Il y a huit ans, Ben Greenhalgh remportait l’émission de télé-réalité “Football’s Next Star”.
Aujourd’hui, si vous tapez son nom sur Google, vous avez plus de chance de trouver des photos de lui avec un club de golf qu’avec un ballon de foot. Pourtant, en 2010, il remporte l’émission britannique “Football’s Next Star”. Le concept de cette télé-réalité foot : proposer à des jeunes de moins de 18 ans de s’affronter afin de trouver la future star du foot anglais. À la clé, un contrat à l’Inter Milan. Entretien avec Ben Greenhalgh, grand vainqueur de l’époque et aujourd’hui… golfeur professionnel.
Football Stories | Raconte-nous comment tu as été sélectionné pour participer à cette émission.
Ben Greenhalgh | Tout a commencé il y a 8 ans. Nous étions 8 000 jeunes à participer aux détections, organisées un peu partout en Grande-Bretagne. Le plus drôle, c’est que nous ne savions même pas ce qu’il y avait à gagner (rires). On savait juste qu’Harry Redknapp (alors coach de Tottenham, ndlr) faisait partie du jury et que c’était sympa de pouvoir être jugé par un grand entraîneur. Les tests sont passés très vite et au fil du temps, l’effectif a été réduit. Sans m’en rendre réellement compte, je me suis retrouvé dans les dix derniers, ceux qui faisaient partie du casting final diffusé à la télévision. Nous sommes partis en Italie pour tourner durant sept semaines et c’était une expérience géniale.
Quels souvenirs gardes-tu de ces sept semaines en Italie justement ?
Le vrai avantage, c’est que nous savions que l’émission serait diffusée cinq ou six mois après le tournage. Du coup, je ne ressentais pas du tout la pression pendant les entraînements. On était dans notre bulle et on n’avait aucune idée de l’ampleur que cela allait prendre. En y réfléchissant, ça aurait été très différent si on avait dû retourner à l’entraînement chaque lundi après la diffusion d’un épisode.
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“Je me suis entraîné avec l’équipe première de l’Inter Milan et j’ai même rencontré José Mourinho”
Au niveau des sensations, c’était vraiment génial. On jouait totalement sans pression. Imagine, on était une bande de jeunes de 17 ans qui jouaient au football et qui vivaient un rêve éveillé. Et plus on avançait dans le programme, plus on avait des opportunités de fou. Je me suis entraîné avec l’équipe première de l’Inter Milan et j’ai même rencontré José Mourinho. C’était génial.
Qu’est-ce que tu as ressenti lorsque l’on t’a annoncé que tu avais remporté le programme ?
Pour être honnête, je n’ai pas été surpris. Lors de la finale, il y a eu un gros entraînement avec l’équipe première et ça ne s’est pas bien passé pour Connor, l’autre finaliste. À l’inverse, j’étais dans la forme de ma vie, j’ai marché sur l’eau. Donc on savait déjà comment ça allait se terminer, bien avant l’annonce officielle. Bien sûr j’étais heureux de gagner, mais il n’y a pas eu cet effet de surprise.
Comment as-tu été accueilli par le public après ta victoire ?
Quand le show était diffusé, j’étais sous contrat à l’Inter Milan donc j’étais tranquille. L’émission était uniquement diffusée en Grande-Bretagne, personne ne me connaissait ici, donc je ne me rendais pas compte de l’ampleur que cela avait pris en Angleterre. Mais quand j’y retournais, c’était la folie. Les gens me reconnaissaient dans la rue, m’arrêtaient, me posaient des questions. Mais maintenant il n’y a plus rien de tout ça, je te rassure (rires).
Justement, est-ce que tu peux nous parler de ta signature à l’Inter Milan, le grand prix réservé au vainqueur de “Football’s Next Star” ?
J’ai directement été intégré dans l’équipe des U17. J’y ai joué six mois, et j’en garde vraiment de bons souvenirs. On a joué des grandes équipes comme Manchester City, ce qui pour moi était une grande fierté en tant qu’Anglais. Par la suite j’ai prolongé d’un an et j’ai évolué avec la Primavera, l’équipe réserve. Ça m’allait très bien, je savais que je n’avais ni l’expérience ni le niveau pour intégrer l’équipe première. C’est cette année-là qu’elle a fait le triplé Coupe-championnat-C1 d’ailleurs. J’ai beaucoup appris en côtoyant de près cette équipe formidable.
“Ce n’est pas un film, c’est la vraie vie”
On imagine quand même que dans l’euphorie de ta victoire, tu as pu t’imaginer jouer avec les plus grands directement. Tu n’as pas été déçu du tout ?
Non, car j’étais réaliste. Je savais que j’avais encore de gros progrès à faire. Je savais d’où je venais et que ce n’est pas parce que j’avais remporté une émission de télé-réalité que j’allais devenir le jeune prodige du football. Ce n’est pas un film, c’est la vraie vie. Un mec comme Cristiano Ronaldo a été repéré à 11 ans par le Sporting et jouait en Ligue des Champions à 17 ans. Moi, je n’avais aucune touche avec un grand club auparavant. Du coup, je prenais juste du plaisir à jouer à l’Inter Milan, peu importe la section, sans me demander où cela pouvait me mener.
Après l’Inter Milan, tu signes à Como en troisième division italienne. Le début des problèmes pour toi…
Exactement. Pourtant, tout se passait très bien. Je prenais du plaisir à jouer et je marquais pas mal de buts. Le problème, c’est que nous jouions en Serie C et qu’il y avait des gros soucis financiers à cette époque (2010, ndlr) à cause du scandale des matches truqués. Mon contrat arrivait à son terme et je ne pouvais pas rester parce que je n’étais plus payé, tout simplement. J’ai décidé de rentrer en Angleterre, mais c’était compliqué pour moi. Je venais de Serie C et très peu de personnes avaient pu me voir jouer là-bas. Je revenais comme un inconnu, sans repère.
Du coup, tu as enchaîné les petits clubs en Angleterre. J’ai compté, tu en as connus onze entre 2012 et aujourd’hui. Comment as-tu vécu cette situation ?
En fait, je voulais juste jouer. Après deux ans sans club, je suis retourné là où tout a commencé pour moi, à Welling United. J’étais heureux de pouvoir retrouver le même sourire que j’avais à 17 ans en entrant sur le terrain. Par la suite, j’ai enchaîné quelques clubs avant de signer en première division écossaise, à Inverness, en 2013. Malheureusement je n’ai pas eu de chance là-bas non plus.
J’ai commencé à enchaîner les matches et je sentais que cela pouvait être un tournant dans ma carrière. Mais notre coach a changé en cours de saison et le nouveau ne voulait tout simplement plus de moi. Mais ce n’est pas grave, je ne lui en veux pas. Cela arrive à beaucoup de joueurs dans leur carrière : c’est le quotidien du footballeur.
C’est vrai qu’Harry Redknapp t’avait glissé à l’oreille qu’il te prendrait à Tottenham si jamais tu ne gagnais pas l’émission ?
Oui c’est vrai ! Il me l’a dit avant la finale. Et quand j’y repense, je me dis que j’aurais dû perdre cette finale (rires). J’aurais pu faire deux ans avec la réserve avant de signer pro chez les Spurs, ou ailleurs. Parce que j’aurais eu beaucoup plus de chance de percer en Angleterre en faisant ça qu’avec mon parcours. Finalement, j’étais hors du radar en Italie, personne ne m’a réellement suivi et donc je n’ai pas eu d’offre. Mais en même temps, je pourrais toujours écrire sur mon CV que j’ai fait partie d’une équipe qui a gagné la C1. Donc ça compense clairement (rires).
“Je pourrais toujours écrire sur mon CV que j’ai fait partie d’une équipe qui a gagné la C1”
Tu as des regrets de ne pas avoir fait exprès de perdre cette finale du coup ?
Non, je ne regrette rien. Je comprends comment marche le foot. Tu ne contrôles pas la situation autant que les gens le pensent et il faut accepter les aléas d’une carrière.
Est-ce que tu penses que ça serait une bonne idée d’organiser une émission du même genre aujourd’hui ?
Je pense que de nos jours, les jeunes auraient du mal à gérer la pression. Personnellement, je n’ai jamais eu de problèmes avec les critiques que je pouvais recevoir sur les réseaux sociaux, mais s’il y a bien une chose qui est devenue importante pour les jeunes en 2018, c’est leur image.
Mais le show serait fou. Tout le monde regarde du foot et tout le monde regarde de la télé-réalité aujourd’hui. Si on combinait à nouveau les deux dans une émission, ça serait de la pure folie. Et le gagnant qui signerait dans un grand club aurait une médiatisation à échelle mondiale.
Huit ans plus tard, où en es-tu dans ta carrière ?
Je continue encore à jouer ! Le football est même ma source première de revenus. Ici, en Angleterre, nous avons neuf niveaux qui nous permettent de vivre du football. Moi, je suis en sixième division, au Concord Rangers F.C. Je suis golfeur professionnel à côté, mais c’est toujours le foot qui me fait vivre. En d’autres mots : je vis de ma passion et c’est absolument génial.