Qui est Owen Wilson ? Alors que sort sur les écrans Zoolander 2, on est allé lui poser quelques questions pour en savoir plus.
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C’est le mec qui est toujours enthousiaste. Toujours. Même quand c’est un loser. Dans les films, en tout cas. Il prend à partie le spectateur, le somme de s’engager, avec un enthousiasme qui déborde de l’écran. Il a été une tête à claque dans Mon beau-père et moi, blagueur dans La Nuit au musée, époux attentionné dans Marley et moi, écrivain torturé dans Midnight in Paris ou désespéré dans Serial noceurs. Comme une confirmation ultime, un référendum organisé par le magazine High Times l’élisait “déjanté de l’année”.
Dans une vidéo YouTube, on peut retrouver ses phrases préférées, proférées au cours de sa carrière et compilées en moins de deux minutes : on tombe sur une dizaine de “wow !”, une foule de “come on !” ou de “god damn it !”, répétées avec l’intensité qu’on lui connaît.
Dans la réalité, Owen Wilson se montre aussi discret que le salon dans lequel je le retrouve est feutré. Sa souriante assistante me fait franchir la porte, fait trois pas, puis se décale sur la gauche : elle tend le bras vers lui. Il se lève, me serre la main. La première chose dont je me rends compte est qu’il parle doucement, très doucement. Ne hausse jamais la voix. Se rassied confortablement dans son fauteuil. Pas de musique. Pas un bruit.
C’est sûrement ça le métier d’acteur : donner l’impression, pendant plus de 20 années remplies de rôles en tous genres, de Bottle Rocket de Wes Anderson à Zoolander 2 de Ben Stiller, d’être une personne allumée, de donner l’impression d’avoir la logorrhée d’un Woody Allen né au Texas. Il n’en est rien quand je m’assois à ses côtés : ses gestes sont pesés, sa voix fébrile – il me faudra demander à mon iTunes de tricher afin de dérusher mon interview à un niveau sonore confortable.
J’ai alors 20 minutes pour essayer de comprendre qui est véritablement Owen Wilson. Avant que je ne commence, il se lève, prend un verre d’eau, se rassoit. Je déclenche mon enregistreur.
L’humour
La première question est simple, naïvement placée au début de l’entretien : qu’est-ce qui vous a amené au cinéma ? Owen Wilson hésite. Ses mots sortent lentement, on sent qu’il ne veut rien presser. Il me raconte qu’il n’a jamais fait d’école de cinéma ni de stand-up. N’a jamais voulu en faire. Tout s’est fait de manière naturelle. Il est un gosse comme les autres à l’école, turbulent diront ses parents.
Il précise :
“Parfois un professeur t’appelle. Tu n’es pas prêt, tu n’as pas révisé, et tu commences à improviser en lui répondant du tac au tac. Des gamins de la classe rigolent. Je comprenais que je pouvais être drôle quand j’avais la parole. C’était comme un instinct naturel.
Et je savais que mon père avait un bon sens de l’humour. Mon oncle, qui faisait partie des meilleurs publicitaires de New York dans les années 1960, avait aussi un sens de l’humour affirmé. C’est quelque chose de très important dans ma famille. J’ai été exposé très tôt à cet humour.”
L’acteur, qui est sorti de la fac en 1988 avec un diplôme de littérature anglaise sous le bras, me souligne alors l’importance de l’écriture :
“Je pense que le fait d’écrire m’a aidé. Ça m’a permis d’arriver avec des idées qui pouvaient coller aux personnages que j’incarnais.”
Owen Wilson se rappelle alors, de tête, quelques lignes du dialogues de Zoolander 2. Ben Stiller, à la recherche de son fils, se rend compte que ce dernier est loin d’avoir le physique qu’il espérait. Owen Wilson lui donne la réplique :
“– Mon fils, c’est le gros !
– Et tu penses que parce qu’il est gros, il est une mauvaise personne ?
– Je sais pas.
– Mais je te le demande !”
Il poursuit : “Si on rit devant un film comique comme Zoolander, qui comporte des personnage sans filtres, tout droit sortis de cartoons, c’est parce qu’on évoque des choses réelles, via un biais qui se veut très innocent. La comédie a la capacité à être provocatrice, regarde Mark Twain ! Ça peut être la meilleure manière de danser avec la vérité.”
Wes Anderson
Ses débuts dans le cinéma indé sont le fruit du hasard. Après un passage à l’Institut militaire du Nouveau-Mexique, Owen Wilson entre à l’Université d’Austin. Son colocataire s’appelle Wes Anderson. Avec le jeune réalisateur en devenir, il se met progressivement à écrire, les cours d’écriture scénaristique aidant. De leur esprit jaillira le court métrage Bottle Rocket. Nous sommes en 1994 et Owen Wilson, avec ses frères Luke et Andrew, joue pour la première fois devant la caméra.
Présenté à Sundance, reconnu par les critiques, le court devient long. En France, on le traduit par “Tête brûlée”. Ça ne s’invente pas et colle parfaitement aux rôles de losers charismatiques dans lesquels Owen Wilson va se faire remarquer.
Vingt-deux ans plus tard, l’acteur semble ne pas en revenir :
“Tout est parti de Wes Anderson, dont le rêve était de devenir réalisateur. Ça m’a motivé. Il voulait que je joue dans le film. J’ai eu beaucoup de chance : celle d’avoir une vie formidable, d’être entouré par des personnes intelligentes et amusantes.”
Car lors du tournage de Bottle Rocket, Owen Wilson se rend compte de la capacité créative de son pote cinéaste :
“Je sentais qu’il était original, mais il m’a surpris. Quand on rédigeait ensemble le scénario, je ne savais pas à quoi m’attendre quand il serait derrière la caméra. Il n’écrit pas seulement des scripts, il façonne de véritables univers. Cette couleur [il désigne le pied de ma chaise] pourrait être la teinte qu’il choisirait en arrière-plan pour tout un film. Ou celle des pantalons des acteurs. Ces petits détails amusants sont importants pour lui.”
Cette amitié conduira Owen Wilson au générique de la moitié de la filmographie de Wes Anderson. On le retrouve dans Rushmore, puis en cowboy toqué dans La Famille Tenenbaum, en probable fils de Steve Zissou dans La vie aquatique, le nez cassé (sa marque de fabrique physique due, au choix, à quelques coups de boule et des entraînements de foot américain) dans À bord du Darjeeling Limited et, enfin, à l’accueil de l’hôtel du Grand Budapest.
La famille
Quand on regarde la filmographie de l’acteur, on ne peut s’empêcher de l’imaginer constamment entouré de ses potes. Entre Wes Anderson et Ben Stiller, sa carrière est accolée à une dimension purement familiale, présente dès ses débuts. En 1996, il joue ainsi dans Bottle Rocket de Wes Anderson puis Disjoncté de Ben Stiller. Tout au long de sa carrière, l’acteur a toujours été fidèle à ces deux figures du divertissement américain, changeant de masque en fonction de leurs besoins. En parallèle, il gravit les échelons de Hollywood avec son frère Luke, l’aîné de la famille, devenu l’Américain moyen d’Idiocracy ou le barbu suicidaire de La Famille Tenenbaum.
Je lui demande alors si faire l’acteur avec ses amis et ses proches est une bonne chose. Silence. Owen Wilson se lève pour se resservir en eau, puis se rassoit :
“Je ne pense pas avoir besoin d’être toujours avec les mêmes personnes. C’est bien d’en rencontrer de nouvelles. Mais c’est vrai que, lorsque je travaille avec un nouveau réalisateur, j’espère que la relation va être similaire à celle que j’ai quand je joue avec Wes Anderson ou Ben Stiller. C’est ce genre de connexion qui m’inspire.”
Avec Ben Stiller justement, tout a commencé à la sortie de Bottle Rocket. Il reçoit alors une lettre : l’acteur-réalisateur, qui fait déjà partie du sérail hollywoodien depuis la fin des années 1980, “disait alors combien il avait aimé le film et qu’il aimerait jouer avec [lui]”, m’explique Owen. Il conclut : “Il était sérieux : on a joué ensemble dans presque 20 films.”
Un amoureux des séries
Vingt ans après Disjoncté et quinze après Zoolander, devenu entre-temps un film culte, Owen Wilson rempile pour la première fois de sa carrière dans une suite, Zoolander 2.
Voici comment il me l’explique :
“Je voulais travailler à nouveau avec Ben. Je pense aussi que j’ai tellement aimé des séries comme Breaking Bad, Mad Men ou Game of Thrones que, moi aussi, j’ai eu envie de continuer à faire vivre mon personnage, Hansel McDonald. Peut-être aussi parce que je n’ai pas forcément une expérience d’acteur, je ne recherche pas forcément la nouveauté dans mes rôles. Je préfère plutôt faire quelque chose que j’aime.”
J’en profite pour lui demander quel personnage de série il aurait aimé jouer. Sa réponse est surprenante : elle est négative, d’un naturel désarmant. Il a tellement aimé des personnages comme celui de Don Draper qu’il se refuserait à penser les incarner : “Je ne pense pas que j’aurais pu le jouer. Celui qui joue le personnage est celui qui l’est.”
Engagé dans la politique
La discussion touche à sa fin. Quelques minutes me restent. 2008 : Owen Wilson s’engage pour Barack Obama. Nous sommes à ce moment à quelques jours des primaires de l’élection présidentielle américaine, le sujet paraît donc évident. L’acteur donne une autre impression, celle d’un star qui n’a pas froid aux yeux et en parle d’une manière naturelle :
“Chaque élection est importante. Quand Obama était dans la course à la présidentielle en 2008, j’ai mis énormément d’énergie. Je regardais tous les reportages, les sondages, contre Hillary, puis contre McCain : c’était presque comme une saison de football : tu suis ton équipe et, à la fin, tu es épuisé.”
Et 2016 alors ?
“Pour cette élection, elle est plus intéressante à travers Donald Trump. C’est marrant de le voir. On n’a jamais vu quelqu’un comme ça dans une présidentielle, qui fait campagne de cette manière. Je suis optimiste : il y a huit ans, on n’était pas bien, on va mieux maintenant”.
Dans une interview donnée à The Daily Beast, Owen Wilson n’avait pas hésité à comparer Donald Trump à… Charlie Sheen :
“Voilà quelqu’un qui ne suit pas le script. C’est comme quand Charlie Sheen fait ses trucs, du genre ‘wow!’. Il répond de manière complètement honnête à une question, et d’une façon divertissante. Tu peux voir en lui un espèce de personnage de Network : main basse sur la télévision [film de Sidney Lumet, ndlr]”
Donald Trump, un acteur comme les autres. Et Owen alors, il se situe où comme acteur ?
“Je n’ai jamais vraiment voulu faire l’acteur. Je n’ai pas fait d’école de cinéma. Résultat, je n’ai jamais changé mon approche, ma technique ou mon attitude quand je suis sur un tournage : être naturel”.
Je veux bien le croire.