans un an et demi.
“Il semble plus facile de retirer la vidéo pirate d’un match de foot que des propos antisémites”
Nous avons besoin que les victimes portent plainte. Sans plainte, pas d’enquête, pas de responsable, pas de sanction. Dès la fin du semestre, nous rendrons opérationnel un système de pré-plainte en ligne pour les infractions de nature raciste et antisémite. #TousUnisContreLaHaine pic.twitter.com/cppNvx5sAu
— Edouard Philippe (@EPhilippePM) 19 mars 2018
Le Premier ministre a surtout insisté sur la nécessité de réguler Internet, au même titre que les autres sphères sociales :
“On ne me fera jamais croire que les réseaux sociaux seraient des espaces hors-sol. Pour moi, tout ce qui est publié et diffusé en France, est publié et diffusé en France. Et doit donc répondre aux lois de la République.”
“Ce qui m’énerve, c’est que de nos jours, il semble plus facile de retirer la vidéo pirate d’un match de foot que des propos antisémites”, a-t-il insisté. Une mission confiée à l’enseignant franco-algérien Karim Amellal, à la députée LREM Laetitia Avia et au vice-président du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France) Gil Taïeb, qui plancheront tous trois sur ces modifications législatives.
Plusieurs pistes sont envisagées comme l’instauration de lourdes amendes, comme en Allemagne, contre les réseaux sociaux qui ne retirent pas des propos haineux sous 24 heures ou la “fermeture des comptes ayant diffusé de manière massive et répétée” des messages de haine. “L’enquête sous pseudonyme” de cyber-enquêteurs sur les espaces de discussion en ligne est également étudiée.
Comme déjà évoquée par M. Philippe, la possibilité de permettre à un plaignant de qualifier lui-même le mobile raciste ou antisémite de son agression, comme au Royaume-Uni, va être observée. Concernant le volet éducatif, le plan prévoit la création d’une “équipe nationale de réaction” afin d’assister enseignants et acteurs de terrain confrontés à des situations conflictuelles.
Pour protéger les citoyens et accompagner les victimes, Édouard Philippe a annoncé la mise en œuvre du système de “préplainte en ligne“, le renforcement des “stages de citoyenneté” ainsi que la désignation de “référents racisme, antisémitisme et discriminations”, comme le rapporte Le Monde. Enfin, la création d’un “portail d’information et d’aide aux victimes” et de “bourses de thèse pour travailler sur le racisme et l’antisémitisme” est également prévue.
Un racisme persistant et une reprise des actes antisémites
Annoncé depuis des mois, ce deuxième plan (2018-2020) fait suite à un premier dispositif lancé dans un contexte de déferlement d’actes antisémites et anti-musulmans après les attentats de janvier 2015.
Le rapport publié par le ministère de l’Intérieur fin janvier 2018 prouve bien que, malgré une baisse générale des actes antisémites, racistes et anti-musulmans, avec un recul de 16 % sur un an, ces derniers sont toujours bel et bien présents avec un recensement de 950. Les actes antisémites ont même pour leur part augmenté en 2017. Gérard Collomb avait dénoncé une “reprise d’actes antisémites particulièrement forts”.
Les récentes agressions verbales et menaces de mort qu’ont subies la députée LREM Laëtitia Avia ou la jeune fille choisie pour incarner Jeanne d’Arc à Orléans le mois dernier, traitées de “grosse truie noire venue d’Afrique” et de “tête de babouin” achèvent de démontrer que le racisme a malheureusement encore de beaux jours devant lui et qu’il faut nécessairement lutter contre.
Ce qui n’a pas empêché l’ancien candidat Front national aux élections législatives Jean Messiha, connu pour son impulsivité et ses positions extrêmes, de publier un message pour expliquer que selon lui, “le seul racisme qui s’exprime en France est le racisme anti-Français et anti-Blancs” :
La seule haine en qui existe en France est la haine de la France, d’autant plus choquante qu’elle n’est ni dénoncée ni combattue (souvent même alimentée) ; le seul racisme qui s’exprime en France est le racisme anti-Français et anti-Blancs. Alors oui #TousUnisContreLaHaine
— Jean MESSIHA (@JeanMessiha) 19 mars 2018
Konbini avec AFP