En Australie, l’ONU dénonce le racisme envers les Aborigènes

En Australie, l’ONU dénonce le racisme envers les Aborigènes

Image :

(Image tirée du film Samson & Delilah, 2009)

photo de profil

Par Adrien Leveque

Publié le

Une rapporteuse de l’ONU a présenté lundi 3 avril une évaluation détaillée du niveau de racisme vécu par les populations aborigènes en Australie. Elle exhorte le gouvernement à en faire davantage pour ses peuples autochtones.

À voir aussi sur Konbini

“Profondément troublant”. C’est ainsi que Victoria Tauli-Corpuz, la rapporteuse spéciale de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, a qualifié le niveau de racisme en Australie à l’égard des Aborigènes. Cette dernière a réalisé une visite de 15 jours sur l’île-continent pour évaluer les progrès effectués depuis 2009 auprès de la population autochtone et insulaire du détroit de Torrès, sur invitation de Canberra.

Elle a ainsi expliqué dans un rapport :

“Ce racisme se manifeste de différentes manières, allant des représentations stéréotypées tels que le portrait de violents criminels, de profiteurs de la sécurité sociale ou de parents indignes, jusqu’à des discriminations devant la justice.”

Victoria Tauli-Corpuz a déclaré que des médecins et des patients autochtones s’étaient confiés sur l’expérience du racisme dans le secteur médical lors de sa visite en Australie, et que la question avait été proposée comme partie prenante d’un plan national de santé.

De trop nombreuses discriminations

La rapporteuse spéciale a pointé du doigt le nombre d’enfants aborigènes et insulaires du détroit de Torrès dans les centres de détention pour jeunes. “J’ai rencontré des jeunes enfants, parfois âgés de 12 ans, en centre de détention : ce fut l’expérience la plus troublante de ma visite”, a-t-elle confié.

Plus largement, Victoria Tauli-Corpuz estime que le nombre d’Aborigènes derrière les barreaux est “tout simplement stupéfiant”. “Le taux incroyablement élevé d’incarcération des Aborigènes et des insulaires du détroit de Torrès, y compris des femmes et des enfants, est une préoccupation majeure en matière de droits de l’homme”, déclare-t-elle. Selon elle, ceux-ci représenteraient 27 % de la population carcérale de l’Australie, alors qu’ils ne constituent que 3 % de la population totale du pays.

Victoria Tauli-Corpuz a appelé à repenser les lois et les politiques qui ne visent pas forcément les populations aborigènes, mais qui ont un impact disproportionné sur celles-ci, comme la loi qui permet d’arrêter des personnes sans papiers dans le Territoire du Nord. Par ailleurs, la rapporteuse de l’ONU affirme que le le système éducatif traditionnel australien couvre de manière insuffisante l’histoire des Autochtones et des insulaires du détroit de Torrès, ainsi que l’impact de la colonisation européenne sur ces populations.

Plus d’efforts à fournir

Le gouvernement australien publie depuis 2008 un rapport annuel intitulé “Combler l’écart” (“Closing the gap”) dont la dernière édition, parue en février, montre à nouveau l’échec des efforts proposés par le pays pour réduire les inégalités touchant les Aborigènes. Les chiffres de la mortalité infantile et de l’espérance de vie des Aborigènes sont par exemple toujours aussi alarmants.

Le Premier ministre Malcolm Turnbull avait alors reconnu que les progrès effectués avaient été insuffisants. Un discours d’impuissance semblable à celui qu’il avait tenu un an plus tôt à propos du précédent rapport. Victoria Tauli-Corpuz exhorte donc le gouvernement fédéral à renouveler ses efforts pour faire progresser la reconnaissance constitutionnelle des peuples autochtones, et l’encourage à explorer la possibilité d’un traité avec les peuples autochtones et insulaires du détroit de Torrès. La rapporteuse spéciale de l’ONU a également demandé au gouvernement d’élaborer une stratégie nationale pour éliminer la violence à l’égard des femmes aborigènes.

Victoria Tauli-Corpuz présentera un grand rapport de ses conclusions et recommandations en septembre, juste un mois avant que l’Australie ne découvre si elle s’est assurée le siège qu’elle convoite au Conseil des droits de l’homme de l’ONU.