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L’individualisation de l’allocation aux personnes handicapées une nouvelle fois rejetée par les députés

L’individualisation de l’allocation aux personnes handicapées une nouvelle fois rejetée par les députés

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Manifestation à Paris, juin 2021. © Xose Bouzas / Hans Lucas via Reuters Connect

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Par Astrid Van Laer

Publié le

Aujourd’hui, certaines personnes handicapées sont amenées à devoir choisir entre vivre en couple et conserver leur allocation.

Jeudi soir, l’Assemblée nationale a de nouveau dit non à une individualisation de l’allocation aux adultes handicapés, réclamée par les oppositions au nom de la “justice sociale”, mais repoussée par la majorité qui a pointé des visées électoralistes.

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La proposition de loi contenant cette mesure sensible était examinée en troisième lecture lors d’une “niche” dédiée aux textes du groupe PCF. La “déconjugalisation” de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) consiste à calculer l’AAH sans tenir compte des revenus du conjoint, contrairement à ce qui est fait aujourd’hui.

Ses tenants, de la gauche à la droite en passant par le groupe Agir allié de la majorité, ont rappelé que certaines personnes handicapées sont amenées à choisir entre vivre en couple au risque de voir leur allocation diminuer, ou la conserver mais en renonçant sur le plan légal à leur union. “Ce prix de l’amour est inacceptable” et la règle en vigueur “contraire à la plus élémentaire humanité”, a martelé le rapporteur PCF Stéphane Peu.

Victime de cette situation, Stéphanie Simon, représentante départementale de l’APF France handicap, atteinte d’une maladie neuromusculaire, se bat depuis plusieurs années pour que ce mode de calcul soit modifié. Cette mère de famille mariée depuis 23 ans, à laquelle on a suggéré de faire un faux divorce pour toucher son allocation, nous avait expliqué son combat. Elle aussi fustigeait le “prix de l’amour”.

Le gouvernement s’y oppose

“Nous ne lâcherons pas”, a assuré le député LR Aurélien Pradié, qui avait aussi porté le sujet en octobre devant l’Assemblée.

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La majorité LREM-MoDem s’est quant à elle interrogée sur “le sens” de cette proposition sur l’AAH “à quelques mois de la présidentielle”, et a invité ces opposants à la porter dans la campagne. Le gouvernement est contre la “déconjugalisation” qu’il juge inéquitable, car bénéficiant aux modestes comme aux fortunés.

Il la présente aussi comme une “impasse” de nature à remettre en cause “l’ensemble du système de protection sociale français fondé sur la solidarité familiale et nationale”, une position maintenue dans l’hémicycle par Sophie Cluzel, la secrétaire d’État aux Personnes handicapées.

“Je ne vois nulle part de justice sociale”, a-t-elle répété, évoquant par exemple les personnes handicapées assumant financièrement leur famille et qui pourraient perdre l’allocation en cas de déconjugalisation.

La majorité a voté via le budget 2022 une formule jugée “plus redistributive” : un abattement forfaitaire de 5 000 euros sur les revenus du conjoint, soit un gain moyen estimé à 110 euros mensuels pour 120 000 couples à partir du 1er janvier. “Ce gouvernement met en place des droits réels, non de l’incantatoire”, selon Sophie Cluzel.

La proposition de loi, vidée de sa mesure phare, peut retourner pour une troisième lecture devant le Sénat à majorité de droite, qui avait voté encore en octobre très largement en faveur de la “déconjugalisation”. Mais il faudrait un accord de l’Assemblée pour une adoption définitive de la mesure.

D’un montant maximal de 904 euros mensuels, l’AAH, destinée à compenser l’incapacité de travailler, compte aujourd’hui plus de 1,2 million de bénéficiaires, dont 270 000 sont en couple.

Konbini news avec AFP

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