À la radio, sur YouTube ou dans la rue : le sexisme sous toutes ses formes se porte très bien

À la radio, sur YouTube ou dans la rue : le sexisme sous toutes ses formes se porte très bien

Le dernier rapport du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes est édifiant.

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Manifestation du mouvement #MeToo à Paris, le 27 janvier 2018. (© Lisa Miquet/Konbini)

Les insultes “salope”, “pute” et “connasse” se portent malheureusement comme des charmes. En 2017, une femme sur vingt a subi ces injures sexistes. Pourtant, elles n’ont été que 3 % à déposer plainte. Un chiffre compréhensible au regard du taux d’efficacité des plaintes : seulement une sur cinq aboutit à une condamnation.

C’est l’un des constats édifiants du rapport publié par le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE), qui rend public ce jeudi son premier état des lieux du sexisme en France. “Quatre femmes sur 10 indiquent avoir dernièrement été victimes d’une injustice ou d’une humiliation du fait d’être une femme”, épinglent les auteurs du rapport.

Discrimination, manspreading, assignation à la maternité, représentations stéréotypées, coups, agressions, viols, mutilations sexuelles, féminicides… les manifestations du sexisme, de la plus symbolique à la plus grave, sont multiples.

Le rapport met notamment en lumière une manifestation du sexisme “perçue comme banale” et bénéficiant d’une “grande tolérance sociale” : l’humour. On se souvient de la blague de Tex, l’ancien animateur de France 2, qui avait lancé dans son émission Les Z’amours : ” Les gars, vous savez ce qu’on dit à une femme qui a déjà les deux yeux au beurre noir ? On ne lui dit rien, on vient déjà de lui expliquer deux fois !”

Le sexisme comme ressort comique a le vent en poupe

Et bien, il est loin d’être le seul. Dans les vidéos de youtubeurs, à la radio, ou encore sur les sites de blagues en ligne, on “rit souvent des femmes… mais sans les femmes”, explique le HCE, qui rapporte que 71 % des chroniques radio mobilisent des ressorts sexistes. Dans cinq vidéos sur dix des deux youtubeurs les plus populaires, à savoir Cyprien et Norman, “au moins un ressort sexiste est mobilisé”. Exemple avec une vidéo intitulée “Meufs = Ovnis”, par exemple :

Souvent, les femmes sont caricaturées : agressives, en compétition les unes avec les autres, naïves, incompétentes, stupides… Il y a l’embarras du choix. Mais une forme de tolérance vis-à-vis de l’humour sexiste est de plus en plus présente, légitimant le sexisme. “Cette tolérance contribue, pourtant, à consolider l’entre-soi ‘masculin’, à entretenir un climat d’hostilité contre les femmes et entre femmes elles-mêmes”, déplore le HCE.

Les youtubeuses Maud Bettina-Marie et Juliette Tresaninis sont récemment venues nous parler du sexisme sur la plateforme de vidéos en ligne. “À l’heure où l’on libère la parole de la femme, pourquoi est-ce qu’on la censure sur YouTube, qui est le média qui touche directement les jeunes ?”, s’interrogeaient-elles, donnant des exemples précis de leur expérience :

Une “idéologie mortifère”

Pour la présidente du HCE, Danielle Bousquet, “le sexisme n’est pas une fatalité et n’a rien de naturel. C’est une idéologie mortifère, qu’il faut combattre avec vigueur”. Le HCE appelle donc à la création d’un plan national contre le sexisme pour 2019-2022, avec cinq axes majeurs : mieux mesurer le sexisme, le faire reculer en permettant de mieux le repérer, condamner davantage les auteurs, accompagner les victimes et garantir une action publique exempte de tout sexisme.

Récemment, la documentariste Léa Domenach, qui a réalisé L’École du genre, est venue nous parler du sexisme dans les catalogues de jouets pour enfants, qui modèle les esprits dès l’enfance. “Tout est fait pour que l’on achète les jouets en fonction du genre de l’enfant”, expliquait la jeune femme qui appelait à combattre au plus vite ces stéréotypes, qui s’accentuent à mesure que les enfants grandissent et permettent au sexisme de perdurer.