La vente de cornes de rhinocéros est de nouveau autorisée en Afrique du Sud

La vente de cornes de rhinocéros est de nouveau autorisée en Afrique du Sud

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Par Jeanne Pouget

Publié le

Interdite depuis un moratoire en 2009, la vente de cornes de rhinocéros vient d’être de nouveau autorisée en Afrique du Sud. Un pas en arrière pour les associations. 

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Après de longues années de batailles judiciaires, des éleveurs sud-africains de rhinocéros ont fini par obtenir gain de cause : la Cour constitutionnelle de Johannesburg vient d’autoriser à nouveau la vente de cornes de rhinocéros sur le territoire. L’autorisation permettra donc de délivrer des permis prouvant l’origine légale et la traçabilité des cornes. Selon les intéressés, cette autorisation très encadrée ne pourra qu’être bénéfique à la préservation des animaux sauvages en entérinant le marché juteux du braconnage :

“Nous ne souhaitons pas stimuler la demande. Si le prix au kilogramme est de 60 000 dollars sur le marché noir et qu’on le vend légalement à 10 000 dollars, le commerce illégal ne pourra pas perdurer. […] Il faut avoir des permis et être capable de prouver l’origine de la corne. Seules celles qui viennent d’une réserve privée ou d’un animal mort naturellement pourront être commercialisées”, argumente Pelham Jones, le président de l’association des propriétaires privés de rhinocéros, cité par Libération.

Les propriétaires de rhinocéros arguent aussi que leur méthode de décornage est douce car indolore et qu’elle ne perpétue aucun massacre. Les cornes des animaux sont en effet sciées à la tronçonneuse une fois qu’ils sont anesthésiés. Au bout de quelques années, les cornes, constituées d’un agrégat de kératine, repoussent.

Une décision qui ne fera qu’alimenter le trafic selon les associations

La population mondiale de rhinocéros est en première ligne du braconnage qui décime en moyenne trois mammifères par jour rien qu’en Afrique du Sud. Il ne resterait aujourd’hui que 29 500 individus vivants dans le monde contre 1 million en 1800. Et pour les associations de défense des animaux, cette législation ne protégera pas plus les animaux qu’auparavant : “Les services répressifs de l’État ne seront pas en mesure de contrôler le commerce légal alors que le braconnage est déjà très élevé”, estime le docteur Jo Shaw, responsable du programme les concernant chez WWF en Afrique du Sud. Pire, ce genre de décision pourrait avoir un effet pervers :

“En 2008, la Cites [Convention internationale sur le commerce des espèces menacées] a autorisé le Botswana, l’Afrique du Sud, la Namibie et le Zimbabwe à vendre 100 tonnes d’ivoire d’éléphant à la Chine et au Japon pour réduire la demande et détruire le commerce illégal. Mais c’est tout le contraire qui s’est produit et qui a provoqué la mort de plus de 30 000 animaux par an”, s’inquiète Susie Ellis, la présidente de l’International Rhino Fondation.

Par ailleurs cette nouvelle régulation qui autorise l’exportation de deux cornes de rhinocéros par personne porte un message implicite fallacieux : “Cela donne encore l’impression que la corne pourrait avoir une valeur médicale”ajoute Susie Ellis. En effet, les cornes de rhinocéros sont très prisées en Asie où elles ont des vertus prétendument médicales jusqu’alors infondées. Au-delà du débat “pour” ou “contre” la vente de cornes de rhinocéros, la question qui demeure est surtout celle du “Pourquoi ?” Pourquoi vouloir posséder et faire du commerce avec des cornes qui ne nous appartiennent pas ?