La Californie vote une loi historique contre les plateformes de microtravail

La Californie vote une loi historique contre les plateformes de microtravail

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(© D3sign/Getty Images)

Le texte, en vigueur au 1er janvier, force les plateformes comme Uber ou Lyft à déclarer leurs collaborateurs comme des salariés.

C’est à n’y rien comprendre : au pays de la Silicon Valley, modèle ultralibéral qui disrupte à toute berzingue depuis le début du XXIe siècle, les pouvoirs publics se rebiffent. Après l’interdiction de la reconnaissance faciale par la mairie de San Francisco, bastion de la technologie, l’État de Californie vient de faire encore plus paradoxal – et historique.

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Le 11 septembre, rapporte The Verge, le Sénat local a approuvé le projet de loi AB5, qui souhaite obliger les plateformes de microtravail (ce que l’on appelle la gig economy) à employer leurs collaborateurs indépendants comme salariés.Un véritable cataclysme pour Uber, Lyft et les autres.

Après son adoption par le Sénat, le projet de loi a frachi une dernière étape : l’Assemblée de Californie, où les législateurs ont adopté les nouveaux amendements. Le texte amendé doit désormais terminer son parcours législatif sur le bureau du gouverneur, Gavin Newsom. La signature ne sera alors qu’une formalité, Newsom ayant apporté son soutien public au texte.

Un “test ABC” pour qualifier les employés

Cette loi , qui entrera en vigueur au 1er janvier 2020, étendra  une décision rendue le 1er mai 2018 par la Cour suprême au sujet du statut des travailleurs indépendants d’une plateforme de livraison de documents, Dynamex Operations. Les magistrats avaient alors utilisé une formule, le “test ABC”, pour déterminer si les employés devaient être salariés ou employés en tant qu’indépendants.

Selon cette méthode, les employés dont les tâches ne sont pas supervisées par l’entreprise, qui effectuent des tâches au-delà du cœur d’activité de l’entreprise et qui possèdent leur propre entreprise indépendante peuvent être considérés comme sous-traitants. Le texte AB5 prévoit de généraliser ce test pour obliger les plateformes à requalifier plus souvent leurs employés en salariés. Ce qui signifie, entre autres, de les payer (au moins) au salaire minimum fixé par la loi, et de leur offrir une couverture santé et des indemnités en cas de cessation d’activité.

De leur côté, les entreprises visées ont mis toutes leurs forces dans une opération de lobbying pour éviter le passage de la loi. Après avoir échoué à se faire exempter, explique The Verge, Uber, Lyft et les autres champions du microtravail dérégulé ont changé de stratégie.

D’un côté, ces plateformes ont répété à l’envi que la réforme leur coûterait très cher (et que ces coûts additionnels se répercuteraient, évidemment, sur les clients), et de l’autre elles ont tenté d’amadouer les législateurs en encourageant la création d’un nouveau statut, moins précaire que celui de microtravailleur… mais moins coûteux tout de même qu’un salarié classique. Chassez la disruption, elle revient au galop.

Article mis à jour le 17 septembre.