Deux journalistes turcs incarcérés pour une enquête sur les liens entre les djihadistes et Erdogan

Deux journalistes turcs incarcérés pour une enquête sur les liens entre les djihadistes et Erdogan

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Par Inès Bouchareb

Publié le

Jeudi, deux journalistes turcs ont été écroués après la diffusion d’un reportage accusant le gouvernement d’Erdogan de livrer des armes à des djihadistes en Syrie. 

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Le rédacteur en chef du journal d’opposition Cumhuriyet, Can Dündar (lauréat du prix RSF de la liberté de presse), et son correspondant à Ancumhukara, Erdem Gül, ont été incarcérés, jeudi 26 novembre, en Turquie. Ces deux journalistes ont été accusés d’“espionnage” et de “divulgation de secrets d’État” pour avoir diffusé, fin mai, une vidéo censée montrer que les services de renseignement turcs livraient des armes à des groupes djihadistes combattant en Syrie.

Le reportage en question montrait des policiers turcs en train d’ouvrir des caisses, supposées contenir des armes et des munitions, à l’arrière de trois camions appartenant aux services de la Sécurité d’État (MIT).

Une “aide” aux turcophones de Syrie, selon la Turquie

L’affaire a provoqué un véritable scandale en Turquie. À la suite de cette publication, un tribunal a ordonné l’arrestation de leurs auteurs pour appartenance à une organisation terroriste armée et atteinte à la sûreté de l’État.

Ankara n’a cessé de répéter que le convoi intercepté contenait une “aide” destiné aux populations turcophones de Syrie. Recep Tayyip Erdogan, président de la Turquie, a même personnellement porté plainte contre Can Dündar et promis de “punir” les auteurs du reportage.

Daech au cœur de la crise diplomatique turco-russe

L’incarcération des deux journalistes intervient alors que les relations entre la Russie et la Turquie traversent une grave crise. Depuis l’incident aérien au cours duquel l’armée turque a abattu un bombardier russe près de la frontière syrienne, mardi 24 novembre, Vladimir Poutine accuse Recep Tayyip Erdogan d’entretenir des liens avec les djihadistes.

Au pouvoir depuis 13 ans, l’AKP (Parti de la justice et du développement) et son fondateur Erdogan sont régulièrement épinglés dans les capitales étrangères et par les ONG de défense de la liberté de la presse, qui lui reprochent ses pressions de plus en plus nombreuses et liberticides à l’égard des médias.

L’Union européenne, elle, a affirmé suivre “de près” l’affaire de deux journalistes qu’elle juge “inquiétante”. Une porte parole de l’UE a déclaré à Bruxelles :

La liberté d’expression est l’un des principes fondamentaux de l’Union européenne.

“L’AKP complice de Daech”

À Istanbul, un millier de personnes se sont rassemblées ce vendredi 27 devant le siège du journal Cumhuriyet pour dénoncer l’incarcération de ces journalistes. Les manifestants, des journalistes, élus de l’opposition et intellectuels, ont hurlé des slogans hostiles à Recep Tayyip Erdogan et à son parti. “Tous ensemble contre le fascisme”, “Tayyip menteur” ou “l’AKP complice de Daech”, scandaient-ils.