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Le New York Times donne la parole aux femmes contre le sexisme à Hollywood

Le New York Times donne la parole aux femmes contre le sexisme à Hollywood

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Par Fanny Hubert

Publié le

Le magazine américain a donné la parole à une centaine de femmes et quelques hommes pour dénoncer une industrie hollywoodienne qui semble régresser en matière d’égalité. 

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Le sexisme est un fléau qui sévit encore et toujours à Hollywood. Différences de salaires, frilosité à embaucher des réalisatrices pour faire des blockbusters… les problèmes sont nombreux et persistants. Pour faire changer les choses, les femmes qui travaillent dans cette industrie hollywoodienne sont de plus en plus nombreuses à s’exprimer sur le sujet. Pour les aider dans leur lutte, Maureen Dowd du New York Times leur a donné la parole et leur a consacré un article plus que nécessaire.

Sur la couverture, elles sont 63. Dans le papier, elles sont une centaine, avec quelques hommes, à avoir répondu à l’appel de la journaliste. Réalisatrices, productrices, scénaristes, actrices… elles savent toutes ce que veut dire être victime de sexisme à Hollywood. Et pour cause, on peine encore à leur faire confiance et c’est bien désolant.

Une constante régression

Comme le rappelle Maureen Dowd, entre 2013 et 2014, les femmes ne représentaient que 1,9% des réalisateurs qui figuraient dans le Top 100 des films les plus rentables de l’année. Puis, elle ajoute :

En 2014, 95% des directeurs de la photographie, 89% des scénaristes, 82% des éditeurs, 81% des producteurs exécutifs et 77% des producteurs étaient des hommes.

Pour Anjelica Huston, fille du célèbre John Huston, Hollywood ressemble à une église : “Ils ne veulent pas que l’on soit des prêtres. Ils veulent que l’on soit des nonnes obéissantes”. Pourtant, cela ne semble pas toujours avoir été le cas. Les pionnières du cinéma comme Alice-Guy Blaché, considérée comme la première réalisatrice, ont su s’imposer dans un milieu très masculin. Dorothy Azner, réalisatrice des années 20 aux années 40, a même dit que “personne ne [l’]avait embêtée parce qu'[elle] étai[t] une femme”.

Les personnages féminins étaient également plus travaillés que maintenant. Dans les films noirs, les femmes avaient du caractère et n’étaient pas hyper-sexualisées. Tout a changé à partir de 1975 lors de la sortie des Dents de la mer de Steven Spielberg qui a lancé la mode des blockbusters. Résultat : “De 2007 à 2014, seulement 30% des personnages féminins avaient un nom et s’exprimaient dans les 100 films les plus rentables.” De plus, il semblerait que les femmes doivent toujours être à moitié nues ou carrément victimes de violences sexuelles :

Des scénaristes d’Hollywood m’ont dit qu’elles avaient l’habitude d’entendre ce genre de choses : “Est-ce que tu peux rajouter une scène de viol là ? Est-ce qu’ils peuvent aller dans un club de strip-tease ?”

Des écarts de salaire et un manque de confiance affligeant

Jusqu’à maintenant, les femmes ne s’étaient pas vraiment exprimées dans les médias sur ce sujet épineux. Le hack de Sony a changé la donne. Certains mails ont révélé que des actrices comme Jennifer Lawrence ou Amy Adams étaient moins bien payées que leurs camarades masculins. Le wage gap (écart de salaire entre hommes et femmes) est en effet un problème bien ancré dans les traditions hollywoodiennes. De plus en plus d’actrices comme Patricia Arquette, Meryl Streep ou Jessica Chastain le dénoncent activement. 

Ces écarts ne peuvent être justifiés rationnellement. Tout comme le manque de confiance que les femmes subissent. Pour une réalisatrice, il n’y a aucun droit à l’erreur. Si son premier film cartonne, elle pourra en faire un deuxième. Mais si elle se plante, alors elle sera jetée aux oubliettes d’Hollywood qui doivent être déjà bien remplies.

Pour Shonda Rhimes, “à chaque fois qu’un projet fait par une femme a du succès, c’est vu comme un coup de chance. Au lieu de dire qu’Hunger Games est populaire auprès des jeunes filles, ils disent que cela marche parce que Jennifer Lawrence est lumineuse et exceptionnelle. […] C’est ridicule.

Nous n’avons pas le bénéfice du doute, particulièrement nous les femmes noires. Nous sommes vues comme incompétentes alors qu’un homme blanc est dit compétent à moins que le contraire ne soit prouvé, rajoute Dee Rees (Bessie). 

Prendre enfin le pouvoir

Si la confiance ne règne décidément pas, c’est que les hommes ont peur des femmes, selon certaines intervenantes. Pour Jessica Elbaum, productrice, il y a une peur que les femmes “ne fassent que des histoires pour femmes, que si on leur donne carte blanche, elles écriront juste des histoires où tout le monde se tire les cheveux et pleure.”

Les émotions ne plaisent pas vraiment à la gent masculine. Si une femme pleure, ce sera considéré comme une humiliation, comme cela a été le cas pour Catherine Hardwicke qui a été raillée pour avoir craqué sur le tournage de Twilight. Pour Linda Woovlerton, scénariste pour Le Roi Lion notammentles hommes “ont peur que l’on puisse se gérer toutes seules, que l’on soit puissantes et que l’on dirige le monde mieux qu’eux.” Et bam.

Puisque le sexisme ne semble faire qu’avancer, les femmes veulent prendre le pouvoir qu’elles méritent et dire haut-et-fort que les situations qu’elles endurent n’ont rien de normal. Hollywood, tu as interêt cette fois-ci à les entendre.