Être queer et de culture musulmane : Camille Lenain immortalise des identités plurielles

Être queer et de culture musulmane : Camille Lenain immortalise des identités plurielles

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© Camille Lenain

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Par Lise Lanot

Publié le , modifié le

Situées à l’intersection de multiples discriminations, les personnes immortalisées confient leurs colères, mélancolies et affirmations.

Le regard fixe de l’activiste Habibitch, la pose remplie de puissance de la rappeuse Lalla Rami mais aussi le lit de Rizlaine, le salon de Djalil Djezzar et la droiture de Kacim. Connu·e·s ou pas, les modèles de Camille Farrah Lenain ont accepté d’ouvrir leurs portes – littérales et métaphoriques – à la photographe. Marquée par le décès de son oncle, Farid, en 2013, l’artiste d’origine franco-algérienne s’est intéressée à la représentation de personnes qui, comme lui, “portent plusieurs identités, souvent sous-représentées et incomprises”.

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Son projet Feu sans fumée, actuellement exposé à l’Institut du monde arabe, vise à “explorer les identités LGBTQIA+ au sein de la culture musulmane en France”. Sur son site, l’artiste appuie l’intersection de discriminations à laquelle se trouvent ses modèles – et tant d’autres personnes invisibilisées –, à la croisée de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre et de leur origine. “Les personnes LGBTQIA+ de culture musulmanes luttent activement contre ces inégalités tout en redéfinissant leur héritage religieux”, écrit-elle.

© Camille Lenain

Les portraits réalisés par Camille Lenain, intimistes et puissants, sont accompagnés de témoignages des sujets immortalisés, qui ont trouvé des chemins différents afin de surmonter obstacles et difficultés : “Certains ont dû couper les ponts avec leur famille, d’autres ont réinterprété le Coran, ont trouvé des moyens de panser les maux de leur famille, ont créé des communautés accueillantes et sécurisées en France.”

Les modèles confient leurs colères face aux violences subies parce qu’“on oublie souvent que [ces colères] ne sont que réactions. Elles ne sont pas ex nihilo, elles ne sont pas des attaques, elles sont des colères de défense”, explique Habibitch. Mais aussi les non-dits : “On sait ce que c’est, mais on ne le nomme pas”, note Kacim. Et les fiertés : “De moi à moi-même, je suis juste une bête de meuf qui s’appelle Lalla Rami.” Rappelant bien qu’aucune histoire n’est similaire, Camille Lenain espère créer des ressources “pour les identités queers composées de multiples couches, pour la communauté et les personnes qui en sont extérieures”.

Rizlaine, Paris, 2022. (© Camille Lenain)

Kacim, Lyon, 2022. (© Camille Lenain)

Djalil Djezzar. (© Camille Lenain)

Habibitch, Paris, 2020. (© Camille Lenain)

Lalla Rami, Boulogne, 2020. (© Camille Lenain)

L’exposition “Habibi, les révolutions de l’amour” est à voir à l’Institut du monde arabe, à Paris, jusqu’au 19 février 2023. Les événements organisés par Jins sont gratuits.

Konbini arts, partenaire de l’Institut du monde arabe, Paris.