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Il y a bien une exoplanète “jumelle” de la Terre dans le voisinage

Il y a bien une exoplanète “jumelle” de la Terre dans le voisinage

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Par Thibault Prévost

Publié le

À 4,25 années-lumière de notre planète, une exoplanète 30% plus grosse que la Terre orbite bien en zone habitable autour de l’étoile Proxima du Centaure.

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Les rumeurs bruissaient depuis la semaine dernière, elles sont désormais confirmées : à 4, 25 années-lumière de la Terre – un pâté de maison à l’échelle de l’univers –, une exoplanète “jumelle”, rocheuse et en orbite dans la zone d’habitabilité autour de l’étoile Proxima du Centaure vient d’être découverte. Si nos moyens techniques sont encore trop limités pour envoyer un module d’exploration à pareille distance, Proxima b – c’est son petit nom – est suffisamment proche pour être étudiée sous toutes les coutures par nos instruments d’observation. Pour autant, ne préparez pas vos sacs et vos caissons d’hibernation tout de suite, car il y a peu de chances que cette exoplanète soit un nouvel éden.

Que sait-on, au juste, de cette nouvelle et prometteuse candidate à l’exploration ? Selon l’équipe de la Queen Mary University de Londres (contactée par la revue Nature), qui a découvert l’exoplanète, celle-ci serait au moins 30 % plus massive que la Terre, posséderait une surface rocheuse et serait suffisamment “tempérée” pour accueillir de l’eau sous forme liquide. En orbitant à 7,3 millions de kilomètres de son étoile, soit 5 % de la distance entre le Soleil et la Terre, Proxima b se trouve dans la “zone d’habitabilité” de celle-ci (car Proxima du Centaure est une naine rouge, qui chauffe bien moins fort que notre astre), et tourne autour en 11,2 jours. Comme l’explique New Scientist, si vous vous trouviez sur le sol de Proxima b, vous verriez un soleil rouge Et c’est à peu près tout ce qu’on sait du côté des bonnes nouvelles.

Atmosphère ? Pas d’atmopshère ? Telle est la question

Avant de s’enflammer et de voir en Proxima b une candidate à la colonisation interplanétaire, jetons donc un œil aux données récoltées par l’équipe du projet Pale Red Dot, chargé de débusquer de nouvelles exoplanètes. Bien que l’estimation de la température de surface soit encore très incertaine, on la situe quelque part entre -33 °C et plusieurs centaines de degrés positifs. De plus, les lois de l’attraction liées à la grande proximité de son étoile auraient bloqué Proxima b dans une position particulière lui offrant une “face cachée”, comme la Lune, et l’autre perpétuellement exposée au Soleil. Migrons donc sur l’autre partie, vous dites-vous ? Pas mieux : les naines rouges sont connues pour générer d’intenses radiations de rayons X et UV – environ 400 fois plus que ce que la Terre ne reçoit, explique New Scientist. Un congélateur d’un côté, un micro-ondes de l’autre, en somme : voilà qui réduit les chances de voir la vie se développer.

Comme l’explique patiemment Le Monde, les astrophysiciens doivent désormais répondre à trois questions essentielles : Proxima b a-t-elle une atmosphère suffisamment épaisse pour tempérer sa surface, un champ magnétique assez puissant pour dévier les tempêtes de radiations et possède-t-elle de l’eau sous forme de pôles glacés ou, comme le prévoit un des scénarios échafaudés par une équipe française, est-elle dotée de lacs et de rivières ? Quelles que soient les réponses, elles seront extrêmement difficiles à connaître avec nos  outils d’observation actuels.

Vivement un nouveau télescope !

Guillem Anglada-Escudé, l’un des chercheurs européens sur le projet, explique que “les premiers indices d’une possible planète ont été découverts en 2013”, grâce aux données du Very Large Telescope (VLT) basé au Chili. Pour des distances aussi lointaines, la méthode utilisée est celle de la vitesse radiale : lorsqu’une planète passe entre son étoile et le télescope placé sur Terre, elle modifie la longueur d’onde de la lumière émise par l’étoile, de la même manière que l’on peut détecter la présence d’une personne sans la voir, lorsque celle-ci passe devant une source de lumière que l’on peut observer. Une méthode relativement efficace, utilisée par le télescope orbital Kepler, qui a permis la découverte de près de 4 000 exoplanètes ces dernières années, à un rythme exponentiel.

Si la découverte de Proxima b pourrait bien être “la découverte de la décennie”, qu’elle soit propice à la vie ou non, indique Ignas Snellen, autre astrophysicien du projet, la communauté scientifique tient avant tout à ne pas s’enflammer. En 2012, l’annonce de la découverte d’une exoplanète en orbite autour d’Alpha Centauri B, l’autre étoile du système binaire, s’était révélée être fausse. Une grosse désillusion pour l’astrophysique, qui fait désormais prévaloir un principe de précaution.

Pour en savoir plus sur Proxima b, il faudra sans doute attendre 2018 et la mise en orbite du successeur de Hubble, le télescope James-Webb, qui embarque avec lui les promesses les plus folles pour la découverte de nouvelles exoplanètes habitables, ou l’European Extremely Large Telescope, prévu pour 2024. Et pour se rendre sur la planète, le délai sera encore plus long : si la lumière elle-même met quatre ans à faire le trajet (contre 8 minutes du Soleil à la Terre), les technologies actuelles nous y amèneraient en 60 à 80 000 ans. À moins que le milliardaire russe Iouri Milner et son projet de véhicule à voile solaire, le Breakthrough Starshot, ne devienne réalité. Dans ce cas, la traversée ne prendrait qu’une petite trentaine d’années.