De Tolu Coker à Mowa Ogunlesi : 5 créateurs prometteurs issus de la Central Saint Martins

De Tolu Coker à Mowa Ogunlesi : 5 créateurs prometteurs issus de la Central Saint Martins

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Par Naomi Clément

Publié le

Le 31 mai dernier, comme chaque année, le Central Saint Martins College of Art and Design de Londres a présenté les collections de ses nouveaux diplômés. Un défilé explosif, novateur et politiquement engagé, qui laisse entrevoir le futur de la mode britannique.

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Le défilé du Central Saint Martins College of Art, qui présente chaque année les collections de ses nouveaux diplômés, est l’un des plus attendus de l’industrie de la mode. Et pour cause : depuis sa création il y a bientôt trente ans, l’institution londonienne, qui fait partie des six composantes de l’université des arts de Londres (élue huitième du classement mondial des meilleures universités d’art et de design par le QS World University Rankings 2015), a contribué à lancer les plus grands designers d’aujourd’hui. Parmi eux ? Stella McCartney, John Galliano, Phoebe Philo, ou encore le regretté Alexander McQueen.
Cette année encore, la CSM n’a pas failli à sa réputation. Tenu le mercredi 31 mai dernier dans l’enceinte du Granary Square, le Central Saint Martins’ BA Fashion Show, qui présentait les collections pensées par les 41 lauréats de l’année 2017, a offert un tourbillon de couleurs, de coupes et de matières surprenant, accompagné d’un véritable engagement politique. “Les étudiants ont présenté des collections qui abordent de véritables enjeux sociétaux et politiques, tels que la question du genre ou la prochaine élection britannique, décrypte une journaliste de Dezeen.com, présente au défilé. Au terme d’une année politique agitée, qui laisse entrevoir un futur incertain, les étudiants ont fait part de leurs frustrations, en présentant des vêtements nourris d’affirmations et de représentations chargées d’énergie.” Voici ceux dont les créations, fascinantes et militantes, nous ont le plus séduits.

Le féminisme “drag-punk” de Daniel John Sansom

Daniel John Sansom fut l’un des créateurs les plus applaudis de la soirée. Son défilé, aussi esthétique que politique, a séduit par la richesse des textiles présentés, mais aussi par l’histoire que le jeune créateur de 24 ans a souhaité conter à travers ses vêtements et leur stupéfiante mise en scène. “En fait, ma collection est un hommage aux femmes, expliquait ce dernier dans les colonnes de Love Magazine. […] Je voulais refaire ce que Dolce & Gabbana fait en Italie chaque saison, mais à la sauce anglaise ; et pour le faire, j’ai croisé les femmes qui m’inspirent au quotidien, et certains éléments de la culture britannique.”
Au programme ? Un mélange explosif croisant des représentations mi-punk mi-drag queen de la Première ministre Theresa May, de la mannequin et présentatrice Jodie Marsh, ou encore de Camilla, la duchesse de Cornouailles, portée sur un trône par quatre jeunes hommes aussi bodybuildés que luisants. “Chacun de mes vêtements correspond à la personnalité d’une de ces femmes inspirantes”, conclut Daniel John Sansom.

 

Tolu Coker et l’affirmation de l’identité noire occidentale

Réminiscence de la culture hip-hop des années 1990, la collection pensée par Tolu Coker est une ode à l’identité noire. “Lorsque j’étais en stage [chez Margiela, ndlr] et que j’étudiais le design, j’étais assez frustrée, parce que la création de vêtements se basait surtout sur des idéaux, sur des représentations de personnes qui n’existaient pas, confiait l’étudiante de 23 ans à Love Magazine. Avec cette collection, j’ai voulu m’intéresser en profondeur à l’identité noire occidentale. Quand j’étais en stage, j’ai réalisé un documentaire qui suivait quatre personnes entre Londres et Paris. Ma collection est entièrement inspirée de leur vie, de leur identité, de leur famille.” Et de conclure :

“Je crois que pendant longtemps, l’identité noire a été rattachée à l’Afrique, mais je crois qu’il existe une nouvelle identité qui a été façonnée par les Noirs qui ont migré vers l’Occident. Des gens comme moi, qui suis née de parents originaires du Nigéria, mais qui ai été élevée à Londres. Mon but premier, c’était de représenter ces personnes-là.”

L’hommage à Terminator de Sarah Ansah

Moins politique que celle de ses comparses, la ligne créée par Sarah Ansah n’en est pas moins pertinente, puisqu’elle s’inspire d’un personnage qui a marqué l’histoire de la culture populaire : Terminator. “Quand j’étais plus jeune, mon frère m’a fait regarder ce film, mais j’étais beaucoup trop jeune pour le regarder, et j’ai été marquée par le méchant, celui qui a du métal liquide. Il a été au cœur de nombreux cauchemars, mais quand j’y pense aujourd’hui, il me rappelle surtout ma chambre d’enfant, se souvient la jeune Anglaise avec nostalgie pour Love Magazine. Cette collection, avec toutes ces textures, lui est dédiée.” En résulte des silhouettes féminines et futuristes, qui ont permis à Sarah Ansah d’être gratifiée du second prix : “L’Oréal Professionnel Young Talent”.

Le “gorpcore” futuriste d’Øyvind Rogstad

Récemment mis en lumière par les prescripteurs de tendances, le “gorpcore“, qui célèbre l’avènement de la dégaine trekking, ne cesse de gagner du terrain. Adoptée par les grandes marques du streetwear dont Supreme, qui a multiplié les collaborations avec les griffes techniques telles que North Face ou Stone Island, mais aussi par les grands créateurs de luxe comme Gucci ou Louis Vuitton, qui ont tour à tour adopté la banane, cette tendance est aujourd’hui revisitée par le Norvégien Øyvind Rogstad.
Pour sa collection de fin d’année, le jeune créateur a en effet donné vie à une ligne mélangeant harmonieusement leggings colorés, lunettes de cyclisme, coupe-vent fluorescents et chaussures d’escalade. Voilà qui devrait plaire aux héritiers du “normcore“.

La culture nigériane à l’honneur chez Mowa Ogunlesi

Originaire de Lagos, au Nigéria, Mowa Ogunlesi a été bercé par le rock psychédélique nigérian des années 1970 et 1980. Un genre méconnu, qui lui a inspiré cette première ligne : “À cette époque, dans les seventies, les Nigérians étaient tellement libérés ! Ils n’avaient aucun problème à exprimer leur sexualité, et ne se souciant guère des règles imposées par leur culture, ce qui les encourageait à s’habiller de façon unique, explique-t-il à son tour à Love Magazine. Le Nigéria est drainé par une créativité à l’état brut. J’avais envie que cette collection de fin d’année célèbre ma culture, et tous les aspects positifs de mon pays natal.”