Tirée au sort pour être jurée d’assises, elle raconte : “Il y a des moments où l’on se demande ce qu’on a fait pour mériter ça”

Tirée au sort pour être jurée d’assises, elle raconte : “Il y a des moments où l’on se demande ce qu’on a fait pour mériter ça”

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Par Constance Derouin

Publié le

Si certains rêvent de devenir juré d’assises, la réalité de procédures éprouvantes n’est pas à négliger.

Avoir plus de 23 ans, disposer d’un casier judiciaire vierge, être inscrit sur les listes électorales. Chaque citoyen respectant ces trois conditions peut, au cours de sa vie, faire face à cette convocation : être juré d’assises. Clémentine Thiebault, journaliste de métier, a vécu cette expérience singulière.

Si, selon Célia Gissinger-Bosse, docteure en science de l’information et de la communication, 67 % des Français sont concernés par cette potentialité, peu d’entre eux atteignent la cour d’assises et le procès en qualité de juré. Et pour cause : après la convocation reçue par voie postale a lieu un tirage au sort, réalisé par le président de la Cour en charge de la session (qui rassemble parfois plusieurs procès). Chaque personne convoquée par voie postale reçoit un numéro.

Celui de Clémentine Thiebault, le numéro 21, a été tiré de l’urne en premier lors du second procès de la session par le président de la Cour, ce qui a fait d’elle une “jurée de jugement en l’absence de récusation”. La défense (l’accusé et ses avocats) ou le ministère public (le procureur) peut en effet refuser l’un des jurés tirés au sort.

Clémentine Thiebault assiste à un procès en appel pour “meurtre en bande organisée et complicité de meurtre en bande organisée”, rassemblant trois prévenus. Une semaine durant laquelle elle sera plongée dans un vocabulaire judiciaire et des détails criminologiques éprouvants. Vient ensuite le délibéré, à huis clos. La cour se retire jusqu’à l’obtention du verdict.

Clémentine Thiebault ressort avec plusieurs interrogations. La première, naïve et qui est revenue à plusieurs reprises au cours de la semaine du procès : “Qu’ai-je fait pour me retrouver là ?” La violence de l’affaire, la charge émotionnelle de la confrontation, les séances interminables qui nécessitent de passer une courte nuit à l’hôtel en face du palais de justice… Cette expérience apparaît comme une bulle hermétique dont le juré ressort, une fois sa tâche achevée, sans suivi de l’administration judiciaire ou soutien psychologique, ce que regrette Clémentine Thiebault.