Ad Astra est un chef-d’œuvre et, en son sein, Brad Pitt est impressionnant

Ad Astra est un chef-d’œuvre et, en son sein, Brad Pitt est impressionnant

Nous sommes en 2019 et Brad Pitt vient de trouver le plus beau rôle de sa carrière, devant la caméra de James Gray.

Le septième art regorge de surprises et Ad Astra en est une, magnifique. De la même manière que la Française Claire Denis s’est essayée pour la première fois de sa carrière à la science-fiction avec High Life (2018), qui aurait pu affirmer que James Gray, réalisateur 100 % new-yorkais, se tourne lui aussi vers le plus casse-gueule des genres cinématographiques, 25 ans après son Little Odessa ?

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Face à nous, la transformation d’un cinéaste connu pour ses tirades mélancoliques et dramatiques mises en scène dans les sombres quartiers de New York. Cette fois-ci, le voilà qui aborde une tout autre dimension, sans frontière. Si le magnifique The Lost City of Z prédisait déjà son envie de faire voyager ses personnages vers des lieux jamais foulés, Ad Astra le rapproche des étoiles, collaborant pour la première fois avec Brad Pitt, acteur principal d’un long-métrage dont il est aussi le producteur.

Dans la seconde, ce nouveau film est tout de suite comparé à ses grands frères, que ce soit le dystopique Sunshine, le dramatique Interstellar, le brut First Man. Mais il s’agit de James Gray, et tout comme Danny Boyle, Christopher Nolan ou Damien Chazelle, l’Américain utilise le vaste espace comme d’un prétexte pour consacrer une aventure individuelle, celle de l’astronaute Roy McBride.

Ce dernier, après un accident, est envoyé en mission à la recherche de son père, disparu depuis 16 ans aux confins du système solaire. Il doit aussi résoudre un mystère qui met en péril la survie des êtres humains.

L’Odyssée de James Gray

À hauteur de son personnage enfouissant aisément ses émotions, James Gray délivre un film de science-fiction prenant le temps. Le temps de scènes d’actions époustouflantes sur la Lune, dans un silence assourdissant, conviant Mad Max : Fury Road sur sa grise surface. Le temps de se vêtir de détails qui aident le spectateur à entrer dans un futur proche qui lui semble désormais à portée de main : façon Kubrick qui filmait ses astronautes en train de se faire une bouffe dans 2001 : L’Odyssée de l’espace, la Lune est désormais une antenne terrienne ordinaire, où on peut trouver un Subway et y accéder par un vol commercial.

Le temps de construire une odyssée, celle d’un homme qui n’a plus les pieds sur Terre, tant ses projets et ses envies d’ailleurs l’ont accaparé, bien trop attiré par la destinée d’un père absent. Le temps d’approcher sa caméra d’une denrée rare dans l’espace : l’humain.

Un Brad Pitt au sommet

Brad Pitt est le médium d’une foule de questions formulées par James Gray : est-on encore (plus) humain lorsqu’on part loin de toute humanité ? Est-ce qu’une fuite en avant physique est aussi synonyme de construction psychologique ? Est-ce que s’éloigner c’est mieux se trouver ?

À travers une voix off ténébreuse (qui cite Malick et un certain Tree of Life) permettant d’affirmer avec une simplicité terrifiante la réalité d’une situation qui l’est tout autant, le cinéaste trouve dans Brad Pitt son nouvel alter ego, lui qui était plus habitué au mutisme d’un Joaquin Phoenix qui avait parcouru avec froideur et inquiétude sa filmographie.

Et c’est grâce à la partition parfaite de l’acteur originaire de l’Oklahoma que James Gray dresse magnifiquement une quête impossible, celle de la fragilité de l’homme face à la figure du père. Il filme avec nuance et à travers des séquences mémorables le chemin torturé d’un être humain qui l’est tout autant, à la façade rigoureuse et calme, mais à la conscience altérée.

Avec lenteur, avec brio, une superbe photographie orchestrée par Hoyte van Hoytema (on lui doit aussi celle de… Interstellar) et une bande originale minimaliste de Max Richter (The Leftovers), James Gray confectionne le plus humain de tous les films de science-fiction jamais écrits, dans la lignée de ses précédents films, et plus particulièrement de La nuit nous appartient. Son nom ? Ad Astra, locution latine qu’on peut traduire par “vers les étoiles”.

Ad Astra sera dans les salles à partir du 18 septembre.