Équipe de France ou du Sénégal ? Ragnar Le Breton, Patrice Evra… Sur Prime Video, tout le monde pousse le “Numéro 10” à trancher

Cornélien

Équipe de France ou du Sénégal ? Ragnar Le Breton, Patrice Evra… Sur Prime Video, tout le monde pousse le “Numéro 10” à trancher

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Par Antonin Gratien

Publié le

En l'espace d'une folle nuit, un binational passé maître du ballon rond doit faire le choix douloureux auquel se sont confrontés tant d'athlètes avant lui.

Même Zizou a dû s’y coller. Eh oui, une fois propulsés sur la rampe du succès, tous les sportifs détenteurs (d’au moins) deux passeports tombent sur le même casse-tête : quel pays représenter, en sélection nationale ? Une question épineuse, qui relève à la fois de l’intime et du politique. À qui être “fidèle” ? Comment faire en sorte que sa décision ne prenne pas la tournure d’une “trahison” ? Bref, c’est au sujet hautement sensible de la binationalité que s’attaque frontalement Numéro 10. Le premier long-métrage de David Diane, notamment connu pour avoir piloté une partie des épisodes de Validé, qui retrace, sur fond de manigances et de tension sociales, les hésitations d’un jeune prodige du foot, tiraillé entre la France qui l’a vu naître, et le Sénégal d’où son père est d’origine. Focus.

L’impossible décision

Est-ce un hasard ? Petit, Ousmane Diallo (Ibrahima Diallo) s’entraîne avec le cultissime maillot n°10 de Zidane sur les épaules. Et n’hésite pas à l’affirmer haut et fort : après son illustre modèle, ce sera lui, le futur “champion du monde”. Quel culot. Mais il faut dire que le gamin du 93 a du talent, beaucoup de talent. À tel point qu’il quitte vite l’horizon morose des tours HLM pour poursuivre son ascension, depuis la ligue 2 sous les couleurs du FC Metz jusqu’à l’explosion à l’international, du côté de l’AC Milan.

Alors voilà. À 20 ans, Ousmane plane. Il vient de rentrer un ciseaux en finale de la Champions League et les commentateurs, qui le portent tous aux nuées, l’assurent : le maestro de la pelouse est définitivement passé de “petit gamin de banlieue parisienne à star planétaire”. La preuve, notre vedette a 96 d’attaque sur FIFA (“à ce niveau là c’est plus un joueur, c’est un bug”, s’agace un pote) et certains couples décident carrément d’appeler leur futur bambin Ousmane-Diallo. En hommage, quoi. C’est dire.

D’évidence, le nouveau visage du foot hexagonal a un boulevard devant lui. Mais qui le conduira où, exactement ? Allez savoir. Les matchs de qualifications pour la coupe du monde approchent à grands pas, et Ousmane n’a toujours pas révélé avec quelle équipe il s’apprête à jouer. “T’es dans la sauce toi, hein ?”, s’amuse Patrice Evra (dans son propre rôle) au moment de rencontrer le jeune prodige. Et “tonton Pat” ne croit pas si bien dire.

Une identité morcelée

Ousmane est tiraillé. Alors que son manager à la réputation carnassière (Ragnar Le Breton) l’imagine déjà dans le bus de l’équipe de France, en digne héritier de Zizou, son père, sénégalais, attend de lui qu’il rejette le maillot bleu-blanc-rouge, pour “soutenir” l’Afrique de ses origines. 

Alors que notre vedette pensait sa décision arrêtée, une révélation fracassante vient rebattre les cartes. Le temps d’une nuit, et dans l’attente d’aller au rendez-vous de presse où il est censé rendre public son choix définitif, le joueur, accompagné de son fidèle pote d’enfance Ilyes (Ilyes Djadel), essaie de recomposer la mosaïque du passé. Tout en étant constamment balloté entre des attentes qui le dépassent.

Il y a la pression des potes de quartier, pour qu’il ne soutienne pas cette France qui les a tant discriminé. Et puis il y a, aussi, le poids des secrets familiaux. Du matraquage médiatique, de la trahison d’un proche. Surtout, alors qu’il ne se rêve pas en activiste “à la Mohamed Ali”, Ousmane est contraint de politiser son choix, auprès de commentateurs qui le taxent d’avance “d’ingratitude”, dans le cas où le joueur jouerait pour les lions du Sénégal. Racisme, violences policières, fossé de richesses…

À partir des incertitudes de son héros, Numéro 10 livre un commentaire social sur les tensions qui traversent, encore, le pays qui avait un jour rêvé de la communion “black-blanc-beur”. C’était en 1998. Une France en liesse venait de décrocher sa première coupe du monde – grâce à une sélection métissée.