Les DJ prennent du galon malgré la pandémie

Les DJ prennent du galon malgré la pandémie

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Par Guillaume Narduzzi

Publié le

Alors que la plupart des DJ subissent la crise sanitaire, ils obtiennent enfin de réelles marques de reconnaissance.

C’est un euphémisme de dire que l’activité des DJ a connu une sérieuse baisse de régime ces derniers mois. L’arrivée d’une pandémie mondiale imprévue aura au moins permis de mettre en lumière le manque de reconnaissance de cette profession. Partie intégrante du monde de la musique, les musiques électroniques n’ont jamais réellement été considérées comme une véritable culture à part entière par l’imaginaire commun – et surtout par les différents représentants de la culture. Comme si ses artistes ne s’étaient jamais détachés de leur image caricaturale de grands enfants s’amusant avec des platines devant des fêtards.
Sauf qu’avec eux, c’est tout le monde de la nuit, underground ou non, qui s’écroule. En atteste la lettre ouverte du pionnier et référence française, Laurent Garnier, écrite récemment à destination du ministère de la Culture. En 2020, le monde de la nuit ne fait toujours pas partie d’un monde de la culture qui apparaît alors comme élitiste, et se dirige de plus en plus vers le terme de “spectacle mort”, excellemment choisi par l’artiste français.

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La fête est finie

Si les lives sur les réseaux sociaux ont servi de béquille durant les premières semaines – au mieux quelques mois –, ils ont également rapidement montré leurs limites. Entre frustration et déception, les DJ prennent tant que possible leur mal en patience avant de retrouver un quelconque public.
Si quelques privilégiés peuvent se passer – financièrement – de sets durant quelques mois, l’immense majorité d’entre eux subissent de plein fouet la crise actuelle. Tous, des stars mondiales aux professionnels plus confidentiels, sont privés de leur passion et ainsi mis au chômage forcé dans l’attente de la réouverture des clubs, avec la violence psychologique que cela implique.
Peut-être que cette crise sanitaire était finalement nécessaire pour se rendre compte de ce manque de considération, aussi flagrant que sidérant. Comme si la France avait honte de ses DJ, alors qu’elle pourrait se réjouir de son histoire particulièrement riche dans ce domaine, l’intégrer pleinement à son patrimoine et mettre en avant cette tranche esseulée de sa culture.

Détroit et le modèle allemand

Pourtant, à l’étranger, les choses semblent évoluer. Aux États-Unis, alors que le Covid-19 continue de faire des ravages, Détroit, ville emblématique de l’histoire de la techno et du DJing, vient d’annoncer l’ouverture d’une académie de musique underground, qui sera dirigée par le DJ et producteur Waajeed. Si l’établissement ne devrait pas voir le jour avant 2022, l’initiative montre à quel point il est primordial de soutenir et de capitaliser sur cet héritage musical, tout aussi conséquent dans l’Hexagone.
Mais surtout, pour la première fois de son histoire, l’Allemagne vient de reconnaître officiellement la techno et la house comme des musiques, au même titre que les autres registres. Et par la même occasion, les DJ comme des musiciens, les platines comme des instruments et les soirées comme des concerts. C’est tout le paradoxe d’une culture plébiscitée depuis plusieurs décennies maintenant, mais toujours aussi mal aimée des institutions.
Les artistes allemands sont également à l’origine du projet United We Stream, qui consiste à proposer des livestreams de DJ en direct des clubs fermés pendant le confinement. Une démarche qui a été adaptée en France par l’association Technopol et Arte, et dont le résultat a pris la forme d’un film désormais disponible sur YouTube. De quoi remettre quelque peu en selle, le temps d’un set, des artistes voués à se débrouiller tout seuls.
Notre voisin européen – Berlin gardant son titre incontesté de capitale européenne du monde de la nuit – a trouvé le moyen de venir en aide aux clubs et apporter une forme de soutien à des DJ délaissés depuis de longs mois. Même si cela prend du temps et que le processus est particulièrement poussif, les mentalités évoluent. On est désormais en droit d’attendre des avancées similaires en France de la part du gouvernement.