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Comment des sculptures classiques du MET vont aussi être exposées dans leur Périgord d’origine ?

Comment des sculptures classiques du MET vont aussi être exposées dans leur Périgord d’origine ?

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© Robert Bye/Unsplash

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Par Konbini avec AFP

Publié le

Et mercé la technologie 3D.

Deux sculptures du XVIe siècle trônent depuis 1908 au Metropolitan Museum of Art de New York (MET) : ces joyaux de la Renaissance française vont être copiés à l’identique grâce à la technologie 3D et leurs répliques installées dans leur château d’origine du Périgord.

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Ces fac-similés, qui seront fabriqués d’ici quelques mois, sont le fruit d’un partenariat exceptionnel imaginé il y a 70 ans et scellé la semaine dernière, au MET à New York, entre l’un des plus grands musées du monde et le département de la Dordogne.

Via une société locale de promotion du tourisme, la Semitour, l’entreprise l’Atelier des Fac-similés Périgord va reproduire deux imposantes sculptures d’un artiste anonyme, datées de 1504 ou 1515, des scènes bibliques intitulées Mise au tombeau du Christ et Pietà avec des donateurs.

Ces œuvres ont occupé pendant près de 400 ans la chapelle du château de Biron, dans le sud de la Dordogne, aux confins du Périgord et de l’Agenais. Dressé sur un promontoire naturel, cet édifice monumental est constitué de bâtiments d’époques différentes, dont les plus anciens, comme son donjon, remontent au XIIe siècle.

Détruit, reconstruit, rénové au cours des siècles, le château appartient depuis 1978 à la Dordogne qui en a fait un centre touristique et culturel, selon le président du département, Germinal Peiro, en visite au MET, immense musée posé en majesté sur la 5e Avenue de Manhattan, au bord de Central Park.

Moule numérique

Particularité de l’accord entre acteurs new-yorkais et périgourdins : les répliques des sculptures seront fabriquées en Dordogne, ont expliqué à l’AFP le directeur de l’AFSP Francis Ringenbach et le conservateur pour l’Art médiéval du MET, Griffith Mann. Les fac-similés prendront forme grâce à la technologie de la 3D pour faire une modélisation numérique et éviter de travailler sur place et de déplacer ces œuvres originales monumentales.

“On peut aujourd’hui employer des techniques non invasives en réalisant un moule numérique”, s’est réjoui M. Ringenbach, qui veut “reproduire, simplement et à l’identique”. Outre le recours à des “techniques contemporaines”, il faudra “90 % de travail artistique pour reproduire l’usure du temps”, comme la patine sur le marbre des statues à l’état de conservation exceptionnel.

Les répliques, qui trouveront la place qu’occupaient les originaux dans la chapelle de Biron, coûteront “autour de 350 000 euros”, selon M. Ringenbach. Son atelier jouit d’une renommée pour avoir copié les peintures rupestres de la célèbre Grotte de Lascaux, au Centre international de l’art pariétal – Lascaux IV, ouvert en 2016, à Montignac, dans le Périgord noir. L’AFSP a aussi travaillé sur les répliques Lascaux II et Lascaux III.

“Même émotion”

D’ailleurs, a relevé le responsable du château de Biron, Sébastien Cailler, “des millions de visiteurs ont une émotion quand ils descendent dans les grottes [copiées] de Lascaux, la même émotion qu’avant 1963 quand on descendait dans la véritable grotte” fermée il y a 60 ans pour préserver ce site préhistorique.“Quand vous verrez ces sculptures à Biron, qui seront des fac-similés, vous aurez sans aucun doute la même émotion qu’ici” devant les originaux, a-t-il assuré à l’AFP, à New York.

Repérées par des historien·ne·s, collectionneur·se·s et galeristes dès la fin du XVIIIe siècle, les sculptures Mise au tombeau du Christ et Pietà avec les donateurs ont été vendues en 1907 par le dernier marquis de Biron au richissime banquier états-unien John Pierpont Morgan, également président du MET. Il les expose à partir de 1908.

En 1953, la Dordogne et le château de Biron négocient pendant quatre ans avec le musée new-yorkais pour récupérer les sculptures, sous forme de moulages. En vain. Puis, en 2018, le Périgord reprend langue avec le MET, des premiers essais technologiques sont faits en 2022 et l’accord est signé le 15 février à New York.

“Ce type de relation et d’échange nous assure que les œuvres d’art existent en deux lieux”, s’est félicité Griffith Mann, pour qui son musée et ses millions de visiteur·se·s est “l’endroit le plus sûr pour préserver les sculptures” originales du Périgord, au prix aujourd’hui inestimable.