“Je suis partie la tête haute” : entretien avec Myriam de Koh-Lanta

“Je suis partie la tête haute” : entretien avec Myriam de Koh-Lanta

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© A.issock / ALP / TF1

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Par Abdallah Soidri

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"Je ne vais pas perdre mon temps à répondre à des gamins, et même parfois des adultes, qui n’ont rien à faire de leur journée."

Sur les huit premiers épisodes de Koh-Lanta, Myriam a montré qu’elle avait du caractère à revendre. Et qu’il fallait mieux être avec elle que contre elle. Le tempérament de la Lyonnaise, entière, franche et directe, n’a pourtant pas plu à tout le monde et lui a valu d’être éliminée par une coalition rouge et jaune. Mais elle n’en a cure. Avec des victoires collectives et individuelles et des belles rencontres, la professeure d’anglais de 36 ans et volleyeuse estime avoir réussi son Koh-Lanta. Entretien.

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Konbini Sports | Comment on fait, quand on est professeur dans un collège, pour partir à Koh-Lanta ?

Myriam | J’ai dû démissionner, tout simplement. J’ai pourtant dit la vérité, mais l’éducation nationale est un cercle très fermé, et on ne m’a pas laissé de temps pour partir. Donc le choix était vite fait : j’ai pris mes bagages et je suis partie. Comme j’étais dans un établissement un peu compliqué, j’ai fait en sorte de pouvoir revenir. Mon chef était très satisfait de mon travail, donc on s’est mis d’accord pour qu’à mon retour de Koh-Lanta, je puisse reprendre mon poste. C’est chose faite. Mon chef m’a appelée pour me dire que mon nouveau contrat m’attendait le jour où j’ai pris l’avion pour la Polynésie. Il faut savoir prendre des risques et ils ont payé.

Pour être prête à démissionner de son poste pour participer à Koh-Lanta, il faut être sacrément motivée. J’imagine que dans ton cas, ce n’est pas la première fois que tu candidates à l’émission ?

Je suis l’émission depuis plus de 15 ans, et je me suis toujours dit que j’y serai un jour. C’était la deuxième fois que je tentais ma chance. La première fois, je suis allée jusqu’au casting final, mais on ne sait jamais vraiment pourquoi on n’est pas retenu. À mon avis, c’est parce que je n’avais pas d’histoires à raconter, je voulais juste dégommer tout le monde. Et je ne suis pas la seule à vouloir participer à Koh-Lanta pour cette raison.

En réfléchissant un peu et en me livrant un peu plus au fur et à mesure des castings, je me suis rendu compte que j’avais une histoire. J’ai fait le lien avec mon sport collectif, le volley-ball, et je me suis rendu compte que j’avais un esprit de vengeance. À chaque fois qu’un nouvel entraîneur débarque, je dois redoubler d’efforts parce que je suis plus petite que mes coéquipières. C’est un combat constant. Parce que je ne rentre pas les standards physiques de la volleyeuse, parce que je mesure 1,62 m, on me laisse sur le côté. Ces deux dernières années, j’étais très frustrée par rapport à ça, mais dès que je rentre sur le terrain, j’apporte du dynamisme. J’ai donc voulu mettre à profit cet esprit de vengeance sur Koh-Lanta. Et c’est une occasion qui ne se présente qu’une fois dans une vie, donc l’éducation nationale, je m’en contrebalance. Je reviendrai quand j’aurais terminé Koh-Lanta.

Tu avais candidaté pour quelle saison ?

C’était celle remportée par Naoil, avec aussi Inès et Ahmad, donc trois candidats avec des origines maghrébines. Et clairement, on est d’accord qu’il ne faut pas qu’il y en ait trop pour que le panel de candidats soit représentatif de la France. J’avais un profil trop proche de celui d’Ahmad, parce que je viens de Lyon ; de Naoil, par rapport à notre âge et notre façon de penser ; d’Alexandra, parce qu’on est toutes les deux mamans de deux garçons et séparées du père. J’étais tellement un mélange de beaucoup de monde. Mais je suis contente de ne pas avoir participé à cette saison, je préfère la mienne. Parce que je ne ressemblais à personne d’autre et on n’était qu’entre anonymes.

Comment ont réagi tes élèves quand tu leur as annoncé que tu participais à l’émission ?

Je ne leur ai pas dit parce que c’était interdit. Je leur ai expliqué que je partais en voyage d’affaires aux États-Unis. Ils n’étaient pas au courant, mais ils étaient inquiets que je ne revienne pas – je ne savais pas moi-même si j’allais revenir. Quand ils ont su, via mon remplaçant, que je revenais, ils étaient très contents. Puis quand ils ont appris que j’avais fait Koh-Lanta, c’est-à-dire pas avant le mois de février quand les portraits ont été dévoilés, ils m’ont dit : “On était avec un dictateur à apprendre les verbes irréguliers pendant que vous bronziez à Tahiti.” [Rires.]

En parlant de ton métier de professeure d’anglais, il y a eu pas mal de blagues sur les réseaux sociaux sur ton supposé niveau dans la langue de Shakespeare. Comment tu l’as pris ?

Je me suis fait tacler parce que j’ai dit [elle prend un accent américain] “in America, they stand”. J’ai vécu cinq ans aux États-Unis, où mes enfants sont nés, donc ça me fait doucement rire. Je les attends, les twittos qui veulent me défier pour une bagarre en anglais. On m’a aussi beaucoup comparée à Vincent pour le niveau d’anglais, et pour le coup, on l’a beaucoup parlé sur le camp. Il a un très bon niveau.

Professionnellement, quels sont tes projets pour la suite ?

Un de mes anciens chefs, avec qui je bossais quand j’avais 20 ans, m’a contactée pour me proposer un gros poste de manager sur le village olympique des Jeux de 2024, à Paris. L’objectif serait de gérer le pôle loisirs du village olympique. C’est encore en pourparlers, mais c’est une grosse opportunité à venir.

“Il n’y a personne d’aussi téméraire que moi”

Quand on se balade un peu sur tes réseaux sociaux, on se rend compte que le sport tient une part importante dans ta vie.

Je suis volleyeuse, mais je touche à tout. J’organise des événements sportifs avec l’idée de développer des tournois dans les sports collectifs. Dans ma pratique perso, je touche à tout, je n’ai peur de rien. Que ce soient des sports individuels, collectifs ou à sensation forte. Le problème, c’est que je n’aime pas faire du sport seule, et dans mon entourage, dans ma famille, il n’y a personne d’aussi téméraire que moi. En participant à Koh-Lanta, j’espérais trouver des personnes avec la même niaque et la même hargne que moi. Je vais bientôt faire du canyoning avec Fredéric et Candice, j’ai hâte. J’ai enfin découvert des gens avec cette même envie d’en découdre dans les mêmes sports que moi.

Depuis quand et comment est venue ta passion pour le volley ?

J’ai commencé à l’âge de 10 ans, en arrivant au collège, via l’AS, et je n’ai jamais arrêté, sauf quand j’étais aux États-Unis. Dès que je suis rentrée en France, il y a 9 ans, j’ai repris une licence dans un club au nord de Lyon. À un niveau régional, je joue au poste d’attaquante, au niveau national, je suis en défense.

Pourquoi cette différence de poste entre les niveaux ?

À partir du moment où tu arrives au niveau national, tu fais face à des joueuses d’1,80 m. Avec mon 1,62 m, je suis beaucoup trop petite pour faire de belles performances en attaque, par contre je suis très mobile en défense. Quand on est petite, on est souvent obligée de changer de poste pour évoluer à un niveau élevé. Je n’ai pas repris de licence cette année, mais je compte bien reprendre au niveau national dès que les conditions sanitaires le permettront.

Question un peu naïve : j’imagine que tu as une grosse détente ?

J’ai une bonne technique mais pas une si grande détente que ça. D’ailleurs, mes coéquipières me critiquent beaucoup là-dessus [rires], mais je donne mes instructions à ma passeuse pour qu’elle me donne des ballons comme je le souhaite pour bien taper dedans. De toute manière, tout se joue sur la technique. Quand la fatigue apparaît, c’est sur ça que tu t’appuies.

On revient sur Koh-Lanta. Comment ça s’est passé pour toi la diffusion de l’émission, par rapport à ton entourage, tes enfants mais aussi au regard extérieur ? Comment tu as vécu les critiques qu’il y a pu avoir à ton égard ?

Je ne lis pas les commentaires, donc tout ce que tu me dis [sur les critiques, ndlr], je l’apprends. Et en toute honnêteté, je n’en ai rien à foutre. J’utilise les réseaux sociaux comme il faut, mais je n’en suis pas malade. Dès que je sens qu’il peut y avoir des commentaires négatifs, je m’en éloigne. Par rapport à mes enfants, il n’y a aucun souci, ils sont hyper fiers. Leurs copains me connaissent très bien et savent que je suis une personne très gentille.

Pour ce qui est de la diffusion, je l’ai très bien vécue, je n’ai pas eu de souci particulier. Mais j’ai senti le vent tourner quand on a éliminé Aurélien : je me suis rendu compte que nos choix pouvaient être mal perçus. Mais pareil, je m’en suis éloignée. J’ai tellement d’autres choses à faire de mes journées que traîner sur les réseaux sociaux. Si mes amis ne m’envoient rien, je ne suis pas au courant. Je ne donne pas l’heure aux personnes méchantes. À l’inverse, il faudrait que je prenne le temps de répondre aux gens gentils sur les réseaux.

Tu ne trouves pas ça dommage que des candidats soient obligés de restreindre leur utilisation de Twitter, Instagram ou Facebook réseaux sociaux à cause des insultes des téléspectateurs ?

C’est dommage pour qui ? Pas pour moi, ma vie est pépère, je ne retiens que le positif. Je n’ai pas besoin d’aller voir un psychologue ou un coach de vie. C’est surtout dommage pour ceux qui passent leur temps à critiquer des personnes qu’ils ne connaissent ni d’Ève ni d’Adam. Ces personnes qui critiquent sur les réseaux sociaux, ils sont 2 000. Sur 6 millions de téléspectateurs, ce n’est rien du tout. À quel moment tu t’attardes sur 2 000 imbéciles qui te critiquent et ne te connaissent pas ? Si je commence à répondre je ne vais pas m’arrêter et je vais leur donner raison. J’ai l’intelligence de ne pas rebondir dessus et de m’attarder sur ma notoriété du moment. J’ai 36 ans, donc je ne vais pas perdre mon temps à répondre à des gamins et même parfois des adultes qui n’ont rien à faire de leur journée.

“Quand tu parles mal de moi, il faut assumer derrière”

Au final, qu’est-ce que tu retiens de tes 25 jours d’aventure ?

Je retiens mes belles performances individuelles sur la fin : première de mon équipe sur la dernière épreuve de confort et gagnante de l’épreuve du tir à l’arc. En collectif, j’ai donné de la voix pour que mon équipe ait cinq victoires, même s’il n’y a pas que moi. Je retiens le fait qu’on m’a fait confiance collectivement, alors qu’on ne me connaissait pas, et on m’a donné ce statut de leader avec Aurélien. En individuel, j’ai tout déchiré. J’ai remporté des épreuves, y compris celle qu’il ne fallait pas, le tir à l’arc, parce que tu dévoiles tes stratégies et tes affinités au grand jour, mais j’en suis fière.

J’ai essayé de mettre en place une stratégie pour garder les meilleurs et d’évincer les moins bons. Au final, on m’a catégorisée comme une des meilleures qu’on veut évincer parce que c’est tous des faibles. Qu’ils restent entre eux. Avant d’aller sur Koh-Lanta, je m’étais dit que je préférais partir parce qu’on a peur de moi que rester parce que je ne sers à rien. Je suis partie la tête haute au huitième épisode, je ne me suis pas laissée faire.

Comment ça s’est passé l’après Koh-Lanta ? De l’eau a coulé sous les ponts ou il y a toujours de la rancune avec certains candidats ?

Je me concentre sur mon cercle d’amis. Les autres peuvent me contacter mais je ne suis pas à la recherche de nouveaux amis. Quand tu parles mal de moi, il faut assumer derrière. S’ils viennent me contacter, je ne suis pas fermée à la discussion, mais on a vu qu’une grande partie d’entre eux manquait de tact et de franchise, donc je n’attends rien d’eux. Il n’y a pas de rancœur, je suis indifférente.