Des chercheurs de l’université de Stanford veulent construire des toilettes intelligentes, permettant de collecter des données à partir de l’urine et des excréments des utilisateurs. Ce n’est pas une blague, c’est même très sérieux.
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Dans un article publié ce lundi 6 avril dans la revue scientifique Nature, une équipe dirigée par le professeur de radiologie Sanjiv Sam Gambhir explique en détail le concept, l’utilité et les nombreux outils de ces toilettes, entre la captation vidéo et l’identification anale biométrique.
Les toilettes tech de l’enfer, en détail
Ces “toilettes de précision” (en référence à la médecine de précision et aux contrôles de santé intégrés) sont ainsi pensées pour capturer et analyser un nombre impressionnant de données liées aux excréments, sans pour autant demander aux utilisateurs de faire quelque chose de particulier. En somme, ces toilettes ressemblent a priori à toutes les autres.
Cependant, elles sont enrichies d’outils tech comme un système de vision par ordinateur, des capteurs de pression et de mouvement ou encore des algorithmes de machine learning. Elles sont également équipées de quatre caméras : une “caméra des selles”, une “caméra anale” et deux “caméras de débit urinaire”. Le schéma ci-dessous montre où elles sont situées dans le précieux bidet.
(© Stanford University)
Mieux : pour être sûr que l’utilisateur des toilettes est bien celui dont les données sont censées être analysées, celles-ci sont équipées d’un capteur d’empreinte digitale au niveau de la chasse d’eau, mais aussi d’un capteur d’identification anale.
C’est l’un des plus importants outils de ces toilettes intelligentes, car son objectif est double. D’abord, il s’agit d’éviter de se tromper de personne dans l’analyse des données – si, disons, les toilettes sont utilisées quotidiennement par différentes personnes. Ensuite, il s’agit de pousser le plus loin l’analyse et la récolte d’informations.
Ce capteur anal fonctionne à l’aide d’un scanner “utilisé pour enregistrer l’ensemble du processeur de défécation”, précise le texte de l’étude. “Le volume total des défections et la couleur des selles sera ensuite mesuré grâce à la vision par ordinateur. Le résultat attendu est une description précise de l’hydrodynamique de la défection humaine”, continuent les chercheurs.
(© Stanford University)
“L’utilisation potentielle de l’anus comme un identificateur biométrique n’est pas un nouveau concept”, souligne le docteur Seung-min Park, co-auteur de l’étude, dans un article de blog repéré par Mashable. “Le fameux peintre Salvador Dalí. avait déjà compris que l’anus avait 35 ou 37 pliures différentes, ce qui en fait des empreintes digitales uniques.”
Mais à quoi ça sert ?
Les données récupérées par ces toilettes intelligentes ne partent pas dans la chasse d’eau (pardon), mais sont envoyées dans le cloud à destination des scientifiques. Les auteurs promettent un secret médical absolu, en plus d’une protection technologique particulière concernant les photos des anus : celles-ci sont cryptées par une fonction de hachage.
Les données transmises permettront ensuite aux scientifiques de mener des recherches sur plusieurs domaines : l’analyse d’urine, la mesure de débit urinaire (uroflowmetry en anglais) et l’analyse des selles. Grâce à l’utilisation de différents algorithmes, les scientifiques sont ensuite capables de reconnaître les anormalités et les changements dans les selles ou l’urine des personnes – et d’en tirer des conclusions sur leur état de santé.
Pour le moment, précise le site de Stanford Medicine, seule 21 personnes ont eu l’occasion d’essayer ces toilettes intelligentes au cours des derniers mois.
Pour avoir un meilleur sentiment du degré d’acceptation des potentiels utilisateurs, les scientifiques ont demandé l’avis des étudiants de l’université Stanford. Sur 300 recensés, 37 % ont affirmé être “à peu près confortable” avec l’idée, tandis que 15 % seulement se sentaient “très confortables”.
Le futur de ces toilettes est encore entre les mains de ses créateurs. Ceux-ci veulent les rendre encore plus discrètes et acceptables pour les potentiels utilisateurs. Ils veulent aussi améliorer les fonctionnalités présentes, voire être en mesure d’individualiser l’expérience. Par exemple, quelqu’un souffrant de diabète pourrait souhaiter intégrer une analyse de glucose au processus, tandis que quelqu’un prédisposé à un cancer des reins pourrait souhaiter que les toilettes proposent une analyse de sang.