Minsk et Varsovie s’écharpent depuis des semaines sur la question migratoire, le président biélorusse Alexandre Loukachenko étant accusé par l’UE d’orchestrer l’arrivée de cette vague de migrants et de réfugiés en réponse aux sanctions européennes décidées à l’encontre de son pays après la répression brutale dont l’opposition a été victime.
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Colère des Occidentaux
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a à cet égard appelé lundi les États membres de l’UE à donner leur feu vert à de nouvelles sanctions. “L’instrumentalisation des migrants dans un but politique est inacceptable”, a-t-elle jugé dans un communiqué. Outre une extension des sanctions contre le régime de Minsk, elle souligne que l’Union européenne “va examiner comment sanctionner les compagnies aériennes de pays tiers” qui acheminent les migrants en Biélorussie.
De son côté, l’Allemagne a appelé mardi l’Union européenne à “faire front commun” pour pallier la situation, assurant par la voix de son ministre de l’Intérieur, Horst Seehofer, que “la Pologne ou l’Allemagne ne peuvent pas faire face à ceci toutes seules”.
Une réaction similaire des États-Unis
Les États-Unis “condamnent fermement l’exploitation politique et la manipulation de personnes vulnérables par le régime” biélorusse, par la voix du porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.
“L’utilisation des migrants par le régime Loukachenko en tant que tactique hybride est inacceptable”, a également mis en garde l’Otan, appelant la Biélorussie à “respecter le droit international”.
La Biélorussie dément ces accusations
Ils ont tenu “à mettre en garde à l’avance la partie polonaise contre l’utilisation de toute provocation” contre la Biélorussie “pour justifier d’éventuelles actions belliqueuses illégales” contre les migrants, a indiqué dans un communiqué le ministère des Affaires étrangères.
Minsk a dénoncé le “mépris de longue date de Varsovie pour la réalité objective, et ses approches dignes de la politique de l’autruche pour résoudre des problèmes graves”, ainsi que les “tentatives intenables” de la Pologne de “rejeter sur la Biélorussie la responsabilité” de la crise migratoire à la frontière. “Le ministère polonais de la Défense ne cherche pas une résolution constructive de la question et porte délibérément la situation conflictuelle actuelle à un niveau politique”, a encore indiqué Minsk.
Selon le ministre de l’Intérieur Ivan Koubrakov, cité par l’agence d’État Belta, les migrants, principalement originaires du Moyen-Orient, se trouvent sur le territoire biélorusse “légalement” et il n’y a “aucune violation de la loi” de leur part. Des milliers de migrants se sont retrouvés depuis lundi à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne avec l’espoir de pénétrer dans l’UE.
S’inquiétant d’une augmentation des traversées illégales qui durent depuis des semaines, Varsovie a déployé un important dispositif militaire. Lundi soir, l’attaché de défense de l’ambassade biélorusse à Varsovie, Alexeï Bortnik, s’est par ailleurs entretenu avec des représentants du ministère biélorusse de la Défense à propos d’accusations de “violation de la frontière polonaise par des militaires biélorusses et de leur implication dans la crise migratoire”, selon Minsk.
“Aucune preuve enregistrée au moyen d’un contrôle objectif n’a été présentée sur le bien-fondé de ces affirmations”, a assuré le ministère biélorusse de la Défense. La Biélorussie a également estimé que le déploiement de milliers de soldats polonais à la frontière constituait une “une activité militaire substantielle” et une “violation des accords bilatéraux” car Minsk n’en a pas été notifié.
“Rien d’agressif”
Ces accusations ont été balayées par les autorités biélorusses. “Tous ces gens, dont des femmes et des enfants, ne présentent aucune menace pour la sécurité et n’ont rien d’agressif”, a rétorqué un responsable des gardes-frontières biélorusses, Anton Bychkovsky.
Les gardes-frontières biélorusses avaient auparavant confirmé dans un communiqué qu’“un grand groupe de réfugiés transportant des effets personnels se [déplaçait] le long de l’autoroute vers la frontière avec la Pologne”. “Selon ces réfugiés, ils se sont rassemblés pour former un groupe assez large et empêcher leur expulsion forcée par la Pologne et attirer l’attention de la communauté internationale sur le non-respect des droits de l’Homme en Pologne”, a ajouté M. Bychkovsky.
Des médias polonais ont cependant diffusé des interviews de migrants contredisant cette version et expliquant que les Biélorusses les forcent à franchir la frontière.
Des dizaines de vidéos diffusées sur les réseaux sociaux
La police aux frontières polonaise a diffusé des vidéos sur Twitter montrant des migrants, principalement originaires du Moyen-Orient, munis de cutters et de branches pour essayer de forcer le passage de la frontière, hérissée de barbelés coupants, tandis que des policiers polonais en tenue anti-émeute veillaient au grain.
La situation se détériore depuis fin août et a poussé la Pologne à ériger une clôture de barbelés et à instaurer un état d’urgence empêchant la présence de médias dans la zone, en plus de masser des milliers de soldats. Au moins dix migrants sont morts jusqu’à présent dans la région, dont sept du côté polonais de la frontière, selon le quotidien polonais Gazeta Wyborcza.
Konbini news avec AFP