“Rosalía est surcotée”, “ elle est devenue trop commerciale”, “elle ne fait pas vraiment du flamenco”… Chacun ses goûts, mais une chose est sûre : Rosalía est une artiste qui n’est pas là pour rigoler. Ce jeudi 17 novembre, Rosalía a remporté pour la deuxième fois le prix du meilleur album de l’année avec Motomami aux Latin Grammys 2022. Le premier étant son (incroyable) premier album, El Mal Querer, sorti en 2018, qui a fait décoller sa carrière comme la fusée Apollo 11 (celle qui a atterri sur la Lune). En seulement quatre ans, Rosalía a été nominée pas loin de 200 fois et a remporté une soixantaine de prix.
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Certains trouvent qu’elle ne représente pas le flamenco traditionnel, d’autres pensent qu’elle ne devrait pas représenter la musique latine car elle est d’origine européenne. Néanmoins, c’est indéniablement une artiste qui casse les codes. Elle a créé un univers si varié qu’aucun autre artiste ne peut l’imiter. À l’image des mots apposés à son style par The New Yorker, elle est : “une omnivore d’esthétique innovante sans relâche”. Il vous faut encore une raison pour l’adorer ? Ça tombe bien, on en a plusieurs :
C’est la première à faire ressurgir le flamenco dans la pop culture actuelle
Bien qu’elle soit née à Barcelone, Rosalía tombe très vite amoureuse de la musique d’Andalousie. Fan de Camarón de la Isla — la fameuse rock star espagnole qui a modernisé le flamenco — comme de PNL, Rosalía a son propre monde. En plus, elle étudie à l’École Supérieure de Musique de Catalogne (ESMUC), l’une des écoles de musiques les plus prestigieuses d’Espagne. En 2018, elle sort son album El Mal Querer dans le cadre de son travail de fin d’études et impressionne le monde entier par son talent. Inspirée par l’art espagnol de la Renaissance et par le roman français Flamenca, Rosalía y ajoute son grain de sel très R’n’B, féministe et osé. Elle n’a pas peur de mélanger auto-tune et hip-hop avec clappements de mains et danse flamenco. Avec Motomami, Rosalía s’approche de plus en plus du reggaeton et même de la K-pop avec “Chicken Teriyaki”. Décidément, elle ne cesse de nous impressionner.
Sa musique est méga-pointue et fouillée
Son travail est bourré de références. Que ce soit dans ses chansons, ses clips, ses spectacles, elle est toujours à la recherche de sens et de créativité. Dans El Mal Querer (“le mauvais désir” en français), elle retrace l’histoire d’une jeune femme qui s’est fait emprisonner dans une tour par son amant à cause de sa jalousie. Un cheminement chaotique où chaque chanson de l’album correspond à un chapitre de l’histoire. Dans “Malamente – Cap 1 : Augurio”, Rosalía introduit la relation toxique. Dans “Di mi nombre – Cap 8 : Éxtasis”, elle parle de l’amour passionnel que ressent le personnage principal envers son amant. Et pour finir, la chanson de la fin “A ningún hombre – Cap 11 : Poder” parle de la femme qui a surmonté cet amour qui lui a fait beaucoup de mal.
Après ce premier chef-d’œuvre, elle enchaîne les singles comme “Con Altura”, “A palé”, “TKN”, “Milionària”, “Yo x Ti, Tu x Mi” et montre qu’elle est capable de maintenir le même niveau que son premier album tout en continuant à innover dans sa musique et son monde artistique. Sa diversité se voit aussi dans ses featurings : elle est capable de chanter avec James Blake, comme avec J Balvin ou The Weeknd.
En 2022, elle explose le game encore une fois avec Motomami, un album encore une fois pop, mais terriblement expérimental qui gagne pourtant le cœur du public (et le nôtre). Inspiré par le nom de l’e-mail d’une amie quand elle était petite (en mode Skyblog), l’album tourne autour de la moto, un véhicule qui a beaucoup été présent dans sa famille. Née dans les faubourgs de Barcelone, elle a été baignée dans un environnement industriel, avec beaucoup de voitures (et de motos). Ensuite, elle s’est approprié l’appellation “Motomami” pour définir une forme de force libératrice. Être une “Motomami” ou “Motopapi”, c’est être une sorte de “GOAT”. Étant actuellement en couple avec Rauw Alejandro, chanteur de reggaeton venant de Puerto Rico, elle dit s’être beaucoup inspirée des sonorités portoricaines et dominicaines dans ce nouvel album.
Son univers esthétique est aussi puissant que sa musique
Allant des chorégraphies, aux habits, en passant par l’attitude et la scénographie, son univers visuel est tout autant réfléchi que ses sons. Que ce soit dans ses concerts ou ses clips, Rosalía y met beaucoup du sien. Elle est connue pour ses loooooongs ongles et ils font partie de son identité (et de sa garde-robe). Comme on peut le voir dans son clip “Aute Couture”, les ongles ont une place centrale dans son univers. Certains pourraient croire que ce n’est qu’une question de goût, mais même ses ongles ont un message : celui du pouvoir de la féminité. On pourrait presque les voir comme des griffes (ou des castagnettes de Flamenco).
Ce n’est pas la seule référence qu’elle fait au girl power. Dans son morceau “A Palé”, elle apparaît avec un monosourcil, qui fait inévitablement écho à la peintre Frida Kahlo. Franchement, quelle autre artiste dans la scène pop d’aujourd’hui ose porter un monosourcil ? Encore une fois, Rosalía casse les codes.
Sans parler de ses chorégraphies qui sortent toujours de l’ordinaire. Dans “Combi Versace”, elle commence la chanson avec le micro par terre et franchement, c’est ouf.
Bref, pour toutes ces raisons, on trouve que Rosalía est une bête d’artiste. On espère avoir pu convaincre ceux qui en doutaient encore.