Test : Metro Exodus prouve que les FPS peuvent toujours avoir une bonne histoire

Test : Metro Exodus prouve que les FPS peuvent toujours avoir une bonne histoire

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Par Pierre Bazin

Publié le

Alors que le multijoueur domine le jeu vidéo, le nouveau titre de 4A Games nous rappelle l'importance de la narration.

(© 4A Games)

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Le début de l’année n’est jamais facile pour l’industrie du jeu vidéo. Les ventes de cette période étant toujours marquées par les grosses sorties de la période de Noël, les éditeurs et studios doivent redoubler d’arguments pour convaincre les joueurs de faire chauffer (encore une fois) leur carte bleue. Cependant, le nouveau titre du studio 4A Games a des arguments de poids. En plus, quoi de mieux pour passer l’hiver qu’un jeu dont l’intrigue se déroule intégralement en Russie ?

Singleplayer’s not dead

Metro Exodus est le troisième épisode de la série Metro. Le premier titre, Metro 2033, est sorti en 2010 et est une adaptation du roman éponyme de Dmitri Gloukhovski. Si le premier épisode nous avait bien plu par son ambiance, la recette s’était quelque peu affadie avec le second épisode, Metro : Last Light (2013).

Six ans plus tard, il est temps pour les Ukrainiens de 4A Games de corriger le tir et de prouver que le FPS narratif a encore sa place dans le paysage vidéoludique. À l’instar de ses personnages, Metro Exodus est un résistant, développé dans les sous-sols de la scène vidéoludique pendant cinq longues années.

Alors que Fortnite rapporte des milliards de dollars, qu’Apex Legends s’impose dans l’octogone du Battle Royale et qu’Electronic Arts vient draguer les gamers avec son bruyant Anthem, quelques studios défendent encore corps et âme le FPS solo, celui où les salves de votre arme doivent sonner en rythme avec les punchlines de votre coéquipier.

Le post-apocalyptique semble être de ce côté-là une valeur sûre. Il n’y a qu’à voir le succès des Borderlands ou des Fallout (sans considérer le dernier, qui n’a bien entendu “jamais existé”). Et lorsque l’on regarde l’univers de Metro, tout droit sorti de l’imagination de Gloukhovski, on se dit qu’il y a là un formidable terreau pour des aventures immersives.

<em>“Improvise, adapt, overcome”, </em>comme dirait Bear Grylls. (© 4A Games)

Le gameplay de l’insécurité

La première fois que j’ai lancé Metro Exodus, j’admets avoir péché par orgueil : étant un habitué des survivals et des FPS, j’ai décidé de pousser la difficulté pour augmenter le défi. Quelle ne fut donc pas ma honte lorsque je dus rapidement descendre la barre d’un cran afin de pouvoir continuer plus rapidement mon avancée (et donc ce test), sans avoir à recommencer sans cesse. Metro Exodus n’est pas simple, mais sa palette de niveaux de difficulté le rend intéressante pour tous. Par ailleurs, le titre n’est pas stupidement difficile : il reprend parfaitement l’esprit survivaliste de la franchise.

Entre les filtres de masque à gaz, les medipacks, les couteaux, les munitions et (surtout) les matériaux servant à fabriquer tout cet attirail, vous n’êtes jamais serein dans Metro Exodus. On en viendrait presque à penser que les phases les plus effrayantes de ce jeu sont celles où vous vous rendez compte que vous êtes nu comme un ver au milieu d’une horde de monstres radioactifs ou de brigands peu scrupuleux (mais stupides). La difficulté est notamment déterminée par tous ces facteurs repris plus ou moins bien des anciens épisodes. Si la température n’est plus un problème, les gaz toxiques, la radioactivité et la faible présence de balles et de soins autour de vous le seront bien davantage.

Les principales mécaniques des jeux précédents opus ont été reprises, et pour la plupart grandement améliorées. Il est ainsi très appréciable de pouvoir crafter, sur un établi ou depuis votre sac, tout votre équipement de survivaliste. Si les objets utilitaires (hors armes) sont peu divers, le titre se rattrape à merveille avec toutes ces armes modifiables à l’envie, pour des styles et des approches complètement personnalisables – même si on est tenté de ne s’en tenir qu’à quelques armes, clairement au-dessus du lot.

Une customisation du visuel et du gameplay. (© 4A Games)

Des combats efficaces mais des ennemis pas très malins

Metro Exodus ne vous plonge pas dans son univers : il vous enfonce la tête dans la neige, avec toute la violence que l’on peut attendre d’une Russie post-apocalyptique. Il faut sans cesse faire attention aux dangers qui vous entourent. Les premières heures, on a envie de foncer tête baissée, mais les échecs cuisants qui s’ensuivent nous ramènent bien vite à la réalité. Vous ne pourrez pas toujours tout combattre et vous devrez aussi courir. Ceci dit, c’est plutôt rassurant de voir qu’un FPS peut être autre chose qu’un Call of Duty-like où l’on affronte 50 personnes à la fois.

Malheureusement, bien que les ennemis soient plutôt variés, l’intelligence artificielle est à la ramasse : vous pourrez facilement contrer leur stupidité en réfléchissant deux secondes comme un robot. Notons que cela ne s’applique pas à niveau égal à tous les ennemis. Les créatures radioactives, par exemple, paraissent plus naturelles, car elles attaquent de façon instinctive. En revanche, les ennemis humains (beaucoup plus nombreux dans cet épisode) souffrent d’une IA sommaire, de surdité et même carrément de cécité. Le plus dommage est que l’approche discrète est certes toujours efficace, mais elle est quand même sujette à de nombreux bugs, ce qui pourra parfois vous faire lâcher de rage la manette ou la souris (le jeu est dispo sur PS4, Xbox One et PC).

Du côté des combats, les améliorations sont un peu plus minimes. Metro Exodus a conservé le côté viscéral des affrontements des titres précédents, mais il fait daté par rapport aux FPS actuels. Si comme moi vous êtes un nostalgique, il n’y aura pas de problèmes, mais ne vous attendez pas à une révolution du FPS : la visée et les tirs sont un peu rigides, tandis que la gestion de la santé, bien que plutôt simple à prendre à main, reste très basique et peut même vous donner quelques mauvaises surprises.

Les grottes et autres “donjons” rappellent l’ambiance confinée et angoissante de la franchise. (© 4A Games)

L’ambiance fait le reste

Si mon test s’arrêtait là, vous auriez une piètre image de ce qu’est véritablement Metro Exodus. Il est vrai que techniquement on peut lui reprocher beaucoup de choses, dont quelques éléments de gameplay un peu désuets. Toutefois, la force de cette franchise est avant tout dans son univers, notamment la mise en scène du quotidien d’Artyom, le héros que vous incarnez.

D’abord, sur le plan visuel, le titre est magnifique : les textures ne sont pas d’une qualité extrême, mais les effets de lumières sont à la hauteur de 2019. L’intérêt d’Exodus est aussi de nous faire enfin voyager dans une Russie post-apocalyptique, avec son lot de paysages très variés et ses niveaux construits avec une cohérence artistique encore rare dans le paysage vidéoludique.

La musique et les effets sonores ne sont pas en reste : les thèmes sont saisissants et le sound design est l’un des piliers de l’ambiance – parfois sombre mais aussi plus enjouée par moments, une vraie nouveauté dans la série. Attention cependant, les versions consoles accusent malheureusement un retard d’images par seconde par rapport à la version PC.

Metro Exodus n’est pas un open world, mais il n’est pas non plus un FPS “couloir” dans lequel vous auriez l’impression d’être enfermé sur un chemin unique. Si les premières 30-45 minutes peuvent faire peur, elles ne font finalement qu’office de tutoriel. Une fois le train à vapeur capturé, vous voilà parti pour découvrir des zones plutôt grandes et, surtout, qui se répètent extrêmement peu.

Libre à vous ensuite de faire les quêtes secondaires (ou pas), d’aller visiter un camp de brigands ou une effrayante grotte radioactive. Il y a finalement une vraie place au choix de parcours. Surtout que les choix peuvent influencer des dialogues à venir.

(© 4A Games)

Cette liberté prend tout son intérêt quand elle est mise en relation avec le gameplay survivaliste, vous posant des dilemmes tels que : “Ai-je suffisamment de munitions pour m’aventurer là-bas ? D’un autre côté, ce lieu pourrait me permettre de trouver ou fabriquer plus de munitions.”

De plus, l’interface (le HUD) est extrêmement minimaliste, et toutes les fonctionnalités “classiques” (carte, boussole, journal, etc.) sont intégrées à des objets qui apparaissent devant vous. Ainsi, l’approche organique de fonctionnalités purement vidéoludiques permet de ne jamais lâcher l’ambiance des romans de Gloukhovski.

Enfin, l’histoire a tout pour plaire. L’écriture est probablement la plus grande réussite de ce jeu – ce qui est le plus important dans un jeu solo aussi immersif. Les personnages sont toujours aussi attachants, et malgré leur nombre qui s’agrandit, leurs caractères restent différents sans pour autant sombrer dans les clichés.

En incarnant Artyom, le héros muet, vous allez vous immerger au milieu d’une longue trame de complots, de rebondissements et de retournements de situations, mais aussi de magnifiques moments d’allégresse et d’amour dans votre train-maison.

(© 4A Games)

Résultats : A-

Metro Exodus fait partie de ces jeux à l’ancienne dont la recette est tellement bonne qu’on en redemande toujours un peu. Si la technique et le gameplay sont un peu en deçà de ce qui se fait actuellement, l’ambiance et l’univers du jeu rattrapent absolument tout. L’écriture de ce troisième opus, couplée à sa direction artistique, est une véritable inspiration et prouve une fois encore que le jeu solo, y compris en FPS, n’est définitivement pas mort.

Ce qui est cool :

  • L’univers, l’ambiance et les personnages.
  • Les musiques et les lumières.
  • La customisation d’armes ultra poussées.

Ce qui est moins cool :

  • Les IA à la ramasse.
  • Quelques bugs et défauts techniques qui brisent l’immersion par moments.
  • Un gameplay légèrement poussiéreux.