Biiinge Dressing : dans La Roue du Temps, le vêtement est un marqueur d’identité

Biiinge Dressing : dans La Roue du Temps, le vêtement est un marqueur d’identité

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Par Marine Pérot

Publié le

Les costumes servent de repères, pour mieux connaître les personnages et leurs origines, pour ne pas se perdre dans l’univers très riche de Robert Jordan.

L’univers de La Roue du Temps, série inspirée de la saga littéraire de Robert Jordan dont la deuxième saison est en cours de diffusion sur Prime Video, est peuplé de nombreuses cultures différentes. Il peut être parfois difficile de retenir les noms de chacun ou de se souvenir d’où viennent les personnages, c’est pourquoi la série utilise ses costumes pour mettre de l’ordre dans son vaste monde.

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Pour la saison 2, c’est à la costumière britannique Sharon Gilham qu’a été confiée la mission d’habiller les personnages et de créer l’identité visuelle des nouvelles cultures qui viennent rejoindre la série. Comment rendre ces dernières bien distinctes les unes des autres ? Pour la costumière, cela passe par l’attribution de silhouettes, de palettes de couleurs et de tissus qui leur sont propres.

Les livres comme point de départ

Quand on adapte une saga de fantasy littéraire composée de 14 volumes, on peut au moins compter sur la richesse des écrits de l’auteur pour servir de guide. La première source d’inspiration de la costumière de La Roue du Temps, ce sont donc les livres de Robert Jordan.

Prenons les habitants de Cairhien, nouveau lieu clé de la saison 2, et en particulier la famille Damodred : Gilham explique s’être référée à Jordan pour la confection de leurs costumes, car il décrit les nobles de cette cité comme étant toujours vêtus de couleurs sombres. Elle ajoute aussi que le look du peuple de Seanchan, autre nouvelle contrée, est né d’une mention dans les livres les comparant à des insectes.

“C’est pourquoi j’ai intégré dans leurs costumes des éléments qui font penser aux insectes, comme des piques ou l’œil composé du masque de Suroth. Les livres parlent aussi de plis dans leurs vêtements, c’est donc aussi quelque chose que j’ai ajouté dans l’iconographie de cette culture. C’est comme ça que ça marche : on part d’une idée ou d’une petite référence dans les livres, on la développe et ça permet de graduellement construire ce monde et de lui donner vie.”

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Justement, bâtir un univers comme celui de La Roue du Temps, qui englobe de multiples territoires, peut se révéler être un véritable défi. Le genre de la fantasy offre de nombreuses possibilités, mais il est important de se fixer des règles de base pour que l’esthétique du show reste crédible :

“Vous avez un mélange des cultures dans ce monde, et donc la possibilité de prendre des choses de n’importe quelle époque. La contrainte c’est que tout doit être réaliste, donc rien ne doit sembler avoir été fabriqué après la Révolution Industrielle”, explique Gilham. “Quand on fait un costume il faut utiliser des tissus naturels, que les coutures aient l’air d’être faites à la main, que les imprimés soient sérigraphiés…”

Une fois ces limites posées, Gilham et ses équipes ont la liberté de puiser dans une multitude de styles et d’époques pour développer l’univers de la série. On remarque ainsi que Cairhien est marqué par une esthétique aux accents français et japonais, tant au niveau des costumes que des décors, tandis que Seanchan rappelle plutôt les cultures mésopotamiennes.

La couleur comme marque d’identité culturelle

Les couleurs jouent un rôle clé dans La Roue du Temps, et pas seulement au sein des différents ordres qui constituent l’organisation des Aes Sedai. Chaque Ajah est en effet nommé d’après une couleur (Bleu, Rouge, Vert, Jaune, Gris, Blanc et Marron) mais ce lien entre couleur et identité dans la série ne concerne pas que les Aes Sedai.

Couleurs et cultures sont étroitement liées et Gilham explique qu’associer une palette à chaque culture permet de rendre ces dernières facilement identifiables et de s’assurer que les spectateurs puissent reconnaître d’où viennent les personnages.

Outre les tons sombres associés à la noblesse de Cairhien, le monde de Seanchan tourne autour de teintes rappelant le métal rouillé, avec des tons dorés, orange, ou encore marron, mais aussi du turquoise qui rappelle l’eau, car il s’agit d’un peuple qui vient d’une contrée lointaine, au-delà des mers.

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La couleur vient aussi souligner l’individualité de chaque personnage et leur évolution. Ainsi Moiraine Damodred, Aes Sedai de l’Ajah Bleu, voit son costume changer en saison 2, car elle est désormais privée de ses pouvoirs. Elle s’affiche donc dans des tons plus sombres, unis, et dans des tenues simples dénuées d’ornements. La façon dont les personnages s’habillent n’est jamais anodine.

De la même manière, Rand al’Thor est lui aussi souvent attaché à des tons bleutés et sombres, car cette saison il vit au Foregate, dans les bas quartiers de Cairhien :

“Comme c’est le quartier pauvre de la ville, les gens semblent porter les vieux vêtements des riches,” explique Gilham.

Le costume comme symbole hiérarchique

De nombreuses scènes de la saison 2 de La Roue du Temps se déroulent à la Tour Blanche, le siège des Aes Sedai. Comme mentionné plus tôt, ces dernières utilisent les couleurs pour distinguer leurs Ajah, mais chez elles, le vêtement sert aussi à établir un ordre hiérarchique.

On remarque ainsi que les novices, comme Egwene et Nynaeve, sont vêtues de robes blanches, simples, et similaires à des tenues de servantes. Gilham souligne cependant que Nynaeve, repoussant comme d’habitude les limites de sa condition, tient à porter sa ceinture de sage-dame par-dessus sa robe.

“Ensuite il y a les Acceptées, qui est le niveau au-dessus, puis toutes les Aes Sedai. J’ai développé la structure qui entoure chacune de leurs différentes couleurs. Chaque Ajah a sa propre couleur mais aussi une fonction, et j’ai utilisé un certain type de tissu et de silhouette pour chaque groupe afin de montrer d’où elles viennent et qui elles sont”, détaille la costumière.

Les Rouges, ces femmes qui pourchassent les hommes capables de canaliser le Pouvoir Unique, sont par exemple vêtues de tenues dont la silhouette est plus serrée, car cet Ajah a un côté plus strict que les autres.

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Cette façon de marquer la hiérarchie des personnages par les costumes est aussi flagrante au sein de la société de Seanchan où les sul’dam tiennent en laisse les damanes. Gilham a souhaité donner un côté reptilien à ces femmes porteuses de laisses, en leur donnant une armure en cuir, difforme dans le dos, qui fait penser à une carapace de tortue. Elles utilisent l’a’dam, une laisse magique qui fait des damanes des esclaves, et ces dernières portent un collier venant visuellement renforcer leur place dans la société. Ce souci du détail dans La Roue du Temps est la preuve, s’il en fallait, que les costumes racontent aussi l’histoire des personnages.

La deuxième saison de La Roue du Temps est actuellement diffusée sur Prime Video.