Toutes ces (incroyables) vieilleries qui existent encore malgré l’avancée technologique

Toutes ces (incroyables) vieilleries qui existent encore malgré l’avancée technologique

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Photo by Bernard JAUBERT / ONLY FRANCE / Only France via AFP

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Par Matéo Vigné

Publié le

Et on y tient à toutes ces petites vieilleries mine de rien.

Chaque matin, je me réveille avec l’impression d’avoir pris 10 ans dans la gueule. Ce sentiment de ne plus réussir le moindre petit geste qui paraissait pourtant si banal la veille. Ce sentiment qui se poursuit généralement au fil des minutes, du moment où l’on quitte son lit jusqu’à la première réelle action productive de la journée. Cette sensation qui pousse à se demander si l’on n’est pas simplement bon pour la casse. Et puis je bois une tasse de café et tout va mieux, cette micro-angoisse passe, je peux me mettre en branle, enfiler mon vieux futal corpo, lacer ces pompes qui font à la fois correctes et “cool” et partir bosser pour vraiment lancer ma journée.

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Ça fait quelques semaines que sur le chemin du bureau mon regard se perd devant ces mêmes enseignes qui n’ont pas bougé depuis que j’habite ici. Ces mêmes gueules à la fois familières et étrangères, ces mêmes personnes qui s’attellent à reproduire tous les matins, comme moi, la même activité. Et ce depuis belle lurette.

Parfois cette sensation n’est qu’anodine, mais elle suscite souvent en moi quelque chose de profond, voire de nostalgique. Surtout quand j’arrive devant cette agence de voyage à l’enseigne vintage à la typo Branco (vous savez, les lettres du magazine Thrasher), qui faisait sûrement cool et branchée à l’époque, tombée aujourd’hui dans une désuétude quasi ringarde. Je me remémore ce dernier voyage que j’ai réservé en deux clics sur Google Flights à la pause déjeuner depuis mon smartphone, et ça me fait réfléchir. Je ne suis probablement pas le seul à m’être posé la question : “Comment ces types arrivent à faire tourner leur commerce malgré l’hégémonie technologique de ces dernières décennies ?” D’un coup, cette question s’est mise à revenir à chaque fois que je remarquais autour de moi d’autres des business dans la même veine, dont la longévité est à la fois louable et surprenante.

Sans tomber dans une analyse classiste ni technologiste, ni dans la délation au profit de la digitalisation contre les artisans du monde d’avant, je me suis dit que j’allais lister tous ces stakhanovistes du métier et du service. Si l’horloge parlante de chez Orange, les Pages Jaunes papier ou encore MySpace nous ont quittés depuis peu, j’ai compilé toutes ces choses, tous ces brols, toutes ces passions (peut-être), qui existent encore aujourd’hui malgré le progrès technique (et qui y ont survécu).

Les vidéo clubs

Et par définition les producteurs de DVD / VHS à mettre dans le même panier. Hulu, Netflix, Disney+, HBO, les bouquets Canal+, TF1+ ou encore Auvio et Streamz (pour nos amis belges), j’en passe. La liste est longue, peut être même trop longue, pour savoir où donner de la tête en matière de vidéo à la demande.

Si votre enfance a précédé l’arrivée du streaming, il est fort probable que vous ayez connu l’excitation précédant la sortie d’un film en VHS ou DVD, ainsi que la déception de découvrir qu’il était déjà emprunté, ou encore la frustration d’avoir à payer des frais de retard parce que vous aviez rendu une cassette non rembobinée. Que cette époque vous soit familière ou non, il est peu probable que vous ayez mis les pieds dans un vidéoclub depuis longtemps, quitte à se demander s’il en existe encore. Spoiler alert : la réponse est oui. (Et vous le savez sûrement si vous suivez Konbini sur Youtube). D’ailleurs, si votre partenaire fait partie des derniers cinéphiles à encore fréquenter ces lieux, ne doutez plus il/elle est vraiment une personne fidèle.

Pour info, il reste encore un Blockbuster, il se trouve à Bend, dans l’Oregon.

Les magasins de jeux vidéo

Même remarque que pour les vidéo clubs.

Les cabines téléphoniques

L’utilisation du téléphone fixe se fait de plus en plus rare parmi les ménages français. Selon l’INSEE, entre 2018 et 2021, la part de la population équipée d’un téléphone fixe est passée de 87 % à 77 %. Les personnes équipées se servent de moins en moins de leur téléphone fixe. Alors qu’en est-il des cabines ?

Le pic d’activité des cabines téléphoniques arrive en 1998 avec un nombre maximal de 241 000 cabines sur le territoire français. L’an dernier, il n’en restait plus que 4, couvrant essentiellement les zones blanches. On vous épargne les spécificités de chaque pays concernant ces drôles de stations de communication, ceci étant, si vous vous demandez encore comment dans certains films les personnages pouvaient recevoir un appel entrant dans l’une de ces cabines, c’est grâce à un numéro fixe qui lui est affecté et qui est affiché à l’intérieur. Réponse simple, mais pas forcément cohérente pour chaque scénario.

Groupon

Avec l’avènement des ventes privées, l’importation du système du black friday ou encore les faux deals à pertes que certaines entreprises pratiquent dans une logique ultra-capitaliste et néolibérale, qui utilise encore Groupon ? Même si elle a perdu 99,4% de sa valeur initiale, l’entreprise américaine fondée par Andrew Mason était capitalisée à plus de 103 millions de dollars en 2023. Je répète ma question, qui utilise encore Groupon ? Dites qui.

Le chèque

Bon, on avait dit pas de coup de gueule, mais je ne regrette pas sa disparition progressive. Pour toutes ces fois où l’on s’est sentis bêtes au moment de libeller correctement, bugant pour écrire en toutes lettres “deux-cent-quatre-vingt-treize euros et soixante-cinq centimes” dans le libellé.

Cocorico, spécificité française. Selon une étude de 2020, la France domine l’utilisation des chèques en Europe avec 86 % des émissions de chèques dans l’UE, loin devant l’Italie et les autres pays. Malgré cela, les transactions par chèque ne représentent que moins de 4 % des paiements en France en 2021, comparé aux 57 % effectués par carte bancaire. Avec l’arrivée des QR et la démocratisation des virements instantanés, il est probablement temps de passer à autre chose. Goodbye my friend.

Copains d’avant

Facebook.

Le porte-à-porte

Sur Reddit, un utilisateur résume bien ce ressenti que tout le monde partage : “Si votre boîte fait appel à des vendeurs qui font du porte-à-porte, c’est soit que vous ne savez pas comment commercialiser votre produit soit qu’il s’agit d’une grosse arnaque.” Bien dit TheHearseDriver. Sorry not sorry les témoins de Jéhovah.

Les courriers publicitaires

Le OG du spam en quelque sorte, tout aussi énervant et polluant. À part les trois flyers qui se tirent la bourre et décorent votre frigo avec le contact d’un dépanneur, d’un livreur de pizzas et d’un marabout-guérisseur-faiseur-de-miracles avec une mise en page WordArt de Windows XP, quel avenir pour les courriers publicitaires ?

La météo à la télé

Ne nous faites pas dire ce qu’on n’a pas dit, gros cœur sur Évelyne Dhéliat, Louis Bodin et Catherine Laborde (pour les anciens) mais à part pour savoir quel temps il fait à Roquefort-la-Bédoule, se farcir des reportages sur d’intrépides baigneurs de décembre ou encore un bon rappel anxiogène qui indique que chaque année les températures de saison sont largement dépassées, ce rendez-vous quotidien aux heures de grande écoute restera un mystère de longévité.

Dailymotion

Non mais honnêtement, qui peut concurrencer YouTube ? Et puis par curiosité, c’est quoi la dernière vidéo que vous avez maté sur Dailymotion ? Personnellement, ça devait être un vlog du youtubeur (désolé Dailymotion) Cyprien / Monsieur Dream en 2010. Ouais, pas ouf.

Les magasins de matelas

Ce n’est pas forcément lié aux avancées technologiques, mais vous ne vous êtes jamais posé la question de comment est-ce que ce type de business reste rentable ? Ce n’est pas comme si on achetait un matelas tous les jours. Des matelas on en trouve en veux-tu en voilà dans chaque magasin de meuble, en ville ou en centre commercial de périphérie. Pourquoi pas des magasins de chaises ? Ou de rideaux ? D’ailleurs, vous avez déjà vu du monde dans ces magasins de matelas ? Honnêtement ? Jamais plus d’un client à la fois, jamais vu de livraisons ni de camions de restockage. C’est louche.

Bref, sans vouloir s’éterniser sur la question, cette liste en étonnera peut-être plus d’un, fera sourire les nostalgiques et surprendra d’autres néophytes à cheval entre les générations X, Y ou Z. Peut-être même que ces quelques mots seront déjà ringards avant la fin de l’année et que nombre de ces points auront cessé d’exister depuis. On en profite pour se demander si ce sont aussi les dernières lignes que l’on écrit, nous journalistes, vu la perte de vitesse que connaît la profession, progressivement remplacée par une IA plus drôle, plus performante et moins coûteuse. Qui sait, en tout cas, loin des logiques d’obsolescence programmée, on leur souhaite une belle et longue (fin de) vie à ces vieilleries.