Mamans, enquête sur les artistes femmes, mémoire de l’esclavage : 5 expos à ne pas rater en janvier

Mamans, enquête sur les artistes femmes, mémoire de l’esclavage : 5 expos à ne pas rater en janvier

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© Jacqueline Comerre-Paton/Palais des Beaux-Arts de Lille/Photo : Jean-Marie Dautel ; © Lebohang Kganye/Le BAL, Paris

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Par Donnia Ghezlane-Lala

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Au programme : des mamans, une enquête sur les artistes femmes, la mémoire de l’esclavage ravivée par Raphaël Barontini, des œuvres qui parlent et les derniers jours de Van Gogh.

Chaque mois, nous passons en revue les événements artistiques de notre beau pays, la France, afin de vous proposer la crème de la crème des expositions. Au programme : des mamans, une enquête sur les artistes femmes, la mémoire de l’esclavage ravivée par Raphaël Barontini, des œuvres qui parlent et les derniers jours de Van Gogh.

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“Où sont les femmes ? Enquête sur les artistes femmes du musée”, au Palais des Beaux-Arts de Lille

“Conçue comme une enquête, l’exposition se consacre aux œuvres du Palais des Beaux-Arts de Lille créées par des artistes femmes qui n’ont pas eu l’opportunité d’être exposées et traitées à leur juste valeur jusqu’alors. Composé d’une centaine d’œuvres, le parcours retracera les trajectoires variées de ces créatrices, dont le travail couvre une période allant du XVIIe siècle à nos jours.

Le choix de mettre en lumière des peintures, des sculptures ou encore des dessins réalisés par des femmes s’inscrit dans une démarche plus globale de se saisir de la problématique générale de leur invisibilisation dans les arts. À l’issue de l’exposition, le parcours permanent se verra enrichi d’un certain nombre de ces œuvres d’artistes femmes présentées, pour la plupart, au public pour la première fois. Et si nous regardions d’un autre œil la manière dont les femmes sont représentées par les artistes masculins ?”

Jusqu’au 11 mars 2024.

“À partir d’elle. Des artistes et leur mère”, au BAL, à Paris

‘Sans doute je serai mal, tant que je n’aurai pas écrit quelque chose à partir d’elle.’ Cette phrase de Roland Barthes dans son Journal de deuil en date du 15 décembre 1978, un peu plus d’un an après la mort de sa mère, annonce l’écriture au printemps 1979 de son célèbre ouvrage La Chambre claire. Essai théorique sur la nature du médium photographique, le texte s’articule autour d’une quête : retrouver, en image, la vérité du visage aimé, celui de sa mère disparue.

La mère, dont le regard est certainement le premier miroir de soi mais aussi du monde qui nous entoure, reste l’un des motifs fondamentaux de l’histoire de l’art. Les œuvres assemblées ici […] ont toutes en commun de dépasser le seul témoignage intime. Entre critique sociale, quête de soi, conjuration ou apaisement, qu’elles incarnent la réalité de la présence ou les effets de l’absence, toutes mettent en jeu la question de la filiation et ce qu’il en reste. Celle que nous croyons si bien connaître n’est-elle pas toujours une énigme, une image qui requiert un acte conscient, volontaire, de mise au point – Asareh Akasheh, Gao Shan, Dirk Braeckman, Hervé Guibert ? Son histoire, celle tue ou celle transmise, en héritons-nous – Anri Sala, LaToya Ruby Frazier, Michele Zaza, Karen Knorr ?

Quand un éloignement physique s’impose, comment combler la distance – Mona Hatoum, Chantal Akerman ? Dans ces tête-à-tête, l’implication volontaire de la mère au sein des dispositifs formels imaginés par les artistes devient souvent propice à l’humour et à l’irrévérence – Ragnar Kjartansson, Ilene Segalove, Hannah et Bernhard Blume – quand ils ne sont pas l’occasion d’interroger, défier ou repenser les règles d’un ordre social et moral pesant voire annihilant – Michel Journiac, Christian Boltanski, Mark Raidpere. Enfin quand la mère tend à disparaitre – Jochen Gerz, Paul Graham, Pier Paolo Pasolini – ou qu’elle n’est déjà plus, comment se construit une nouvelle image – Lebohang Kganye, Sophie Calle, Rebekka Deubner, Ishiuchi Miyako, Hélène Delprat ? De personnage, la mère devient ici figure, d’accès au monde, de jeu, d’identification, mais aussi de perte et de nostalgie.”

Jusqu’au 25 février 2024.

“Raphaël Barontini – We Could be Heroes”, au Panthéon à Paris

“Pour cette fin d’année, l’artiste Raphaël Barontini investit le Panthéon avec des œuvres évoquant l’histoire et la mémoire des combats contre l’esclavage. Dans le lieu de la mémoire républicaine, qui honore plusieurs personnalités ayant œuvré en faveur de l’abolition de l’esclavage, comme Condorcet, l’abbé Grégoire, Toussaint Louverture, Louis Delgrès ou Victor Schœlcher, Raphaël Barontini met en scène des figures héroïques de cette lutte contre l’esclavage, connues ou méconnues, ayant contribué à jouer un rôle marquant dans son abolition, et qui forment son ‘panthéon imaginaire’.

L’exposition prend la forme d’une installation monumentale, composée de drapeaux, de bannières et d’œuvres textiles. Dans le contexte du Panthéon et de ses décors, Raphaël Barontini a créé une fresque à la fois historique et sensible, évoquant d’une part la traite transatlantique et, d’autre part, les actrices et acteurs des combats pour la liberté. La première partie de l’installation textile et picturale est constituée d’une haie d’honneur qui accueille le public. Des bannières et drapeaux de grand format déployés de chaque côté de la nef présentent les portraits stylisés de figures historiques du combat pour l’émancipation et l’abolition de l’esclavage : Anchaing & Héva (La Réunion), Sanité Bélair (Haïti), Louis Delgrès (Martinique et Guadeloupe), Dutty Boukman (Haïti), etc.

La partie centrale […] dialogue avec les grandes peintures historiques du Panthéon évoquant certains épisodes de l’histoire de France – Jules-Eugène Lenepveu, Alexandre Cabanel ou encore Pierre Puvis de Chavannes –, et les textiles de Raphaël Barontini revêtent une dimension narrative, de la période sombre de la traite et de l’esclavage jusqu’aux puissantes batailles pour son abolition. Les œuvres de Raphaël Barontini conçues pour le Panthéon relèvent, dans le prolongement de ses précédents travaux, mais à une échelle inédite, d’un subtil art du collage et du montage : superposant les techniques et les couleurs, l’artiste assemble des fragments de paysages, de corps, de parures et de motifs puisés dans des langages visuels de différentes périodes, cultures et géographies. Alliant des questionnements artistiques, historiques et sociétaux, elles sont autant d’occasions de ‘créoliser les imaginaires’.

Jusqu’au 11 février 2024.

“Parler avec elles”, au Frac MÉCA, à Bordeaux

“Lorsqu’une création ne peut être conservée dans son état originel dans les réserves d’une collection, l’artiste accompagne le contrat de vente d’une série de documents (consignes, photographies, plans de montage…) qui permettent de reconstruire l’œuvre au plus près de sa forme initiale. L’artiste Émilie Parendeau mène depuis de longues années un travail de réflexion sur un ensemble de points, voire de problèmes, que soulèvent les œuvres reposant sur des protocoles, car celles-ci nécessitent un travail pour être exposées, un travail de documentation, de compréhension, de lecture et, inévitablement, d’interprétation.

Si toutes les œuvres impliquent quelque chose à accomplir au moment de leur présentation, elles partagent un point commun, la nécessité que quelqu’un les mette concrètement en œuvre. L’artiste a ainsi choisi de faire dialoguer les œuvres du peintre Claude Rutault, qui a fait de la délégation un principe de travail laissant à la personne qui souhaite voir sa peinture le soin de la réaliser, avec un ensemble d’œuvres du Frac, rarement montrées. […] Émilie Parendeau a également souhaité collaborer avec trois artistes : Florence Jung, Delphine Reist et Davide-Christelle Sanvee. […] S’il s’agit bien pour Émilie Parendeau de parler avec elles, les œuvres, il s’agit aussi de créer un espace partagé et de composer une exposition avec toutes celles et ceux qui concrètement la fabriquent.”

Jusqu’au 3 mars 2024.

“Van Gogh à Auvers-sur-Oise. Les derniers mois”, au musée d’Orsay à Paris

“Arrivé à Auvers-sur-Oise le 20 mai 1890, Vincent van Gogh y décède le 29 juillet à la suite d’une tentative de suicide. Bien que le peintre n’y ait passé qu’un peu plus de deux mois, cette période voit un renouveau artistique, avec un style et un développement propres, marqués par la tension psychique née de la nouvelle situation mais aussi par la création de quelques-uns de ses plus grands chefs-d’œuvre.

Durement éprouvé par les différentes crises subies à Arles puis dans l’asile de Saint-Rémy, Van Gogh se rapproche de Paris et de son frère Theo pour trouver un nouvel élan créatif. Le choix d’Auvers tient à la présence du Dr Gachet, médecin spécialisé dans le traitement de la mélancolie, et par ailleurs ami des impressionnistes, collectionneur et peintre amateur. Van Gogh s’installe au centre du village, dans l’auberge Ravoux, et explore tous les aspects du nouveau monde qui s’offre à lui, tout en luttant contre des inquiétudes multiples liées à ses crises, sa santé, ses relations avec son frère, sa place dans le monde de l’art.

Aucune exposition n’a encore été consacrée exclusivement à ce stade final, pourtant crucial, de sa carrière. En deux mois, le peintre a produit 74 tableaux et 33 dessins, parmi lesquels des œuvres iconiques : Le Docteur Paul Gachet, L’Église d’Auvers-sur-Oise, Champ de blé aux corbeaux ou encore son ultime œuvre, Racines d’arbres. Riche d’une quarantaine de tableaux et d’une vingtaine de dessins, l’exposition mettra en lumière cette période dans un propos thématique : premiers paysages figurant le village, portraits, natures mortes, paysages de la campagne environnante. Elle présentera aussi une série, unique dans l’œuvre de Van Gogh, de tableaux d’un format allongé en double carré.”

Vincent van Gogh, Racines d’arbres, 1890, Auvers-sur-Oise. (© Musée Van Gogh, Amsterdam/Fondation Vincent van Gogh)

Jusqu’au 4 février 2024.