Un couac qui fait désordre : après la fronde du MoDem, l’Assemblée nationale a finalement adopté dans la nuit de mardi à mercredi le projet de loi de sortie progressive de l’état d’urgence modifié et son controversé “pass sanitaire”.
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Le gouvernement a été contraint de revoir l’article premier du texte, rejeté en fin de journée par l’Assemblée, y compris par le MoDem, pourtant membre de la majorité. En guise de gage aux alliés centristes, l’exécutif a accepté d’écourter la période de transition pendant laquelle des restrictions de libertés restent à sa disposition face à la pandémie, du 2 juin à fin septembre, plutôt que fin octobre.
Ainsi réécrits, l’article premier et le projet de loi, voté par 208 voix contre 85, ont été adoptés en première lecture. Le Sénat s’en emparera en séance le 18 mai. “Le gouvernement n’est pas sourd au message qu’a envoyé la représentation nationale cet après-midi”, a lancé le ministre de la Santé Olivier Véran, dans un brouhaha interrompu par des suspensions de séance successives.
“La majorité a volé en éclats” durant ces débats, a pour sa part tonné l’UDI Pascal Brindeau. Les discussions de la journée avaient en effet tourné au camouflet pour le gouvernement, contraint de demander cette seconde délibération nocturne.
“Il n’y a pas eu de dialogue et d’écoute” sur “les lignes rouges” du texte, au sein de la majorité, avait déploré l’élu MoDem Philippe Latombe. Des négociations ont eu lieu en soirée pour “trouver un accord” et “régler ce problème”, comme l’avait annoncé le Premier ministre sur France 2.
Outre la période de transition jusqu’à fin septembre, l’article premier du projet de loi permet au Premier ministre de continuer à prendre des mesures de couvre-feu jusqu’au 30 juin inclus, entre 21 heures et 6 heures maximum, et surtout instaure un controversé “pass sanitaire”, qui n’a, lui, pas été modifié.
“Deux ministres au banc qui ont passé beaucoup de temps sur leurs portables”
Introduit par le gouvernement en commission, il était au cœur des crispations, même si les groupes MoDem ou LR ne sont pas opposés à son principe. Cet outil doit subordonner l’accès des grands rassemblements ou de certains lieux à la présentation d’un résultat négatif de dépistage du virus, ou bien un justificatif de vaccination, ou encore une attestation de rétablissement après une contamination.
Pour les grands rassemblements nécessitant le “pass”, une jauge à 1 000 personnes a été promise par le gouvernement, mais sans être inscrite dans le marbre de la loi. La publication d’une interview au Parisien du Premier ministre n’a rien arrangé. Jean Castex y a en effet annoncé qu’au cinéma ou au spectacle, “la règle sera 1 siège sur 3, avec un plafond de 800 personnes par salle”.
Pour le MoDem, la rédaction de cette disposition dans l’article 1 était trop “floue”. À l’unisson avec les oppositions, il réclamait davantage de précisions au regard de son périmètre et de ses critères d’application tels que la surface, la densité, si l’événement a lieu en extérieur ou en intérieur, etc.
Le groupe centriste espérait aussi une réouverture des discothèques début juillet, avec pass sanitaire, mais n’a pas eu gain de cause à ce stade, le gouvernement promettant au secteur une “clause de revoyure” en juin.
Outre le fond, la forme des débats a particulièrement exaspéré les députés, qui ont pointé du doigt une attitude jugée désinvolte voire méprisante du ministre de la Santé Olivier Véran et du secrétaire d’État à la transition numérique Cédric O, lundi soir.
“On a eu un rapporteur absent qui lisait ses fiches et deux ministres au banc qui ont passé beaucoup de temps sur leurs portables”, a taclé le MoDem Bruno Millienne.
Au point qu’une source parlementaire estime que le lâchage des alliés centristes n’est pas lié à une mesure précise du texte, mais à une “accumulation de frustrations” des élus MoDem dans la majorité, alors que des propositions qui leur tenaient à cœur comme la proportionnelle aux législatives 2022 semblent enterrées.
Mardi, durant les débats, les députés ont par ailleurs rétabli sur une durée plus longue la possibilité de confinements locaux et un état d’urgence territorialisé durant l’été, en cas de flambée épidémique, entre le 10 juillet et le 31 août.
Konbini news avec AFP