Allan Petre, le jeune prodige français de 24 ans qui a réussi à intégrer la Nasa

Talents of tomorrow 2024 by Konbini

Allan Petre, le jeune prodige français de 24 ans qui a réussi à intégrer la Nasa

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Par Julie Morvan

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Passionné par l’espace depuis son plus jeune âge, Allan Petre a tout fait pour réaliser son rêve d’être ingénieur aérospatial.

Depuis quinze ans, on reçoit des artistes et personnalités mondialement connu·e·s de la pop culture, mais on a aussi à cœur de spotter les talents émergents dont les médias ne parlent pas encore.

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En 2024, après une première édition des Talents of tomorrow, on repart en quête de la relève. La rédaction de Konbini vous propose une série de portraits sur les étoiles de demain, qui vont exploser cette année. Des personnalités jeunes et francophones qu’on vous invite à suivre et soutenir dès maintenant.

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Portrait. Quand je parviens à avoir Allan au téléphone, il est au volant d’une voiture. Ses parents et son frère souffrent tous les trois d’une grosse grippe. Épargné par la maladie, il les ramène à la maison après une consultation collective chez le médecin. “Toute la famille t’entend, là”, plaisante-t-il en me mettant en haut-parleur dans l’habitacle. Je lui demande s’ils vont lui manquer quand il sera parti : “Si je partais pour seulement deux semaines, j’avoue, ils ne me manqueraient pas du tout !” s’amuse-t-il. “Mais là, six mois, ouais, ça va être long.” “Heureusement qu’il y a FaceTime”, me glisse sa maman. Car dans quelques semaines, du haut de ses 24 ans, Allan s’envolera pour la Nasa. Il y intégrera pour six mois le Jet Propulsion Laboratory (JPL pour les intimes), en Californie. Une fierté pour cet habitant de Villemomble (Seine-Saint-Denis), qu’il reconnaît avoir obtenue à force de travail, de détermination – et d’une bonne dose de culot.

Enfant, Allan n’est ni un élève perturbateur, ni un premier de la classe. On lui fait seulement remarquer qu’il est “un peu tête en l’air”. Avant-dernier d’une fratrie de trois frères et une sœur, il retient de son enfance “de très bons souvenirs et des potes pour la vie. C’est pas le coin le plus difficile du 93″. C’est en CE2 qu’il se découvre une passion pour l’espace, lors d’une sortie scolaire pour aller regarder les étoiles. Sa première rencontre avec le télescope le marquera toute sa vie : “J’ai vu Jupiter et j’étais émerveillé”, se rappelle-t-il. “Il y avait quatre petits points lumineux autour, et ça, je m’en souviendrai toute ma vie. J’ai demandé à la maîtresse ce que c’était et j’ai appris que c’étaient les quatre plus grosses lunes de Jupiter, les quatre satellites galiléens. Et je me suis dit : ‘Mais… c’est trop bien, en fait.'”

“J’ai vu Jupiter et j’étais émerveillé”

La tête pleine de questions, il dévore les livres et les documentaires sur l’espace, rejoint le club d’astronomie de son collège… et décide qu’il veut en faire son métier. Son rêve : intégrer la Nasa. “Ça a créé une passion”, reconnaît-il. Bercé par les documentaires Arte – “je pourrais passer ma vie à en mater” –, sa deuxième passion avec le basket, il trouve aussi une idole à suivre avec Kalpana Chawla, une astronaute de la Nasa et ingénieure aérospatiale spécialiste en microgravité. Originaire d’une famille modeste en Inde, elle est la première femme d’origine indienne à être allée dans l’espace, en 1997.

Mais au collège et au lycée, quand il parle de la Nasa à ses profs, on essaie de le dissuader – pour lui éviter de faux espoirs, selon lui. “J’ai eu des profs qui m’ont dit que c’était compliqué, ça m’a un peu découragé.” Et puis il ne connaît personne dans le milieu de l’aérospatiale. Son père est technicien informatique, sa mère agent de restauration dans une école maternelle. “Ils m’ont toujours soutenu”, se rappelle-t-il. “Sans leur soutien, et celui de mes potes aussi, je pense que je n’aurais jamais fait ça.”

Une autre personne l’encourage dans cette voie : son professeur d’histoire du collège. Aujourd’hui, ils sont toujours en contact ; ça va faire plus de treize ans qu’ils se connaissent, calcule Allan. Récemment, il lui a écrit une lettre pour soutenir sa candidature à l’occasion du prix de la Fondation Marcel Bleustein-Blanchet de la Vocation. “Je vais la garder toute ma vie, elle est incroyable”, confie Allan, ému.

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“Des profs m’ont dit que c’était compliqué, ça m’a un peu découragé”

Allan suit un premier DUT, en gestion des entreprises et des administrations, mais le rêve de la Nasa le pousse à se réorienter vers un autre DUT, en génie thermique et énergie cette fois-ci. Commence alors un parcours du combattant contre le temps, la fatigue et la frustration. “Mes parents avaient déménagé en Seine-et-Marne, j’avais deux heures de transport entre Marne-la-Vallée et Ville-d’Avray”, expliquait-il alors au Parisien. “Il y avait des cours où je m’endormais un peu à moitié sous la table”, m’avoue-t-il.

Un rythme soutenu pendant deux ans : réveil à 5 heures, retour à la maison à 21 h 30, un job chez Hugo Boss le week-end pour économiser… “C’est frustrant, parce que tu n’as le temps de rien faire. Les deux pires années de ma vie.” Mi-amusé, mi-sérieux, il les décrit comme les “deux ans de terreur”. Le serrage de dents paie : il intègre l’ISAE-ENSMA, une école d’ingénieurs, à Poitiers, et obtient une alternance chez Ariane. Il touche son rêve du bout des doigts : “Quand j’ai vu que j’avais les deux, je me suis dit que c’était possible. Ça m’a boosté de fou.” Tentant le tout pour le tout, il rassemble alors son courage pour contacter au culot une ingénieure de la Nasa qu’il admire.

“En gros, mon message disait : ‘Bonjour, je suis fan de vous, est-ce que je peux venir travailler avec vous ?'” s’amuse-t-il. “P.S. : petit problème, je ne suis pas américain.” Le geste et le CV d’Allan la convainquent : après avoir passé une sélection, il est accepté pour rejoindre le Jet Propulsion Laboratory de la Nasa en janvier 2024. Tout s’accélère alors : il parle de son parcours sur LinkedIn, un journaliste du Parisien s’y intéresse, il partage l’article… et ne passe pas inaperçu. Macron m’a envoyé un message, j’ai rencontré Bruno Le Maire, j’ai été invité au ministère des Transports et à l’Assemblée nationale”, énumère Allan… “Quand tout un pays te dit que t’es le futur Thomas Pesquet, ça fait bizarre. Oui, il a commencé comme moi en ingénierie aérospatiale à 24 ans, mais on n’est pas pareils, on ne vient pas du même endroit.”

“Il y a plein de gens qui viennent du 93 et qui réussissent, je ne suis pas un cas isolé”

Car Allan est fier de rappeler d’où il vient : le 93. Un département particulièrement visé par les stéréotypes. “À chaque fois que les médias parlent du 93, c’est sur les cités, etc.”, déplore-t-il. “On m’a tellement dit que ouais je viens de Sevran, d’Aulnay, on nous dit qu’on est voués au foot ou au rapJe veux casser ce stéréotype de penser que parce qu’on vient d’une ville compliquée du 93, on n’arrive à rien. Il y a plein de gens qui viennent du 93 ou d’autres départements et qui réussissent, je ne suis pas un cas isolé.”

D’ailleurs, pour le prouver, avant de partir pour les États-Unis, il prévoit justement de raconter son histoire dans une dizaine d’établissements en Île-de-France. “Je pense qu’on n’a pas assez d’avis extérieurs comme ça. C’est toujours bien de les motiver. Si on a envie de faire quelque chose, il faut s’écouter et essayer. Et ne pas avoir peur de dire qu’on vise haut.” Vivre avec un “j’ai essayé” plutôt qu’un “j’aurais dû”.

Le 17 janvier prochain, Allan s’envolera donc vers la Californie, plus précisément Pasadena, là où se trouve le prestigieux JPL. Je lui demande quel mot résumerait le mieux tout ce qui l’attend pour l’année 2024, et il répond sans hésiter : “rêve”. Mais l’ascension est loin d’être finie : au bout de six mois, il compte bien continuer son parcours dans “un grand groupe du spatial américain” – Nasa, Rocket Lab ou Boeing – ou bien intégrer l’ESA, Ariane ou Airbus en France. Son rêve ultime : l’ESTEC, le Centre européen de recherche et de technologie spatiales de l’ESA, basé aux Pays-Bas. Allan est formel : dans dix ans, il compte bien prétendre à une carrière d’astronaute pour représenter la France dans l’espace. “Ça serait tellement d’émotion.” Et pourquoi pas planter le drapeau tricolore sur la Lune ? Bon, pour ça, il doit encore bosser la punchline qu’il devra sortir. En attendant, sa devise, il l’a déjà : “C’est super important de vivre de sa passion.”

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