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La Chine a lancé un satellite de communications “quantiques” inviolables

La Chine a lancé un satellite de communications “quantiques” inviolables

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Par Thibault Prévost

Publié le

Le satellite Mozi, lancé par la Chine le lundi 15 août, testera un système de chiffrement des communications basé sur les photons et en théorie inviolable.

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Traduction : “Selon un expert américain, la nouvelle du lancement du premier satellite de communications quantiques est ‘très excitante’.”

Depuis le lundi 15 août, le monde de la recherche en physique, de la science informatique et des technologies de l’information a les yeux braqués sur le ciel. Le 16 août, le gouvernement chinois a mis en orbite Mozi, un satellite de communication qui va faire office de laboratoire pour tester le futur de la transmission de données. Un futur dominé par l’inviolable chiffrement quantique, débarrassant pour toujours les grandes puissances industrialisées de la menace du piratage et, surtout, de l’espionnage d’État. À l’heure de la surveillance électronique mondiale et des dispositifs d’écoute à la PRISM, Mozi pourrait donner à la Chine un avantage technologique déterminant dans la course à la cybersécurité.

Pendant les prochains mois, Mozi, positionné en orbite à 500 kilomètres d’altitude, tentera d’envoyer des messages à chiffrement quantique entre Pékin et Urumqi, la capitale de la province du Xinjiang, située à 2 500 kilomètres de distance. Une échelle relativement faible qui représenterait néanmoins un record pour la transmission de données par chiffrement quantique : à l’heure actuelle, cette forme de communication n’a jamais excédé 300 kilomètres. En fait, comme l’explique le responsable du projet Wang Jianyu à l’agence Chine nouvelle,  la difficulté de la tâche sera équivalente à “lancer une pièce de monnaie d’un avion volant à 100 kilomètres d’altitude et espérer qu’elle vienne se ficher exactement dans la fente d’une tirelire-cochon en rotation”.

Cette communication s’autodétruira dès que vous l’observerez

Bon, très bien, tout ça a l’air compliqué à mettre en place. Mais ça fonctionne comment, le chiffrement quantique ? De la même manière que les chiffrements traditionnels, la méthode quantique repose sur la cryptographie : le message est encodé selon une méthode logique, et celui qui reçoit le message ne peut le décoder qu’en possédant la clé de cryptage utilisée par l’envoyeur. Dans le monde des télécommunications actuelles, la clé est une suite plus ou moins compliquée de caractères alphanumériques ou un algorithme de chiffrement, qui reposent sur les mathématiques et peuvent donc être décodés par des pirates. Dans la méthode de chiffrement quantique, la clé de cryptage est une particule, plus exactement un photon (une particule fondamentale de la lumière).

C’est là que l’épithète “quantique” prend son importance, détaille Popular Science. En physique quantique, il est possible de placer artificiellement deux particules dans des “états quantiques” complémentaires. Une fois cette complémentarité atteinte, les deux particules sont liées par une propriété appelée intrication quantique : si la particule A est modifiée, la modification se verra instantanément sur la particule jumelle B, peu importe la distance à laquelle elle se trouve.

Enfin, dans ces étranges états superposés (rappelez-vous l’expérience du chat de Schrödinger, bloqué entre la vie et la mort), les photons sont inséparables : la simple présence d’un observateur (un hacker, par exemple) modifierait l’état quantique et causerait l’effondrement de tout le système. L’information envoyée via le satellite serait instantanément perdue et le messager constaterait la tentative d’espionnage. Les clés quantiques sont donc, théoriquement, impossible à craquer sans les démolir. Problème : pour le moment, le système est à la fois si fragile et si complexe qu’il reste difficile à mettre en place.

Enjeu crucial pour la communication militaire

Selon Alexander Ling, du Centre de technologie quantique de Singapour, cité par Phys.org, le plus compliqué est de pointer le satellite vers la Terre avec une précision suffisante pour qu’il puisse à la fois recevoir et émettre des informations, le tout sans être affecté par les perturbations atmosphériques. Stabiliser le faisceau de photons pour maintenir le lien entre les particules intriquées sera donc la partie la plus délicate de l’opération.

Si Mozi et son centre de chiffrement quantique embarqué parviennent à prouver la faisabilité du chiffrement quantique, la Chine aura donc pris un sérieux avantage sur ses concurrents, alors que la technologie est étudiée aussi bien en Europe qu’aux États-Unis. Pan Jianwei, le responsable du satellite Mozi, voit même “la création d’un réseau mondial de communications quantiques vers 2030”. Dans un contexte de guerre permanente de l’information entre superpuissances, l’avantage stratégique serait inestimable.