The Big Short : 7 points que le film a rendus (presque) limpide sur la crise des subprimes

The Big Short : 7 points que le film a rendus (presque) limpide sur la crise des subprimes

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Par Antonin Gratien

Publié le , modifié le

On a dit "presque".

L’effondrement de l’économie pour les nuls. C’est le sous-titre qu’aurait pu accoler Adam McKay à The Big Short. MBS, CDO, notation triple A… Autant de concepts propres au jargon de Wall Street abordés dans cette tragicomédie, et indispensables à la bonne compréhension du sujet du film : la crise des subprimes. Celle qui a conduit à l’ébranlement de l’économie mondiale en 2008, et dont les ressorts demeurent, aux yeux des étrangers au monde de la finance, pour le moins nébuleux.

Avec force mini-sketchs, et dans une veine pédagogique qu’on ne soupçonnait pas au réalisateur de comédies appuyées (Frangins malgré eux, Very Bad Cops…), The Big Short distille çà et là des clefs de compréhension sur la ruine du marché immobilier américain. Voici notre florilège des rouages que The Big Short s’est fait un devoir d’éclairer. Oui, même à destination de ceux qui collectaient les 2/20 en éco.

1. Certains savaient

C’est même le sujet du film. Adaptée du best-seller The Big Short: Inside the Doomsday Machine, l’œuvre suit le parcours d’une grappe de nobodies de la finance ayant anticipé la débâcle du système. Et parier dessus via des transactions à hauteur de plusieurs millions, quitte à passer a minima pour des hurluberlus – le secteur immobilier US étant considéré comme l’un des plus stables du marché, avant la crise de 2008.

2. Le piège des MBS

The Big Short débute en introduisant Lewis Ranieri, un courtier en obligations considéré comme l’inventeur des “MBS” (mortgage-backed securities). Ces créances hypothécaires titrisées (en français), aujourd’hui considérées comme la bombe à retardement de la crise de 2008. Grosso modo, puisqu’un prêt immobilier isolé n’intéressait pas les investisseurs (le risque étant trop concentré, car il dépendait des capacités de remboursement d’une seule personne), Lewis Ranieri a eu l’idée de regrouper plusieurs prêts en un seul produit financier dans les années 1970. Ainsi, le risque est dilué. Et paf, ça donne des MBS.

3. The “tranche”

Cette notion est illustrée avec un jenga dans l’une des plus célèbres scènes du film, où Jared Vennett (Ryan Gosling) s’efforce de prouver à son audience que le système est à deux doigts de l’éboulement. Les MBS sont découpées en tranches, et notées entre triple A (pour les personnes les plus aptes à rembourser les prêts) et B (les moins aptes) par des agences de notation. Ce que l’on appelle les “subprimes” ce sont les tranches risquées, c’est-à-dire entre B et double BB.

4. L’astuce des CDO

Que faire des “invendus”, ces tranches si peu fiables que personne n’en veut ? Eh bien, elles sont regroupées en obligations adossées à des actifs (CDO), des ensembles où les MBS les plus pourris du panier sont mélangés à d’autres MBS, et abusivement notés triple A par des agences. Ils passent donc pour des biens ultra safe auprès des investisseurs. Vous voyez le danger arriver.

5. Les achats de CDS, un pari gagnant

Et les protagonistes de The Big Short aussi. Du coup, ces petits futés achètent des CDS (credit default swap), c’est-à-dire des contrats d’assurance, sur les MBS et les CDO en misant sur un non-remboursement massif des prêts à courte échéance. Michael Burry (Christian Bale) est le premier, dans le film, à utiliser ce stratagème au premier abord démentiel – en 2005, contracter ces CDS n’a aucun sens puisque les emprunts sont remboursés.

Sauf que. À partir du moment où les défauts de paiement montent en flèche, les CDS gagnent en valeur. Logique, tout le monde est alors à la recherche de police d’assurance. Ce qui permet à Michael Burry et une poignée d’autres fines mouches d’encaisser des centaines de millions en revendant leur contrat au bon moment : 2008.

6. À l’origine du fléau : les subprimes

Elles ont été accordées à partir des années 2000 aux Américains qui ne remplissaient pas les conditions pour souscrire à un emprunt immobilier classique. The Big Short illustre les abus et périls de cette mécanique lors d’une visite de Mark Baum (Steve Carrell) auprès de courtiers hypothécaires. On y apprend notamment que des prêts sont accordés sans même que les revenus des contractants ne soient pris en ligne de compte. Leur accès au crédit est souvent gagé sur la valeur de leur bien immobilier (qui ne cesse de grimper). C’est simple : n’importe qui peut bénéficier de ce prêt. Résultat…

7. Catastrophes en cascade

Au fil des années, l’endettement des Américains progresse, et les taux de remboursement aussi. À tel point que nombre de ménages sont contraints de vendre leur maison pour être solvables. Problème : à une période où tout le monde croule sous les dettes, plus personne ne peut acheter de maisons. Certains quartiers se métamorphosent soudain en désert. Des millions d’Américains se retrouvent sans logement, les banques subissent de plein fouet la dévalorisation de l’immobilier.

C’est la “crise des subprimes”, qu’Adam McKay s’est fait un malin plaisir de critiquer tout en offrant, au passage, une petite leçon de finance au grand public. Histoire de rendre le système économique moins opaque et de tirer la sonnette d’alarme sur les travers d’un système qui pourrait bien, à nouveau, mettre le monde genoux.