Luidji : “J’ai rempli deux Zenith avec un seul album”, la recette du succès du rappeur de Foufoune Palace

Luidji : “J’ai rempli deux Zenith avec un seul album”, la recette du succès du rappeur de Foufoune Palace

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Capture du teaser TRISTESSE BUSINESS : SAISON 00

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Par Yasmine Mady

Publié le , modifié le

"La famille avant l’oseille…"

En 2019, Luidji sort l’album qui propulse sa carrière de rappeur : Tristesse Business – Saison 1. C’était il y a quatre ans et pourtant, c’est comme si l’album était sorti hier. Depuis 2019, il ne cesse de remplir les salles de concert avec l’univers et l’aura de ce projet. En octobre 2019, il commençait par un sold out à la Maroquinerie. Après deux années marquées par l’épidémie, il revient en septembre 2021 avec un concert à la Cigale, suivi par deux Olympia en mai 2022 et, pour finir en beauté, il vient de boucler deux Zénith de Paris ces 24 et 25 mai 2023. Le tout majoritairement avec un album sorti en 2019.

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Face à un Zenith qu’il a transformé en véritable chorale, Luidji se montre ému et fier. Fier de son parcours avec un seul album, il dira même sur le ton de l’humour : “J’ai rempli deux Zenith avec un seul album, ne parlez plus avec moi”. L’artiste est fier de son public multigénérationnel, fier de sa famille avec qui il a travaillé sur toute la logistique de ces deux dates, fier de la Palace Mafia, sa famille musicale avec qui il a clôturé le spectacle en beauté.

Lors de ce concert spécial, Luidji a annoncé un nouvel album tant attendu : Tristesse Business – Saison 00, qui sortira le 23 juin prochain et qui est déjà disponible en précommande.

“Je ne trouvais pas ma place dans ce monde j’ai dû me créer le mien”

Saison 00 et non pas saison 2. On comprend à travers la cover d’album qui se compose d’une photo de lui enfant que le projet pourrait revenir en arrière dans le temps. Une possible rencontre avec toutes les versions de Luidji qui ont fait de lui l’homme qu’il raconte dans la saison 1 de Tristesse Business. On devine la dimension introspective que pourrait avoir ce nouvel album dans un court-métrage dévoilé lors du concert qui donne le ton. Dans la salle d’attente du cabinet d’un thérapeute, la salle 1804 (ça semble important), on découvre un sombre Luidji, vêtu de noir et trempée de la tête aux pieds, comme s’il émergeait du fin fond de l’océan. On retrouve l’omniprésence du thème de l’eau qui teintait déjà la saison 1. Un visuel marquant qu’on vous laisse découvrir et qui se termine par un avant-goût d’un nouveau titre.

En attendant le 23 juin, on retrace les contours de la saison 1 de Tristesse Business pour vous remettre dans le bain. C’est assez rare de voir un projet perdurer aussi bien dans le temps et remplir des salles toujours plus importantes. On a presque l’impression de grandir avec l’album, mais également, d’une certaine manière, de voir Luidji le dépasser artistiquement.

Chanteur, rappeur, briseur de cœurs et cœur brisé… Dans Tristesse Business, Luidji nous parle d’amour avec une vulnérabilité peu commune dans le rap français actuel. Infidélité, grossesse inattendue, rupture, introspection et lutte perpétuelle contre de vieux démons. Luidji se dévoile et le dit lui-même : “Je me suis jamais autant senti guérir de tout ce que je raconte dans ces morceaux-là.”

Tristesse Business – Saison 1, c’est le titre complet de l’album. On assiste à l’évolution d’un personnage de chanson en chanson, comme dans une série. Il y a un lien entre chaque titre et une énergie qui va crescendo dans les productions et dans l’interprétation. On commence avec “Les gens qui s’aiment”, un son très Jacques Brel dans l’ambiance et puis on finit avec des titres qui flirtent avec la trap comme “Basquiat”, “Mauvais Réflexe” ou encore des influences bossa-nova dans “Gisèle”, le dernier son du projet.

Comme le font très bien remarquer nos compères de chez No Fun dans leur podcast “Luidji, par amour” : le Luidji du premier morceau n’est pas le même que celui du 17e. Il y a du vécu, un développement de caractère et des histoires fortes qui s’étalent sur plusieurs années, contrastant avec l’industrie actuelle qui tend à la rapidité et à la course aux hits.

L’album nous plonge dans un storytelling mené avec une plume franche et atypique. Luidji raconte clairement comment il s’est joué de certaines femmes avec une honnêteté déconcertante. Il réussit à peindre une image poétique du mec un peu instable, toxique mais addictif qu’on déteste tous·tes en principe et ça, c’est assez brillant.

Le projet est à la fois autobiographique et astucieusement universel. Il peut parler à tout le monde. Chacun·e peut se retrouver dans la “Femme flic” qui piste les réseaux de son bien-aimé. Dans les vagues de “Nazaré” qui évoque avec mélancolie un besoin de partir et de renouveau. Dans la “Gisèle”, accro aux virtuels et aux selfies et qui ne “vit que pour les caméras”. On s’y reconnaît ou alors on reconnaît forcément quelqu’un. Le “Je” devient le “Nous” dans les détails de ce qui est pourtant très personnel.

Tristesse Business c’est une histoire d’amour et de rupture mais cette dernière n’est pas seulement amoureuse. Dans ce projet, on sent également une rupture avec le fonctionnement traditionnel de l’industrie musicale. Dans “3 ans” il le dit clairement :

“Je croyais aux maisons de disques jusqu’à ce qu’on me demande de faire une version trap de Johnny Hallyday.”

Il a rompu avec Wagram, sa première maison de disques et a fondé Foufoune Palace Bonjour, un label indépendant réunissant de nombreux artistes comme Luidji, Tuerie, Pee Magnum ou encore Ryan Koffi.

Pour RR, il explique que : “Foufoune Palace c’est avant tout un état d’esprit, prouver qu’en indépendant on pouvait faire des choses bien plus grandes – ou au moins égales – à un travail de maison de disques.”

Ce besoin de liberté créative, on le ressent tout au long de Tristesse Business mais également dans l’identité même du rappeur. Il dit lui-même vouloir “rester éloigné de toute la facette superficielle du milieu”. Il n’y a, dans le projet, aucune tentative de hit évident, seulement une volonté de raconter une histoire, de garder un fil rouge artistique et de s’y tenir. La recette semble fonctionner car, quatre ans après, l’album continue de faire son bruit, contrastant avec une industrie de la musique qui va toujours plus vite et des artistes qui sortent toujours plus d’albums.