La petite histoire du livre de poche qui rapporte gros

La petite histoire du livre de poche qui rapporte gros

photo de profil

Par Konbini

Publié le

Lancé il y a 70 ans, le format poche s’est vendu à 81 millions d’exemplaires cette année en France.

Ce jeudi 9 février, les célèbres éditions du Livre de Poche ont fêté ses 70 ans. Lancée en 1953 par le secrétaire général de la librairie Hachette et cocréateur des prestigieuses éditions de la Pléiade, Henri Filipacchi, cette collection populaire de littérature classique et moderne représente aujourd’hui la moitié des ventes de livres en France, avec 1,2 milliard d’exemplaires écoulés depuis sa création.

À voir aussi sur Konbini

Une révolution économique et culturelle

Plus petit, frais d’impression réduits de 40 % et donc prix de vente moins élevé, un format qui attire l’œil dans les librairies avec ses couvertures empruntées aux affiches de cinéma des années 1950 : Filipacchi s’est inspiré d’une recette ayant déjà fait ses preuves à l’étranger, notamment en Angleterre avec la collection Penguin Books depuis 1935, aux États-Unis avec la collection Pocket books depuis 1939 et en Allemagne avec les collections Albatross et Tauchnitz.

Hachette se lance d’abord avec des valeurs sûres puisque Kœnigsmark, du romancier à succès de l’époque Pierre Benoit, sera le premier texte édité en poche. Suivront Vol de nuit (Saint-Exupéry), La Bête humaine (Zola) ou encore Les Mains sales (Sartre). Les tirages démarrent à 60 000 exemplaires et les ouvrages étaient alors vendus deux francs, soit à peine plus que le prix d’un quotidien.

Véritable révolution littéraire, à la fois économique et culturelle, le livre de poche participera à démocratiser la lecture mais sans faire l’unanimité à ses débuts, il suscitera également un débat sur la démocratisation et l’accès au livre. Du côté des optimistes : Giono, Pagnol ou encore Prévert. Du côté des détracteurs : Henri Michaux et Julien Gracq selon qui la culture devait se mériter. Pour certains, le livre de poche n’était pas un vrai livre, pour d’autres, il était déjà “le plus puissant instrument de culture de la civilisation moderne”, raconte France Culture dans un article sur le sujet.

Vipère au poing sur le podium

En vente dans les gares ou les kiosques à journaux, mis à disposition sur des tourniquets en accès libre, inspiré de la distribution de presse quotidienne, le livre de poche révolutionnera également la diffusion et bouleversera le rapport à l’objet livre et au libraire. Devenu une véritable marque, le Livre de Poche, il inspirera de nombreux éditeurs qui voudront saisir le créneau en lançant à leur tour leur propre collection de poche. Viendront alors J’ai lu chez Flammarion en 1958, Presses Pocket et 10/18 chez Editis, Points chez Seuil puis Folio chez Gallimard en 1972.

Face au Covid, le livre résiste envers et contre tout

Aujourd’hui, le poche original, celui d’Hachette, demeure toujours le numéro un de la filiale et récolte 60 % des ventes en poche. L’an dernier, six Livres de Poche figuraient dans le top 10 des ventes dans l’Hexagone, rapporte France Culture. Mais c’est Vipère au poing d’Hervé Bazin et Le Grand Meaulnes d’Alain-Fournier qui demeurent les plus gros succès de la collection, avec plus de 5 millions de ventes, suivis du Journal d’Anne Frank ainsi que de Germinal de Zola, avec 4 millions de ventes.

En 2022 en France, le livre de poche a représenté 640 millions d’euros de chiffre d’affaires pour 81 millions d’exemplaires écoulés, soit près d’un livre sur quatre vendus, selon l’institut GFK. Le faible prix des poches — 7,90 euros en moyenne — en fait son principal atout mais, malgré cet engouement et cette accessibilité, il ne suffit pour autant pas à enrayer l’actuelle chute de la lecture en France.