+ 2° C pour la planète : la faute à “l’or 2.0” ?
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(© Caiaimage/Adam Gault)
Quand on parle du réchauffement climatique, on pense immédiatement à l’industrie ou aux transports. Moins évident, le bitcoin semble aussi faire partie des coupables. Deux études simultanées viennent de paraître sur le sujet. Elles apportent un éclairage nouveau sur les cryptomonnaies, qui seraient en réalité un gouffre énergétique et qui pourraient conduire la planète à dépasser le seuil fatidique des +2 °C de réchauffement.
Le bitcoin, monnaie électronique basée sur des algorithmes mathématiques, n’a pas de support physique (hormis les disques durs des ordinateurs) et ne répond à aucune autorité centralisée. Pour valider les transactions, il repose sur un système informatique théoriquement inviolable soutenu par des “mineurs” qui doivent résoudre des équations mathématiques.
Pour cela, il faut une puissance de calcul considérable et extrêmement énergivore. Et plus les transactions sont nombreuses, plus les calculs sont complexes et plus les besoins en puissance informatique (et donc électrique) sont importants.
Dans le monde merveilleux de la cryptomonnaie, seuls les “mineurs” ayant résolu les équations mathématiques en premier seront rémunérés. Cela signifie que de nombreuses machines fonctionnent inutilement. Et si la généralisation de cette monnaie virtuelle inquiète les experts du climat, c’est aussi parce que la majorité du système informatique est basée en Chine, où plus de 60 % de l’électricité produite provient de centrales à charbon qui émettent énormément de CO2.
La consommation annuelle de l’Autriche
De précédents travaux avaient déjà alerté sur la demande énergétique du bitcoin. Le site spécialisé Digiconomist avait notamment publié quelques chiffres clés en comparant par exemple le bitcoin à d’autres systèmes de paiement : payer en bitcoin plutôt qu’avec une carte Visa coûterait 460 000 fois plus d’énergie. Toujours selon Digiconomist, la demande énergétique de la cryptomonnaie correspond à la consommation annuelle d’un pays moyen comme l’Autriche, soit dix à vingt fois plus que tous les data centers de Google.
Deux nouvelles études viennent confirmer les hypothèses déjà avancées. Dans une première étude publiée fin octobre dans Nature Climate Change, une équipe de chercheurs de l’université de Hawaï a calculé que l’usage du bitcoin a émis 69 millions de tonnes de dioxyde de carbone en 2017, alors qu’il ne représentait que 0,03 % des 300 milliards de transactions dématérialisées effectuées dans le monde.
La seconde étude publiée lundi 5 novembre dans Nature Sustainability, a quant à elle comparé le coût énergétique de la cryptomonnaie à celui des métaux précieux. Conclusion : cet “or 2.0” consommerait plus d’énergie que l’extraction d’or véritable, de cuivre, de platine ou de terres rares pour produire la même valeur marchande.
Si le bitcoin venait à être adopté par l’ensemble de la société mondiale, il pourrait donc, d’ici à 16 ans, faire grimper à lui seul le thermomètre mondial au-dessus des fameux +2 °C dénoncés par les chercheurs du GIEC dans leur scénario catastrophe. En cas d’un avénement plus lent de la cryptomonnaie, le délai serait de 22 ans.
Mais comme l’a indiqué au Monde Michel Berne, économiste à l’Institut Mines-Télécom Business School, ces conclusions “ne tiennent qu’à une seule hypothèse, cruciale : celle que le bitcoin sera la cryptomonnaie de référence de l’avenir”. Un impact qui est donc à nuancer puisque personne ne peut prévoir le cours du bitcoin dans le futur, de nombreux chercheurs ayant prédit une explosion probable de la bulle de la cryptomonnaie.