Légalisation du cannabis : ce que disent les candidats de la primaire de la gauche

Légalisation du cannabis : ce que disent les candidats de la primaire de la gauche

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Par Cyrielle Bedu

Publié le

Le 15 janvier, lors du second débat de la primaire de la gauche, les sept candidats ont une nouvelle fois confronté leurs points de vue sur divers sujets de société. L’un d’entre eux a particulièrement attiré l’attention : la légalisation du cannabis.

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Les candidats de la primaire de la gauche ne sont pas tous d’accord sur la question du cannabis, et ils l’ont encore une fois montré lors du deuxième débat avant le premier tour. Quasiment tous semblaient avoir un avis tranché sur la question.

Il y a tout d’abord deux choses bien distinctes : la dépénalisation du cannabis et sa légalisation. Sa dépénalisation signifierait que cette drogue douce, illégale en France, resterait interdite mais que sa simple consommation n’entraînerait plus de peines de prison. En revanche, la légalisation de la marijuana voudrait dire qu’elle serait autorisée, mais elle signifierait aussi que l’État remplacerait le marché clandestin en organisant sa production et sa distribution. La vente et l’usage de cannabis seraient toutefois interdits aux mineurs, comme c’est aujourd’hui le cas pour la vente d’alcool et de tabac.

En France, toutes les drogues sont logées à la même enseigne en matière judiciaire. Qu’il s’agisse d’héroïne ou de cannabis, les peines encourues par les consommateurs sont les mêmes : ils risquent tous jusqu’à un an de prison et 3 750 euros d’amende.

Quatre candidats pour la libéralisation

Quatre des sept candidats à la primaire de la gauche sont pour la légalisation de la marijuana en France : Jean-Luc Bennahmias, Benoît Hamon, Sylvia Pinel et François de Rugy. Pour eux, cette volonté de légalisation doit être vue comme un moyen pour lutter efficacement contre les trafics. Pour Sylvia Pinel, présidente du Parti radical de gauche, le cannabis devrait être vendu en libre accès dans les pharmacies, à un prix suffisamment élevé pour dissuader les consommateurs, mais assez bas pour ne pas les pousser à se fournir chez des trafiquants.

Le frondeur socialiste Benoît Hamon dresse quant à lui un constat d’échec : “Est-ce que la politique actuelle du tout répressif a amené à une baisse de la consommation de cannabis et a arrêté les trafics ? La réponse est non.” Le candidat veut donc s’inspirer de ce qui s’est fait dans l’État du Colorado, aux États-Unis : légaliser le cannabis, pour que les millions d’euros annuels utilisés en France pour faire de la répression servent demain à la prévention et à l’information sur les risques liés à la consommation de cette drogue.

Jean-Luc Bennahmias, ancien vice-président du MoDem et ex-membre des Verts, a souhaité la fin de ce qu’il considère être “40 ans d’hypocrisie” autour du cannabis. “On peut continuer à faire les autruches et poursuivre la prohibition qui n’a pas réussi, mais notre justice et nos forces de l’ordre ont autre chose à faire que de s’occuper de petits dealers et de petits fumeurs”, a-t-il affirmé. Il est le seul candidat à avoir rappelé que certains utilisent le cannabis à des fins thérapeutiques et cela concernerait, selon lui, “plusieurs milliers de personnes en France”. Jean-Luc Bennahmias a également ajouté que les jeunes ne sont pas les seuls à fumer des joints. Et de déplorer : “Comment se fait-il que la France soit le seul pays en Europe à ne pas réussir à débattre sérieusement de ce sujet ?”

Pour le député écolo François de Rugy, “on connaît les dangers du tabac et de l’alcool, mais ça ne viendrait à l’idée de personne de les prohiber, car on sait ce que cela créerait : des trafics monumentaux comme ceux qui, aux États-Unis dans les années 30, ont fait la fortune d’Al Capone“. Pour le député de Loire-Atlantique, la légalisation de la marijuana est le seul moyen de lutter contre un trafic qui génère de la violence et “qui pourrit certains de nos quartiers“. François de Rugy aimerait appliquer dans les 18 premiers mois qui suivent l’élection présidentielle, une loi qui permettrait la légalisation de cette drogue : “Au bout de cinq ans, si on constate que le bilan est négatif, on reviendra au système actuel, sinon on continuera.” Le candidat souhaite également que ce soient les bureaux de tabac qui assurent la commercialisation du cannabis.

Un mépris total de Manuel Valls

Les trois autres candidats n’ont soit aucun avis sur la question, soit… ils s’en foutent royalement. C’est le cas de Manuel Valls qui, dès le début de la discussion sur le sujet, a déclaré n’avoir même pas évoqué la question du cannabis dans son programme. Il a cependant bien voulu préciser sa pensée sur le sujet au cours du débat : “Je ne suis d’accord ni pour la légalisation, et encore moins pour la dépénalisation.” Selon l’ancien Premier ministre, “si on légalise le cannabis, on aura un cannabis plus dur qui alimentera d’autres trafics”.

L’ancien ministre de l’Éducation Vincent Peillon ne s’est pas clairement exprimé sur le sujet, se contentant de dire qu’il souhaiterait mettre en place une conférence nationale sur la question s’il est élu président de la République car, selon lui, “les Français sont perdus sur ces questions”.

Et, last but not least, Arnaud Montebourg, qui est farouchement opposé à la libéralisation de la consommation du cannabis (pour des raisons de santé publique), a déclaré : “Je trouve inutile que l’élection présidentielle se déroule autour d’un sujet de cette nature.” En attendant, selon une enquête de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, 4,6 millions de Français ont consommé du cannabis en 2014.