L’évasion fiscale d’Ikea expliquée comme dans un guide de montage

L’évasion fiscale d’Ikea expliquée comme dans un guide de montage

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Par Thibault Prévost

Publié le

Les députés écologiste ont transmis à la Commission européenne un rapport pour dénoncer les pratiques fiscales d’Ikea qui reprend les codes des manuels de montage des meubles en kit.

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Ils l’ont appelé “Evaz Fiskall”. Le 13 février, les eurodéputés écologistes ont transmis à la Commission européenne un rapport exhaustif analysant les stratégies d’évasion (ou d’optimisation, selon le point de vue) fiscale opérée par le groupe Ikea, numéro un mondial du meuble.

En utilisant les portes dérobées offertes par le Benelux et quelques astucieux montages, le groupe suédois serait ainsi parvenu à économiser, en 2014, 24 millions d’euros de taxes en France. Pour bien se faire comprendre, les députés du groupe parlementaire Verts/ALE ont décidé de faire dans le ludique, en reprenant les codes esthétiques des célèbres manuels de montage de la marque.


Les bénéfices vont donc directement dans un coffre-fort, sans passer par les mains du fisc. Le système, qui porte le nom de “sandwich hollandais” (la société néerlandaise est intercalée entre la société locale et le paradis fiscal), est également utilisé par Google, Facebook et d’autres multinationales pour échapper aux taxes européennes.

Un milliard d’euros envolés en cinq ans

Si Ikea Group dit s’être acquitté d’“un montant total de plus de 1,5 milliard d’euros” en 2015 et jure “payer ses impôts conformément aux législations nationales et internationales”, le rapport estime que le concepteur de meubles aux noms imprononçables aurait réussi à épargner un milliard d’euros de taxes entre 2009 et 2014 et échapper à 64 % de ses impôts français. Les élus écologistes encouragent maintenant Pierre Moscovici, commissaire européen aux Affaires économiques et Margrethe Vestager, commissaire européen à la Concurrence, d’engager des procédures de contrôle.

Selon une étude du Parlement européen, la fraude fiscale représenterait entre 60 et 80 milliards d’euros chaque année dans l’Union. “De l’argent pris à nos hôpitaux, écoles, transports et tout autre service public vital”, a rappelé Pierre Moscovici. Depuis l’éclatement du scandale des LuxLeaks en 2014, qui révélait un système d’évasion fiscale à grande échelle en Europe grâce à des accords fiscaux avec le Luxembourg, l’UE a fait adopter l’échange automatique d’informations sur les accords passés entre les différents États membres et les multinationales.

C’est un début, mais la création d’un taux européen d’imposition unique sur les entreprises – l’harmonisation fiscale – n’est encore qu’un lointain mirage. Ikea et les autres peuvent donc continuer à monter tranquillement leurs jolies structures fiscales, avec ou sans manuel.