Warm Up : découvrez Terrenoire, les artisans poètes de la chanson française

Warm Up : découvrez Terrenoire, les artisans poètes de la chanson française

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© Ines Ziouane

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Par Hong-Kyung Kang

Publié le

Dans Warm Up, on réalise un focus sur des artistes dont vous allez (sûrement) entendre parler dans les mois à venir.

Terrenoire, c’est le groupe de chanson française composé de Raphaël et Théo, deux jeunes frères à la chevelure bouclée. Mais Terrenoire, c’est également un quartier calme de Saint-Étienne, dont est originaire le duo. Et à l’image de ce nom qu’on croirait tout droit sorti d’un conte d’heroic fantasy, le groupe nous transporte, avec poésie, à travers des horizons musicaux inexplorés avec son nouveau titre, “Baise-moi”.

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Avec ce nouveau morceau, sorti ce vendredi 17 avril, le duo s’interroge sur la place du désir dans l’existence de chacun. Un thème universel, mais que les deux frères abordent sous l’angle de l’instinct passionnel et non de la pensée raisonnée. Par le biais de paroles qui nous replongent dans nos émois les plus intimes, portés par une mélodie à la fois entraînante et pensive, la musique de Terrenoire réveille nos effervescences les plus incontrôlables.

Konbini | Qui êtes-vous ?

Raphaël et Théo | Terrenoire, Raphaël et Théo, frères de sang.

D’où venez-vous ? Où et quand êtes-vous nés ?

Nous sommes nés à Saint-Étienne, Terrenoire, pour être précis. On a pris notre nom de groupe en hommage à notre quartier d’enfance. On vit à Paris maintenant. Mais on ne peut pas dire qu’on se sente vraiment chez nous “à la capitale”, c’est un paradoxe, Paris, c’est la plus belle ville du monde. Mais on y vit tous les uns au-dessus des autres, remplis de rêves et d’ambition, comme dans des cages à lapin.

Quand et comment avez-vous commencé la musique ?

Théo | On a un oncle musicien, un vrai monstre de la guitare, il m’a appris pendant des années, après les cours. Je n’ai rien imaginé d’autre pour ma vie, je ne faisais que ça, j’ai arrêté de travailler en cours. Ensuite, on a commencé à monter des groupes avec mon grand frère, organiser des soirées dans des petits endroits à Saint-Étienne.

Que faisiez-vous avant ?

Théo | J’ai fait plein de trucs, des petits boulots, des cours de guitare, des textes pour les autres, j’ai même travaillé pour une boîte de prod télé en arrivant à Paris : je découpais des chansons pour qu’elles fassent le bon format, à la chaîne. Depuis, je crois que j’aime bien faire des structures de chansons étranges, pas ultra formatées.

Pourquoi avoir choisi de prendre le nom de votre lieu d’origine comme pseudonyme ?

C’est une forme de fidélité à nos origines, à là d’où on vient. Et puis le nom en lui-même, on trouve qu’il est beau. Terrenoire, écrit collé comme ça, on dirait une histoire. Je suis sûr que tu peux demander à des scénaristes d’écrire l’histoire de Terrenoire, ça peut les inspirer.

Quelles sont vos influences musicales ?

Les influences, les vraies, ça reste tout ce que tu as ingéré à un âge clé. Entre 7 et 20 ans, on dirait. Avec ou sans ton consentement, d’ailleurs… Pour nous, les artistes qui tournaient entre les chambres des frères, ça a été Prince, Bashung, Nougaro, NTM, Doc Gynéco, Radiohead, Flying Lotus, Oxmo Puccino, La Rumeur…

© Ines Ziouane

Comment avez-vous été découverts ?

Le cœur de notre métier, ça reste les concerts. On ne te cache pas qu’en ce moment, les musiciens se posent pas mal de questions. On a fait beaucoup de premières parties : Clara Luciani, Eddy De Pretto, Feu Chatterton!, Voyou. Après, le streaming permet aux artistes d’être découverts par le public. Les interviews, pour les gens qui prennent le temps de les lire, c’est aussi une bonne manière de rencontrer les gens.

Comment décririez-vous votre univers artistique ?

Un journaliste a dit un jour qu’on fabriquait des “chansons aliens”. Ça nous plaît bien. Ce sont des morceaux qui se nourrissent de plein de choses : de pop, de la musique de film, de la trap, des chants choraux, de la bass music. On est en quête d’un son, d’une esthétique qui nous est propre. Ça nous paraît être ça, la raison d’être d’un artiste, de vouloir dire les choses différemment. On gorge notre musique de soleil et de ténèbres, de textes très intimes, on fait passer tout ça dans nos machines, et “boum”, t’as Terrenoire ! 

Quels sont les avantages et les inconvénients d’être dans le même groupe que son frère ?

On traverse les mêmes choses, on a des sensibilités hyper proches. Ça ne coince pas entre nous, ça coule pour être honnête, on a de la chance. Les frères Gallagher sont vraiment honteux pour ça, la famille c’est tout ce qu’on a.

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

On est très inspirés par toute forme d’art et de pensée qui paraît nous aider à nous élever. C’est difficile à exprimer. Mais il y a vraiment des œuvres, des livres, des voix, des spectacles qui génèrent une énergie de vie, c’est comme un souffle très puissant.

Que vouliez-vous représenter dans le clip en dessin animé de “Baise-moi” ?

La lyrics video représente la course du désir entre deux personnes, jusqu’à l’apogée et la transformation. Le dessin a vraiment permis de représenter symboliquement les corps en lévitation, le cosmos, la fusion des corps. Vincent Ehrhart Devay a travaillé hyper vite et bien, tout s’est passé pendant le confinement. C’était une réponse libératrice à l’enfermement et au fait d’être séparé de l’autre.

© Terrenoire

À quoi pouvons-nous nous attendre sur votre nouvel album ?

Ce sont des chansons très intimes, en français, sur des productions qui tendent vers la musique électronique, la trap, la musique de film. Tout ce qui nous inspire peut se retrouver dans nos chansons : nous sommes des monstres, nous avalons tout ce qui passe devant nous. C’est un album assez monumental et exigeant.

Nous l’avons pensé comme un temple à la mémoire de notre père que nous avons perdu avant de commencer à écrire. Nous avons voulu mettre en musique et en mots l’idée de la force de vie face à la mort. Notre travail est de créer des climats autour des textes, pour que tout se présente comme un film, avec ses propres décors et ses silhouettes en arrière-plan. On se fout de savoir si on fait du rap, de la pop, de la chanson. On veut que ce soit unique.

Arrivez-vous à créer malgré le confinement ?

On a fini l’album, donc c’est plus de l’écriture pour soi. On fait des vidéos collectives avec d’autres artistes, avec les voix des gens qui nous suivent. On essaie de ne pas perdre le lien avec le réel.

Vous êtes signés sur quel label ?

Nous avons monté notre label, Black Paradisio, et nous sommes en licence avec Neuve, un tout nouveau label, pour le prochain disque.

Quelles seraient les meilleures conditions pour écouter votre musique ?

On pense que face au soleil couchant sur la route direction l’océan, ça marche bien. Mais on laisse les gens assez libres, nous sommes pour l’auto-gestion du public.

Que diriez-vous aux gens pour les convaincre d’écouter votre musique ?

Vous n’avez jamais entendu un truc pareil.

Vos futurs projets ?

Le grand truc ce serait de partir jouer notre musique un peu partout en France, mais pour l’instant, le projet ne semble pas trop dans l’air du temps avec le virus envahisseur. Donc on trouve des solutions pour survivre. C’est l’idée du disque, c’est l’idée de nos vies aussi en ce moment.

Le mot de la fin ?

Faites tourner “Baise-moi”, notre dernier titre qui vient de sortir. Partagez les artistes, parlez-en autour de vous. Et attendez patiemment chez vous de pouvoir à nouveau faire l’amour avec quelqu’un.