Swimming, la belle lettre d’adieux de Mac Miller avant de partir

Swimming, la belle lettre d’adieux de Mac Miller avant de partir

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Par Jérémie Léger

Publié le

La mort de Mac Miller, rongé par ses démons, donne à son dernier album une tout autre dimension. Une magnifique tentative d’exorcisme… qui ne l’aura malheureusement pas sauvé.

Ces derniers mois ont été particulièrement riches musicalement. Paradoxalement, ils ont aussi été synonyme d’hécatombe pour bon nombre de nos icônes : Lil Peep, Dolores O’Riordan, XXXTentacion, Aretha Franklin ou encore, tout récemment, le regretté Mac Miller, décédé tragiquement à l’âge de 26 ans le 7 septembre 2018.
Dans un communiqué publié quelques jours après sa mort, sa famille expliquait que Malcolm McCormick était “un rayon de soleil dans ce monde pour sa famille, ses amis et ses fans”. Un rayon de soleil dont l’existence fut gangrenée par bon nombre de nuages sombres. Des cumulus tenaces nommés addiction, solitude et dépression, qu’il côtoie depuis 2011.
Comme beaucoup d’autres artistes confrontés à ce genre d’émotions négatives avant lui, il s’est servi de sa musique comme d’un journal intime thérapeutique pour l’aider à faire face à ses démons. C’est pourquoi, au fil de ses disques, en plus d’avoir toujours su se renouveler, il n’a jamais eu peur de montrer ses faiblesses, d’admettre ses problèmes et, par conséquent, d’y faire face.
D’abord seul face à lui-même, c’est finalement la chanteuse Ariana Grande qui sortira Mac Miller de sa profonde mélancolie. Son grand amour à qui il a d’ailleurs dédié son quatrième album, The Divine Feminine, sorti en septembre 2016.

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Heureux et épanoui dans son idylle, l’artiste va malheureusement tomber de haut près de deux ans plus tard après une rupture douloureuse et très médiatisée. Suite à cela, il va même se rendre responsable d’un accident de voiture après une conduite en état d’ivresse. Ses addictions à diverses drogues n’arrangent évidemment pas son cas.

“I was drowning, now I’m swimming”

Mac Miller est en train de sombrer mais, désireux de remonter la pente, il sort un album le 3 août, Swimming. Reflet de son état psychique et émotionnel du moment, cet opus de 13 titres a des allures d’exorcisme. Il s’agit en effet du tableau sonore d’un homme combatif souhaitant sortir la tête de l’eau, tout en acceptant d’être plus que jamais torturé par ses addictions et sa solitude.
Déjà, rien qu’au titre de l’opus, on comprend immédiatement que l’artiste est perdu dans un immense océan d’eaux troubles. Mais, plutôt que de se laisser couler, il décide de braver les vagues de négativité. Un sentiment renforcé par les paroles mélancoliques et le clip sombre de “Come Back to Earth”, en ouverture du disque.

“J’espère que c’était beau dehors mais il semblait pleuvoir. Le ciel est gris et je dérive, je ne vivrai pas éternellement.”
“Ils m’ont dit que ça ne pourrait qu’aller mieux.”
“Mes regrets ressemblent à des messages que je n’aurais pas dû envoyer. Mes voisins sont vraiment étranges, on pourrait être des amis. J’ai juste besoin d’un moyen pour sortir de ma mélancolie. Je ferais tout pour avoir un moyen de sortir de ma tête.”

Sur “Hurt Feelings”, il explore son lui intérieur et met en exergue son mal-être pour mieux s’en débarrasser. Loin de nous proposer un rap mélancolique d’un homme ravagé par sa rupture et ses addictions, Mac fait, à l’inverse et tout au long des 53 minutes de son projet, preuve d’une maturité étonnante. Il affronte ses problèmes en face plutôt que de les laisser le submerger.
Bien sûr, le combat ne sera pas facile et, comme dans toute lutte acharnée, on s’égare parfois et les idées noires nous rattrapent. C’est pourquoi les morceaux tragiques sont nombreux : “Small Worlds”, “Wings”… Au fond, le rappeur continue de souffrir, mais en tire malgré tout une nouvelle énergie positive.
Il semble même, à terme, fin prêt à s’accepter tel qu’il est, en admettant humblement ses forces et ses faiblesses. En témoigne le morceau “2009”, le plus lumineux et sans doute le meilleur titre de l’album.

“Maintenant tous les jours, je me réveille et je respire […]. Aujourd’hui, je ne fais que briller, prendre ma respiration et soulager ma conscience.”

Si la formidable capacité d’autoanalyse de l’artiste est à saluer, il n’en demeure pas moins que la dépression ne l’a finalement jamais vraiment quitté. Cela, il en avait probablement conscience. Ce qu’il ignorait sans doute, en revanche, c’est que celle-ci aurait finalement raison de lui…

Rest in peace, Malcolm McCormick

Après réflexion, le parcours émotionnel du rappeur de Pittsburgh n’est pas sans rappeler celui de Kid Cudi. Connu lui aussi pour flirter avec la dépression depuis son adolescence, il annonçait finalement sa rémission en 2012 sur son album punk rock expérimental WZRD.
Mais ceci n’était qu’illusion puisque, quatre ans plus tard, il se retrouve interné en hôpital psychiatrique pour dépression et pulsions suicidaires. Heureusement pour lui, il semble avoir enfin trouvé le bout du tunnel à en croire son dernier projet en duo avec Kanye West, Kids See Ghosts. Pour Mac Miller, le destin n’a malheureusement pas été aussi clément…
Avec ce disque, Mac a tenté de prouver que, malgré toutes ses luttes personnelles, il était capable de faire face à ses pensées noires. Seulement voilà, même s’il en est sorti grandi et s’est montré particulièrement vaillant au combat, le pouvoir adoucissant de la musique n’aura pas suffi pour le sauver de lui-même.
Bien que son autopsie n’ait pas encore déterminé les causes précises de sa mort, il se murmure depuis les premières dépêches que le jeune homme aurait succombé à une overdose. Ses démons auraient-ils finalement gagné ? Triste fin pour un musicien talentueux qui aura tant travaillé pour s’en sortir…
Quoi qu’il en soit, la musique de Mac Miller résonnera à jamais dans le cœur de ses fans. Elle en a probablement déjà aidé plus d’un à surmonter les épreuves douloureuses de la vie et continuera à le faire. Histoire de lui dire au revoir avant de le laisser partir vers un monde meilleur, voici son récent concert Tiny Desk, enregistré pour la sortie de son dernier album. Frissons garantis.